Se protéger des fluctuations

Par Vikram Barhat | 12 Décembre 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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À leurs débuts, les FNB étaient des produits peu complexes, mais, au fil des ans, des variantes exotiques sont apparues.

C’est le cas des FNB couverts contre le risque de change, qui suivent des indices boursiers ou obligataires étrangers afin de créer une protection contre les fluctuations des taux de change.

Cette couverture s’avère favorable quand le dollar canadien s’apprécie vis-à-vis de la monnaie de référence, explique John Gabriel, stratège en FNB à Morningstar.

« Parce que nous habitons un pays riche en ressources, certains pensent qu’à long terme le huard sera plus fort que le billet vert, dit-il. N’oublions pas cependant que le dollar américain profite de son statut de monnaie de réserve, malgré les nombreux problèmes budgétaires des États-Unis. »

Ainsi, si le système subit des chocs en provenance d’Europe, de Chine ou d’ailleurs, la valeur du dollar américain remontera. Logiquement, les investisseurs canadiens se tourneront alors vers les fonds libellés en dollars américains.

Même si tenter de prédire les taux de change peut être voué à l’échec, le recours aux FNB couverts contre le risque de change peut se justifier si un investisseur qui possède surtout des placements libellés en dollars américains envisage de prendre sa retraite au Canada et de payer ses factures en dollars canadiens.

« L’investisseur peut avoir un objectif précis qu’il essaie d’atteindre afin de prendre sa retraite. Une couverture pourrait l’empêcher de rater ce but après conversion d’une monnaie à l

’autre, poursuit M. Gabriel. Vous savez de combien vous avez besoin en dollars canadiens. Un investisseur dans ce cas ne pourra peut-être pas se permettre une conversion défavorable au moment de prendre sa retraite. »

L’autre avantage des FNB est leur coût : ils comportent généralement des frais moins élevés que les fonds communs équivalents couverts contre le risque de change.

Est-ce que tout finit par se régler? Les effets des fluctuations des taux de change ont tendance à s’atténuer sur de très longues périodes. Cependant, ce ne sont pas tous les investisseurs qui disposent d’autant de temps. Voilà pourquoi Guy Lalonde, conseiller en placement et gestionnaire de portefeuille à la Financière Banque Nationale, ne couvre pas toujours ses positions, même si ses clients possèdent à la fois des FNB canadiens et des FNB américains.

« Étant donné que la consommation future de nos clients s’exprimera surtout en dollars canadiens, nous préférons généralement couvrir leurs avoirs contre les fluctuations des taux de change, dit-il. D’un autre côté, nos portefeuilles sont structurés de manière à exploiter le rapport risque/rendement et les avantages de rééquilibrage que procure la combinaison de plusieurs catégories d’actifs faiblement corrélées les unes aux autres. À cet égard, nous considérons l’exposition aux taux de change comme une catégorie d’actif supplémentaire dont les propriétés de diversification maximisent le rapport risque/rendement de nos portefeuilles. »

Par comparaison, les investisseurs qui envisagent plutôt de prendre leur retraite aux États-Unis pourront éviter de se couvrir contre les fluctuations des taux de change en détenant des FNB libellés en dollars américains.

Le scénario ci-dessous, qui se fonde sur une action libellée en dollars américains, démontre comment une faible variation des taux de change peut écorner le rendement global.

Supposons que le dollar canadien soit à parité avec le dollar américain et que le S&P 500 cote à 1000 points. Un an plus tard, l’indice de référence monte de 10 % à 1100 points, et un dollar américain vaut maintenant 1,05 $ CA (+5 %). Du point de vue de l’investisseur canadien, si le placement non couvert est vendu après un an, les gains sont de 15 % – 10 % étant attribuables au gain boursier, et 5 %, aux effets de change.

À l’inverse, si, au bout d’un an, le dollar américain baisse à 0,97 $ CA (-3 %) et si le gain boursier reste de 10 %, l’investisseur obtient un rendement de seulement 7 % (gain boursier de 10 % moins effet de change de 3 %).

Lorsque les investisseurs achètent des FNB domiciliés à l’étranger, ils prennent deux décisions, précise Vikash Jain, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez archerETF Portfolio Management.

