Les trois points d’ancrage d’un portefeuille

Par Daniel Mercier | 1 novembre 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le défi de la gestion de portefeuille est de réaliser le plein potentiel de rendement d’un portefeuille de placements pour un niveau de risque donné et accepté par l’investisseur. Le positionnement stratégique du portefeuille repose principalement sur trois éléments.

Les 3 points d’ancrage d’un portefeuille et leurs composantes

Élément # 1 : Objectif Élément # 2 : Risque Élément # 3 : Capacité financière
Objectif de placement Horizon d’investissement Tolérance au risque Connaissance en placement Valeur nette Revenu annuel


Le premier élément est l’objectif financier du placement. L’objectif peut se définir facilement en matière de rendement souhaité. La combinaison de l’objectif de placement et de l’horizon d’investissement permet l’identification des sources de rendement admissibles dans la stratégie.

Un objectif financier combiné à un horizon à court terme (moins de 18 mois) limite les sources de rendement au revenu d’intérêt. Un horizon à plus long terme permet l’utilisation de revenu d’intérêt, de dividende et de gain en capital. L’établissement des différentes sources de revenus (intérêt, dividende et gain en capital) est fonction de la combinaison entre l’horizon d’investissement et le niveau de risque accepté par le client. Le tableau suivant démontre l’impact de l’horizon d’investissement sur le type de revenu sélectionné.

Sommaire statistique du rendement annuel des indices de marché de 1926 à 2013

Période d’investissement IndiceS&P500 Indice obligataire à long terme du gouvernement américain Bons du Trésor américain
Horizon 1 an (total de 88 périodes)
Rendement moyen 12,5% 5,91% 3,54%
Rendement minimum – 43,34% – 14,90% – 0,02%
Nombre d’années avec un rendement négatif 24 23 1
Horizon 10 ans (total de 79 périodes)
Rendement moyen 10,46% 5,63% 3,40%
Rendement minimum -1,38% -0,07% 0,15%
Nombre d’années avec un rendement négatif 4 1 0
Source : Ibbotson SBBI 2014 Classic Yearbook


Si l’horizon de placement décide de l’admissibilité d’une catégorie d’investissement, le profil d’investisseur détermine quant à lui les proportions entre les catégories d’actifs. Le niveau de connaissances en placement a une influence directe sur le niveau de tolérance au risque. Le profil d’investisseur donne donc le niveau maximum de risque du portefeuille et non le niveau optimal pour un objectif financier donné.

Prenons l’exemple d’un investisseur de type croissance qui a un objectif financier à court terme (mise de fonds pour un chalet). Il va choisir une stratégie de placement plus sûre que son niveau de tolérance au risque en raison d’un horizon de placement à court terme.

Enfin, la valeur nette et le revenu annuel d’un investisseur constituent les éléments clés de sa capacité financière à prendre du risque. Et la capacité financière peut temporiser le niveau de risque réel de la stratégie d’investissement recommandée.

Pour illustrer la situation, prenons trois investisseurs proches de la retraite (voir le tableau ci-après). Ils ont le même objectif financier, le même horizon d’investissement et le même profil. Seule leur capacité financière diffère. La stratégie suggérée est très différente pour chacun, car ils ne font pas face au même problème.

La situation de l’investisseur A est comparable au fonds de pension qui accuse un important déficit actuariel. La solution peut être de retarder la retraite. Il ne serait pas acceptable de construire un portefeuille de placement avec une répartition des actifs équilibrée combinée à un taux de décaissement de 24 %. On voit bien que la capacité financière vient réduire la capacité de l’investisseur à prendre du risque.

Exemples d’investisseurs à la retraite

Investisseur A Investisseur B Investisseur C
Objectif La retraite La retraite La retraite
Moment Aujourd’hui Aujourd’hui Aujourd’hui
Profil Équilibré Équilibré Équilibré
Revenu de pension employeur 0$ 35000$ 0$
Besoin décaissement du portefeuille en% 24% 5% 0,4%
Valeur nette 50000$ 500000$ 6000000$
Valeur marchande de la maison 0$ (en appartement) 400000$ 1000000$


La situation de l’investisseur B est comparable au fonds de pension 100 % capitalisé. L’application d’un portefeuille de placement avec une répartition équilibrée est acceptable dans ce cas.

L’investisseur C est pour sa part dans une situation comparable au fonds de pension avec un important surplus actuariel. Ce type de cas de figure se rencontre régulièrement chez les clients entrepreneurs. Après la vente de leur entreprise, ils se retrouvent souvent avec un montant disponible à l’investissement supérieur à leurs besoins pour la retraite.

Prenons l’exemple de l’investisseur C, qui a une valeur nette de 6 000 000 $ et une maison de 1 000 000 $. Un montant de 5 000 000 $ est disponible pour l’investissement. En supposant que le besoin d’actif pour la retraite s’élève à 1 000 000 $, l’investisseur C se retrouve avec un surplus d’actif de 4 000 000 $. Nous sommes en présence d’une personne avec un double objectif financier, soit la retraite et l’héritage familial. L’importance de bien identifier le deuxième objectif permet de maintenir le niveau de risque approprié avec un horizon de placement à long terme. Le niveau de risque approprié combiné à l’optimisation fiscale de l’ensemble des placements procure une valeur ajoutée maximale à la stratégie de placement.

Chaque investisseur a un niveau de risque maximum personnel, c’est pourquoi un portefeuille de placement se compare bien à un GPS : il ne peut suivre qu’une seule adresse à la fois, soit avoir un seul niveau de risque.

DEUX QUESTIONS que le conseiller en sécurité financière devrait poser à son client

1 Dans l’estimation de la tolérance au risque d’un client, a-t-on tenu compte de son risque de vivre plus vieux que prévu ?

2 Est-ce qu’une rente viagère avec ou sans période de garantie pour un client convient pour stabiliser une portion du revenu de son portefeuille à long terme et de le maintenir s’il dépasse son espérance de vie ?

Jean-Guy Grenier, BAA, CMC, Adm.A., Pl. Fin., directeur régional – Elite, Développement et Mise en marché, Assurance et Épargne pour les particuliers, Desjardins Sécurité financière, Montréal.


Daniel Mercier

Daniel Mercier est directeur de Gestion de Patrimoine Assante à Sherbrooke.


• Ce texte est paru dans l’édition de novembre 2014 de Conseiller. Il est aussi disponible en format PDF. Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Daniel Mercier