Formation continue : du ménage à faire

Par Christine Bouthillier | 21 novembre 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Afin de rester à jour et offrir à leurs clients le meilleur des services, les conseillers doivent obligatoirement s’inscrire à des activités de formation continue. Chaque cours suivi leur permet d’obtenir des unités de formation continue (UFC). Ils doivent en avoir accumulé 30 (ou 40 pour les planificateurs financiers) sur deux ans, faute de quoi leur certificat sera suspendu.

Pour remplir ces exigences, les conseillers ont beaucoup d’options : une panoplie de cours en classe et en ligne leur est accessible. Cependant, ce n’est pas pour rien que l’offre de formation continue dans le secteur des services financiers est foisonnante. Il y a de l’argent à faire. Et l’appât du gain peut parfois mener à des dérives.

Du bon… et du moins bon

Je constate en effet qu’il y a un certain ménage à faire dans les activités de formation continue proposées aux conseillers.

Évidemment, celles-ci sont nécessaires pour que les représentants soient en mesure de bien faire leur travail. Et une grande part de l’offre actuellement disponible livre du contenu de qualité, permettant d’amener les professionnels plus loin.

Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. Certains tournent les coins ronds. J’ai déjà assisté à une formation en classe pour me rendre compte par la suite, en faisant des recherches, que celle-ci était truffée de faussetés. Je ne suis pas sûre que tous les professionnels présents dans la salle ont effectué ces mêmes vérifications.

J’ai avisé l’organisme qui donnait la formation de la situation, mais le conférencier n’a pas été retiré de sa programmation avant au moins un an. À ma connaissance, cette personne ne livre toutefois plus de présentations dans l’industrie, du moins pour le moment.

D’autres formateurs ont même la réputation d’offrir des UFC en échange d’une rétribution, comme on peut le lire dans le dossier spécial de mon collègue Didier Bert en cliquant ici.

Et que dire de la multiplication des formations gratuites en ligne permettant d’obtenir des UFC en quelques clics? Bien sûr, certaines d’entre elles restent pertinentes, mais le contenu est parfois très (trop?) léger. Un petit test à passer à la fin et hop, des UFC! Un conseiller cherchant à réduire ses dépenses pourrait très bien les accumuler pour obtenir ses 30 UFC sans jamais se lancer dans des apprentissages en profondeur.

Pécher par paresse

Reste qu’il n’y a pas que les formateurs à blâmer pour l’offre de cours moins longs et plus faciles. Ils ne font peut-être que répondre à un vilain penchant de l’humain : la paresse.

Des conseillers pourraient être tentés de céder à la facilité et d’obtenir des UFC rapidement et sans effort par paresse, justement, ou par manque de temps, diront certains. Quoiqu’il en soit, leur bagage de connaissances en souffrira et, conséquemment, leurs clients aussi.

Combien de fois ai-je vu dans des formations en classe des représentants signaler leur présence au début de l’activité pour ensuite filer en douce et ne revenir qu’à la fin? Il en va aussi de la responsabilité de chaque conseiller de s’instruire adéquatement. Le formateur ne devrait pas avoir à jouer à la police.

Des réponses

Pour s’assurer de la qualité des cours offerts, la Chambre de la sécurité financière (CSF) effectue des audits et des vérifications surprises, ou à la suite de plaintes. De son côté, l’Institut québécois de planification financière fait remplir un questionnaire aux participants. Des accréditations ont déjà été retirées et on a parfois demandé à des formateurs de modifier le contenu de leur cours.

Cela semble fonctionner, car le taux de satisfaction quant aux activités de formation continue s’élève à 88,5 %, soutient la Chambre. Toutefois, le plus récent rapport d’inspection de la CSF réalisé par l’Autorité des marchés financiers (janvier 2019) montre certaines lacunes. Par exemple, les critères servant à exclure des formations reliées à la promotion d’un produit ne sont pas toujours suffisants et la CSF délègue aux fournisseurs la responsabilité de s’assurer de la qualité des formateurs, peut-on y lire.

Faudrait-il aller plus loin? Je comprends que les ressources peuvent être limitées et que l’on doive surveiller un large marché. Mais comme dans tout système, il y a toujours place à amélioration. Un resserrement des normes et des vérifications, même si celles existantes ont une certaine efficacité, pourrait aider à régler les cas problèmes qui demeurent.

Christine Bouthillier est directrice principale de contenu à Conseiller.


• Ce texte est paru dans l’édition de novembre-décembre 2019 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Christine Bouthillier

Titulaire d’un baccalauréat en science politique et d’une maîtrise en communication de l’Université du Québec à Montréal, Christine Bouthillier est journaliste depuis 2007. Elle a débuté sa carrière dans différents hebdomadaires de la Montérégie comme journaliste, puis comme rédactrice en chef. Elle a ensuite fait le saut du côté des quotidiens. Elle a ainsi été journaliste au Journal de Montréal et directrice adjointe à l’information du journal 24 Heures. Elle travaille à Conseiller depuis 2014. Elle y est entrée comme rédactrice en chef adjointe au web, puis est devenue directrice principale de contenu de la marque (web et papier) en 2017, poste qu’elle occupe encore aujourd’hui.