Le CELI n’est pas toujours mieux que le REER!

Par Alizée Calza | 24 septembre 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Voici quelques mois, nous avons publié un texte d’opinion de Jean-François Robert, représentant de courtier en épargne collective à Mérici Services financiers. Ce dernier affirmait que dans la majorité des cas, il valait mieux maximiser son CELI et non son REER. Il a affirmé dans un article récent de La Presse que « lorsqu’on n’a pas d’enfants mineurs et qu’on gagne moins de 100 000 $, en règle générale on ne gagne rien à préférer le REER au CELI ». Charles Hunter-Villeneuve, fiscaliste chez iA Groupe financier, aimerait nuancer quelque peu cette opinion.

« Je ne veux pas critiquer, et ce n’est pas que c’est faux, mais ignorer le RAP (Régime d’accession à la propriété) et le REEP (Régime d’encouragement à l’éducation permanente), c’est se tirer dans le pied, assure-t-il. Surtout avec ce qu’il se passe en ce moment concernant le prix des maisons, le RAP est devenu incontournable dans la planification d’achat d’une maison. »

En fait, selon lui, trois raisons, non mentionnées dans le texte précédent, pourraient faire que l’on privilégie le REER au CELI, selon les cas. Il s’agit:

  • Des fonds de travailleurs (FDT)
  • Du RAP et du REEP
  • Et de la grosseur de l’écart de taux d’imposition et le laps de temps entre la cotisation et le retrait.

LES FDT ET LEUR CRÉDIT D’IMPÔT 

Rappelons que deux FDT sont offerts aux Québécois, soit le Fonds de solidarité de la FTQ et le Fondaction de la CSN. Évidemment, il est possible d’investir dans ces fonds en dehors du REER, mais en l’utilisant dans le cadre d’un REER, cela permet de combiner les avantages de chacun.

« Les FDT dans les REER donnent un crédit d’impôt supplémentaire de minimum 30 % de plus! », souligne Charles Hunter-Villeneuve.

Le traitement fiscal des deux fonds est similaire : ils permettent de réclamer un crédit de 15 %, autant au fédéral qu’au provincial, jusqu’à un maximum de 5 000 $ de cotisations annuelles. Et s’ils sont dans un REER, ces crédits s’ajoutent à la déduction fiscale liée à ce dernier.

« Déjà en partant, le premier 5000 $, c’est souvent le REER qui va gagner par rapport au CELI, même pour un célibataire sans enfant qui gagne moins de 100 000 $ », constate-t-il.

LE RAP ET LE REEP 

« Dans le RAP il y a la technique de l’emprunt des 90 jours, celle-ci profite à presque tous les types de ménage », assure M. Hunter-Villeneuve.

Grâce à cela, quelqu’un d’admissible au RAP peut emprunter jusqu’à concurrence de ses droits REER et placer le montant pendant 90 jours dans son REER. En plus de profiter de l’économie d’impôt, cette astuce permet de profiter de mesures sociofiscales. Ce qui permet de bénéficier immédiatement de liquidités.

« C’est comme si on recevait à l’avance nos retours d’impôts futurs », résume M. Hunter-Villeneuve.

Ce dernier explique d’ailleurs la stratégie dans sa bande dessinée Lire et Tirelire : rendez-vous fiscal.

Certains souligneront que le RAP doit être remboursé un jour, mais ce n’est pas forcément vrai non plus. On peut profiter d’une année avec des revenus bas pour ajouter un certain montant à son revenu, car parfois il est avantageux de ne pas le rembourser.

« Je reviens toujours aux exemples de la perte d’emploi, du chômage, d’une maladie ou encore d’une année sabbatique », souligne l’expert.

« Le REEP c’est le cousin du RAP pour les études. La technique des 90 jours est possible, et les mêmes bénéfices sont générés à ce moment-là », précise-t-il.

L’ÉCART DU TAUX D’IMPOSITION 

Si Charles Hunter-Villeneuve concède que Jean-François Robert parle de l’écart du taux d’imposition dans son article, il estime qu’il ne s’appesantit pas assez sur le sujet.

« Ce qui fait la force du REER par rapport au CELI, c’est si au moment où je cotise, j’ai une déduction fiscale qui est plus élevée qu’au moment du retrait, note-t-il. Plus l’écart du taux d’imposition est grand et plus le laps de temps entre le moment de la cotisation et du retrait est court, plus fort est cet avantage. »

Le meilleur scénario serait de déduire le montant mis dans le REER à 53 % et de le retirer l’année suivante à 0 %, puisque, rappelons-le, les premiers 15 000 $ retirés d’un REER ne sont pas imposables.

Ce scénario n’est pas si improbable. Il est en effet possible qu’un client doive retirer son REER avant la retraite, notamment s’il prend une année sabbatique, qu’il est malade, qu’il perd son emploi ou qu’il décide de prendre sa retraite de façon hâtive.

« Si lors de sa première année de retraite, il décide de retirer 15 000 $ de REER et 10 000 $ de CELI pour combler son bas niveau de vie, il aura 0 d’impôt à payer », illustre-t-il.

Sans compter qu’il est possible de combiner certains des avantages cités précédemment. Pourquoi ne pas RAPer avec un fonds des travailleurs. Il devient alors possible de profiter d’une optimisation fiscale « bonifiée ».

D’autant plus que depuis quelques années, « on n’est plus obligé de sortir ses autres REER avant de pouvoir sortir ses REER d’un fonds de travailleur pour RAPer », rappelle Charles Hunter-Villeneuve.

En conclusion, au lieu de toujours privilégier la maximisation du CELI au REER, il est bon d’analyser la situation particulière du client et de déterminer quelle serait la meilleure solution pour lui en prenant en compte les avantages propres au CELI et au REER.

Alizée Calza Alizee Calza

Alizée Calza

Alizée Calza est rédactrice en chef adjointe pour Conseiller.ca et pour Finance et Investissement.