Vente d’entreprise ou d’une partie d’entreprise

Par Me Odile St-Hilaire | 5 mars 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Lorsqu’un client effectue une vente d’actifs ou d’entreprise, ou un simple roulement fiscal, les biens transférés peuvent être, sauf exception, assujettis à la taxe sur les produits et services (TPS) et à la taxe de vente du Québec (TVQ).

Cet aspect souvent méconnu ou négligé peut avoir de lourdes conséquences pour un acquéreur qui n’a pas les liquidités nécessaires au moment de l’acquisition de l’entreprise pour payer de telles taxes. Il voudra généralement effectuer le choix prévu au paragraphe 167 (1) de la Loi sur la taxe d’accise (LTA) et à l’article 75 de la Loi sur la taxe de vente du Québec (LTVQ) afin d’éviter ce déboursé, du moins s’il répond à toutes les conditions. En effet, les autorités fiscales permettent un choix conjoint entre celui qui transfère les biens et l’acquéreur, dans certaines circonstances, afin que de telles taxes ne soient pas payables au moment du transfert. Penchons-nous sur les règles générales d’admissibilité à ce choix.

1. RÈGLES GÉNÉRALES 

Pour être admissible au choix prévu au paragraphe 167 (1) LTA et à l’article 75 LTVQ 1, deux critères principaux doivent être respectés :

  • a. Le fournisseur (vendeur) doit vendre une entreprise ou une partie d’entreprise qu’il a établie ou exploitée, ou qu’il a acquise après qu’une autre personne l’a établie ou exploitée.
  • b. Selon la convention de vente portant sur la fourniture de l’entreprise ou la partie d’entreprise, l’acquéreur doit acquérir la propriété, la possession ou l’utilisation de la totalité, ou presque (soit 90 % ou plus), des biens qu’il est raisonnable de considérer comme nécessaires à l’exploitation par lui de l’entreprise ou d’une partie d’entreprise. On appelle ce critère « le test du 90 % ».

Odile St-Hilaire

1.1. 1er CRITÈRE : FOURNITURE D’UNE « ENTREPRISE » OU D’UNE « PARTIE D’ENTREPRISE » 

De façon générale, une « entreprise » peut être définie comme une activité qui comprend les commerces, les industries, les professions et toutes affaires quelconques. Elle s’entend d’une opération commerciale qui forme en soi une entreprise autonome. Les actifs d’une entreprise comprennent habituellement des immeubles, de l’équipement, des stocks et des biens incorporels, comme l’achalandage. L’Agence du revenu du Canada (ARC) accorde généralement une signification assez large au terme « entreprise »2.

Soulignons que la fourniture d’un ou de plusieurs éléments d’actif ne sera généralement pas considérée comme la fourniture d’une « entreprise ». En effet, la fourniture unique d’un bien (actif individuel), nonobstant sa valeur, ne sera pas suffisante à elle seule pour établir qu’il s’agit de la fourniture d’une « entreprise ».

Une « partie d’une entreprise » est elle aussi visée par le choix du paragraphe 167 (1) LTA et de l’article 75 LTVQ. Elle peut se définir comme une « unité opérationnelle distincte sur les plans fonctionnel et matériel ou une activité qui soutient l’entreprise ou qui y est liée, mais qui est organisée comme une activité distincte pouvant être autonome »3.

1.2. 2e CRITÈRE : LE TEST DU 90 %

La valeur des biens qui n’ont pas été acquis dans le cadre de la convention relative à la fourniture (convention de vente), mais qui sont nécessaires pour l’acquéreur afin d’exploiter son entreprise, ne doit habituellement pas dépasser 10 % de la juste valeur marchande (JVM) de tous les biens nécessaires à l’exploitation de l’entreprise par l’acquéreur.

Le test du 90 % doit être analysé du point de vue de l’acquéreur et non du vendeur. En effet, l’acquéreur n’a pas besoin d’acheter 90 % et plus des actifs du vendeur, mais doit plutôt être capable d’exploiter l’entreprise de ce dernier avec 90 % et plus des biens acquis.

Compte tenu de ces éléments, voici la formule que nous pouvons établir afin de calculer le test du 90 % :

Mentionnons que la partie de l’immeuble appartenant à l’acquéreur que celui-ci estime raisonnable pour l’utilisation dans l’exploitation de l’entreprise ou la valeur du bail conclu entre l’acquéreur et une tierce partie ne sont pas considérés comme des biens fournis selon la formule, mais doivent s’ajouter à la valeur des biens considérés comme étant nécessaires à l’exploitation de l’entreprise. En raison du calcul, il sera donc difficile pour un acquéreur de se qualifier au choix si l’immeuble ou le bail n’est pas fourni par le vendeur (par exemple s’il est conclu avec une tierce partie ou déjà possédé par l’acquéreur).

2. LE FORMULAIRE

En pratique, le choix s’effectue par la production du formulaire FP-2044 « Choix visant l’acquisition d’une entreprise ou d’une partie d’entreprise » (au Québec).

Ce document doit être transmis par l’acquéreur à l’ARC au plus tard le jour où il est tenu de produire sa déclaration de taxes pour la période de déclaration qui inclut l’achat. Nous ne pouvons que recommander de signer au moins trois copies « originales » du formulaire afin que le vendeur et l’acquéreur puissent en conserver chacun une pour leurs dossiers. En effet, chaque partie doit garder une copie du formulaire rempli ou de la déclaration dans ses livres et registres.


Odile St-Hilaire est notaire fiscaliste au Groupe Conscia.

Me Odile St-Hilaire