ESG : les babines ne suivent pas les bottines

Par La rédaction | 18 novembre 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Bulle de conversation constitutée de plusieurs personnes
Photo : Huhulin / 123RF

Plusieurs sondages montrent que les investisseurs montrent toujours plus d’intérêt pour l’ESG. Toutefois, une étude récente, reprise par Financial Planning, montre que s’il y a bien de l’intérêt les investisseurs préfèrent toujours suivre le rendement que leurs convictions.

L’investissement prenant en compte les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est toujours plus populaire. Gartner, une société de recherche et de conseil en technologie, assurait que 85 % des investisseurs ont au moins pris en compte les ESG lors de leurs investissements en 2020. Un sondage Kiplinger-Domini réalisé cet automne révélait que 70 % des personnes considèrent les politiques ESG d’une entreprise comme très ou assez importantes dans leurs décisions d’investissement. Ces dernières se disaient même prêtes à abandonner certains gains pour soutenir les entreprises avec un impact positif.

Même les flux montrent que les investisseurs se soucient réellement de l’utilité d’une entreprise.

Cependant, une étude récente menée par des chercheurs de l’université de l’Iowa, de l’université de Virginie et de l’université du Colorado, à Boulder, semble montrer que la réalité n’est pas aussi simple.

« [Les investisseurs] veulent avoir l’impression de faire ce qu’il faut. Ils diront : « Écoutez, je vais prendre l’investissement ESG parce que, comme tout le monde ici, j’ai une conscience sociale ». Mais lorsque vous regardez les décisions réelles du portefeuille, comme nous l’avons fait avec Robinhood, vous ne le voyez tout simplement pas », rapporte Jim Naughton, professeur associé d’administration des affaires en Virginie et un des auteurs de l’étude.

Pour cette dernière, les chercheurs ont examiné l’activité des investisseurs sur la plateforme de vente au détail Robinhood de juin 2018 à fin 2019. Ils se sont ainsi intéressés aux effets des divulgations ESG. Pour cela, ils ont examiné l’activité de négociation des actions d’une entreprise dans les trois jours suivant une publication par l’entreprise d’informations relatives à son activité ou à ses positions ESG. Si les investisseurs étaient aussi soucieux de ces facteurs qu’ils le prétendent, les transactions auraient dû augmenter lors de ces trois jours, toutefois ça n’a pas été le cas.

Ce fut même plutôt l’inverse. Les chercheurs ont constaté qu’il y avait « moins de réallocation de portefeuille et une croissance plus faible des investisseurs en réponse aux communiqués de presse ESG par rapport aux communiqués de presse non-ESG ».

Alors que les investisseurs ne réagissent pas aux communiqués ESG, ils n’hésitent pas à « apporter des changements économiquement significatifs à leurs portefeuilles en réponse aux communiqués de presse qui ne concernent pas l’ESG, en particulier ceux qui sont des annonces de bénéfices ».

Cela montre que les investisseurs sont bien plus soucieux des rendements que des facteurs ESG, contrairement à ce qu’ils affirment.

Mais l’intérêt n’en est pas moins marqué. Les conseillers le remarquent. La plupart des clients de Pamela Chen, directrice des investissements de Refresh Investment, affirment être « très intéressés » par les investissements durables et l’ESG. Mais elle aussi constate que « la plupart des clients ne sont pas prêts à renoncer à de meilleurs rendements pour l’ESG ». Elle ajoute cependant qu’« heureusement, les performances ESG s’améliorent, donc nous nous dirigeons vers une situation gagnant-gagnant ».

« Je travaille principalement avec des millénariaux qui pensent que l’investissement ESG semble intéressant, mais qui ne s’y intéressent pas nécessairement assez pour modifier leur approche d’investissement, surtout si cela peut nuire à la performance », commente à son tour Kade Hammes, propriétaire et planificateur financier chez Storybook Financial.

Elle estime toutefois qu’à force d’en parler les investisseurs seront de plus en plus intéressés à en savoir plus. Un avis que partage également Jim Naughton.

La rédaction