« Value traps » : gare aux fausses bonnes affaires!

Par La rédaction | 27 novembre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Personnage aux yeux bandés s'apprête à tomber dans un trou dans le sol.
Photo : ojogabonitoo / 123RF

Si les actifs d’une compagnie peuvent sembler attrayants à première vue, encore faut-il que celle-ci possède une équipe de direction solide et compétente, faute de quoi la « bonne affaire » peut rapidement devenir un boulet, met en garde le gestionnaire de portefeuille Martin Pelletier.

Dans une récente chronique publiée dans le Financial Post, le directeur des placements de TriVest Wealth Counsel, une société de gestion privée et institutionnelle basée à Calgary, estime en effet que l’une des règles d’or de l’investisseur consiste à faire preuve d’une extrême prudence par rapport à toute soi-disant « aubaine ».

Cette règle vaut notamment quand on prend le contre-pied des tendances à la mode, insiste-t-il. Par exemple dans le cas des value traps, ces titres qui, après avoir chuté, sont parfois considérés par certains comme de bonnes occasions d’investissement. Or, note le gestionnaire de portefeuille, ce n’est pas le cas puisque ces actions, qui au départ paraissaient sous-évaluées, continuent le plus souvent à se déprécier.

NE PAS SE FIER AUX FAUSSES PROMESSES

Le risque d’être piégé par un tel produit commence lorsqu’un investisseur est séduit par son prix au rabais, explique Martin Pelletier. Sauf que cette situation a souvent une explication rationnelle. « Il peut y avoir des antécédents de perte de valeur, par exemple après qu’une équipe de direction a mal géré une acquisition ou mal utilisé le capital de la compagnie. Dans ce cas, il est probable qu’elle continuera à prendre de mauvaises décisions, ce qui fera encore baisser le cours de l’action et risque de leurrer une personne sans méfiance », détaille le gestionnaire.

Le problème, souligne-t-il, c’est qu’une fois mis son doigt dans l’engrenage, un investisseur risque d’être tenté de croire aux promesses de la direction, qui lui assurera que « les choses iront mieux par la suite », plutôt que de réaliser immédiatement qu’il a pris une mauvaise décision et encaissé une perte. L’autre problème, ajoute le gestionnaire, c’est que ce phénomène ne concerne pas les seuls investisseurs inexpérimentés mais de nombreux professionnels, même si ces derniers sont mieux outillés pour déceler un problème et sortir du piège dans lequel ils sont tombés avant que les dégâts ne soient trop importants.

Heureusement, poursuit Martin Pelletier, M. et Mme Tout-le-Monde ont eux aussi les moyens de déterminer si l’investissement qui leur est proposé constitue une affaire douteuse, voire mauvaise. C’est par exemple le cas si le marché réagit mal à une information négative sur l’entreprise parue dans la presse alors que sa direction refuse de reconnaître qu’il y a un problème. « Adopter un discours du genre “le marché se trompe, c’est nous qui avons raison” est mauvais signe. Une équipe de direction avisée reconnaîtra rapidement ses erreurs et prendra très vite les mesures qui s’imposent pour y remédier », affirme le gestionnaire.

MAUVAIS ANTÉCÉDENTS DE GESTION

Celui-ci indique qu’il faut également se montrer attentif à la stratégie poursuivie par l’entreprise dans laquelle on pense investir, spécialement après une acquisition. « Si la transaction a été trop volumineuse par rapport à sa structure et à son capital, cela peut perturber ses activités. (…) Le cours de son action risque de chuter pendant la période de mise en œuvre de la fusion, et la société n’a alors guère d’autre solution que d’adopter des mesures qui réduiront encore davantage la valeur qu’elle représente pour les actionnaires. » Au contraire, poursuit Martin Pelletier, une bonne équipe de direction connaîtra les limites de sa compagnie et cédera souvent les contrats les plus importants à des acquisitions complémentaires, ce qui permettra à la société de dégager une plus grande valeur ajoutée.

De même, si la direction de la compagnie a toujours pris de mauvaises décisions en matière de répartition du capital, mieux vaut rester à l’écart, conseille Martin Pelletier. « Imaginez que vous leur donniez votre argent pour investir directement dans leurs opérations. Dans ce cas, vous voudriez certainement d’abord leur demander ce qu’ils ont fait avec celui des investisseurs précédents. Il ne faut jamais perdre de vue que même si le titre d’une société semble attrayant, une mauvaise équipe de direction peut rapidement transformer un bon actif en un mauvais. »

Le gestionnaire de portefeuille suggère en outre d’examiner la rémunération totale des membres de la haute direction, puis de la comparer avec la performance de l’entreprise. « En l’absence de corrélation entre les deux, on peut craindre qu’ils ne soient tentés de prendre des risques supplémentaires, puisque ce n’est pas leur capital qui est en jeu mais celui des investisseurs. Enfin, un roulement élevé au sein des instances dirigeantes ou le départ de membres clés de l’équipe de direction, comme le directeur des opérations ou le directeur financier, constitue un autre signe certain qu’il y a un problème.

La rédaction