Rapport Godbout : quel impact pour les PME?

Par Yves Rivard | 25 mars 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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On ne propose pas de réviser la fiscalité du Québec sans modifier certaines pratiques considérées comme acquises. À la suite du dévoilement des recommandations de la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise, ConseillerPME a tenu à évaluer l’impact qu’elles pourraient avoir sur les entreprises. Un fiscaliste a accepté l’invitation à commenter le document qui propose, entre autres, d’accorder à toutes les PME certains avantages réservés jusque-là au secteur manufacturier…

Baisse du taux général d’imposition des bénéfices des sociétés

« Cette recommandation, qui propose de ramener le taux de 11,9 % à 10 % vise à rendre le Québec plus compétitif en matière fiscale par rapport aux autres provinces canadiennes, note Me Daniel Lacelle, associé au bureau de Gowlings (Montréal) et chef du groupe Droit fiscal.

Si retenue, la mesure établirait à 4 % le taux d’imposition des PME pour la tranche de revenu entre 100 000 $ et 500 000 $. « Ce qui est intéressant avec cette prime à la croissance, c’est que l’allègement fiscal autrefois réservé aux PME du secteur manufacturier s’étend maintenant à toutes les PME de cinq employés et plus », souligne Me Lacelle. Voilà qui constituerait un incitatif à viser la croissance.

Ce concept exclurait toutefois désormais les travailleurs autonomes et les professionnels incorporés qui y avaient alors accès, générant du même coup une hausse du taux effectif d’imposition. « En fait, les bénéficiaires de cette recommandation sont les PME dont le revenu imposable se situe entre 100 000 $ et 1,5 M$ ».

Pour comprendre le changement qu’implique cette proposition, Me Lacelle cite l’exemple d’une PME dont le revenu imposable serait de 100 000 $ : « Actuellement, celle-ci paie environ 6 000 $ d’impôt, mais pourrait payer 10 000 $ avec l’instauration de cette mesure. Plus le revenu imposable augmente, plus le taux descend. Ainsi, une PME ayant un revenu imposable de 500 000 $ bénéficiera d’un écart d’imposition favorable de 4 000 $. »

Allègement des taxes sur la masse salariale

Les PME seront nombreuses à saluer la baisse du taux d’imposition sur la masse salariale, qui passerait de 2,7 % à 1,6 %, si appliquée. « Encore une fois, il s’agit d’offrir à l’ensemble des PME le taux spécial de 1,6 % dont bénéficient déjà les entreprises manufacturières », note Me Lacelle.

Autre changement proposé : pénaliser les retraits de REER avant l’âge de 55 ans et inciter les travailleurs à demeurer en poste plus longtemps en optimisant la prime au travail. Le comité recommande également que l’impôt des employés plus âgés soit allégé, passant à 1 500 $ pour les 60 ans et plus et à 2 500 $ pour les 65 ans et plus.

Relève entrepreneuriale et exonération des gains en capital

« Actuellement, il est plus facile de vendre son entreprise à un tiers que de la transférer à ses enfants, explique M. Lacelle. Heureusement, le rapport Godbout propose trois pistes de solution pour faciliter le processus. »

D’abord, devant l’impossibilité de remettre en cause pour le moment l’exonération des gains en capital de 800 000 $, la première serait de permettre la vente d’une entreprise aux enfants par l’entremise d’une société afin de bénéficier de l’exonération. Toutefois, ce concept ne peut se concrétiser que s’il y a arrimage entre le fédéral et le provincial.

Seconde piste : le Québec, agissant indépendamment du gouvernement fédéral, appliquerait un crédit. « En deux mots, il s’agirait de créer un crédit d’impôt pour combler l’écart d’imposition existant entre une cession d’entreprise à un membre de la famille et la vente à un tiers », résume Me Lacelle.

Troisième et dernière piste : le rapport suggère de permettre la vente à un coût inférieur à la valeur marchande de la PME. Actuellement, la vente d’une entreprise doit se faire à la valeur marchande

En conclusion, quelles sont les chances de voir ces recommandations appliquées? À cette question, Daniel Lacelle répond par deux autres : « Le rapport Godbout est-il un tout? Sera-t-il considéré dans son intégralité ou ira-t-on y piger ce que l’on veut? »

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Yves Rivard