« Si vous êtes optimiste quant aux actions, vous devez certes en acheter, mais vous devez aussi vous demander s’il y a lieu d’être optimiste sur la monnaie. Si vous pensez que la monnaie [étrangère] dans laquelle le FNB est libellé va s’apprécier, mieux vaut acheter la version non couverte du fonds, et inversement. »

Dans quels cas, donc, les FNB couverts contre les risques de change ne sont-ils pas recommandés? En premier lieu, quand on investit sur les marchés émergents, selon M. Jain.

« Une des caractéristiques des marchés émergents est que leurs monnaies sont généralement sous-évaluées. C’est, entre autres, ce qui explique leur avantage concurrentiel, explique-t-il. À mesure que ces pays se développent, leur monnaie s’apprécie. Un investisseur à long terme sur les marchés émergents n’a donc pas intérêt à acheter un FNB couvert contre les risques de change. »

Il existe une autre raison pour laquelle il est préférable de se passer de couverture sur les marchés émergents. Pour les indices larges comme le MSCI Marchés émergents, il n’existe pas de façon efficace de se protéger contre les fluctuations de toutes les devises sous-jacentes. Même les FNB couverts ne le sont que contre les variations du dollar américain, souligne M. Jain.

La couverture fait augmenter le risque Qui plus est, le mécanisme qui sous-tend ces FNB peut faire augmenter le risque d’un portefeuille. Les couvertures sont souvent imparfaites, ce qui entraîne une erreur de suivi, prévient M. Gabriel.

« La plupart des fournisseurs utilisent des contrats à terme mensuels en guise de couverture, mais si le fonds connaît des rentrées ou des sorties de fonds importantes en milieu de mois, la couverture n’est alors plus de 1 pour 1, explique-t-il. Par conséquent, il se produira une erreur de suivi jusqu’à ce que le gestionnaire du FNB fixe à nouveau la couverture de change au prochain intervalle mensuel. »

L’importance de la protection que procurent les contrats de change de gré à gré dépend de la valeur de l’indice sous-jacent. Autrement dit, sur un marché volatil, le ratio de couverture peut souffrir d’une erreur de suivi importante, indique M. Lalonde.

« En octobre 2008, le rendement global du S&P a chuté de 17 % alors que le dollar américain a grimpé de 12 % par rapport au dollar canadien, rappelle-t-il. À la fin du mois, le ratio de couverture était surpondéré de 29 %. »

On peut atténuer le problème en rééquilibrant plus souvent la couverture, mais cela entraîne des coûts de gestion plus élevés.

Les investisseurs qui songent à acheter des FNB couverts contre le risque de change doivent donc s’attendre à payer des frais ou à subir une erreur de suivi d’environ 1 %, en sus du RFG.

Tout est donc question de compromis. Les investisseurs doivent peser les avantages potentiels de l’appariement des actifs et des passifs dans le processus de planification en regard des coûts supplémentaires associés à la mise en place d’une stratégie de couverture.

« Je ne recommande pas aux investisseurs d’essayer de prédire l’orientation des taux de change et d’ajuster continuellement leurs couvertures en conséquence, déclare M. Gabriel. Ce genre de comportement spéculatif peut avoir des conséquences désastreuses sur la valeur d’un portefeuille. »


Vikram Barhat est le gestionnaire de contenu du Groupe Advisor.

N’oubliez pas les avantages fiscaux

Ram Balakrishnan, ingénieur en logiciel et blogueur spécialisé en finances résidant à Ottawa, souligne que les investisseurs doivent tenir compte des retenues fiscales perdues par les FNB canadiens détenus dans des REER.

« Les FNB couverts contre le risque de change qui détiennent des actions étrangères paient une retenue fiscale qui n’est pas recouvrable par l’intermédiaire du crédit pour impôt étranger dans un REER, explique-t-il. L’effet des retenues peut être important. Le marché américain rapporte environ 2 %. Une retenue fiscale de 15 % amputera de 30 points de base le rendement d’un FNB couvert contre le risque de change qui contient des actions américaines. »

Il est donc plus avantageux de détenir des FNB négociés aux États-Unis dans un REER, car aucun impôt n’est retenu sur les dividendes, ajoute M. Balakrishnan. Dans un compte imposable, l’impôt est retenu, mais vous pouvez le récupérer au moment de produire votre déclaration de revenus.

En revanche, si vous détenez des FNB canadiens, la retenue fiscale est payée par le fonds lui-même et soustraite de votre rendement, même dans un REER. Vous ne pourrez jamais la récupérer.

 

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