Impôt des conseillers : un outil pour vous simplifier la vie

Par Bernard Viau | 8 février 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
8 minutes de lecture
Quelqu'un qui remplit sa déclaration de revenus.
Photo : lfexe / iStock

Lorsque j’étais conseiller et que février se terminait, je sentais un poids s’abattre sur mes épaules : c’était le moment de préparer ma déclaration d’impôt. Heureusement, notre métier nous amène à savoir comment minimiser notre facture fiscale et, comme travailleurs autonomes, plusieurs dépenses sont déductibles de nos revenus[1].

Conseiller a publié en 2016, puis en 2019, un outil destiné à faciliter le calcul de votre impôt. Voici la mise à jour de 2020. L’imposition des mesures financières liées à la COVID-19 entraîne des changements importants dans la déclaration d’impôt de cette année. Vous devez les connaître pour vos clients[2].

UNE SITUATION QUI PERDURE

Nombre de conseillers estiment payer trop d’impôt et c’est parfois vrai. Des confrères persistent même à placer leurs factures dans une grande enveloppe qui sera remise au comptable. Quelle mauvaise habitude ! D’autant qu’au cours d’une carrière, un conseiller est susceptible d’être inspecté par le fisc à deux reprises, selon moi. Si vos relevés de dépenses sont mal tenus, une mauvaise surprise vous attend.

RAPPEL FISCAL

Le véhicule représente probablement votre plus grosse dépense déductible. La somme à déduire de vos revenus est calculée en fonction des kilomètres parcourus dans le cadre du travail. Les frais courants comme la location mensuelle (s’il y a lieu), l’essence, les réparations, les frais de stationnement, l’adhésion à CAA, l’assurance, le permis de conduire et les frais d’immatriculation peuvent être déduits entre 60 et 80 %. Un registre détaillé, comme un fichier Excel a donc son utilité.

Télécharger Sommaire des dépenses professionnelles 2020 

Chaque semaine, 15 minutes sont suffisantes pour noter le kilométrage parcouru (personnel et pour le travail) et inscrire les sommes dépensées et le kilométrage quotidien dans le fichier Excel. Classez et collez à mesure vos reçus aux pages d’un dossier « impôt de l’année », et conservez les factures déductibles dans une enveloppe.

Le 31 décembre, soustrayez le nombre de kilomètres inscrit sur votre odomètre du kilométrage inscrit l’année précédente afin d’obtenir le kilométrage total de l’année. Photocopiez également les pages où sont collés vos reçus de dépenses. L’encre des caisses enregistreuses disparait en quelques mois, un problème en cas de vérification fiscale. Une carte de crédit dédiée aux seules dépenses professionnelles est une bonne pratique.

Autres dépenses déductibles à 100 % :

  • frais de papeterie,
  • téléphone cellulaire,
  • publicité,
  • abonnement à des revues financières,
  • cotisations et permis professionnels,
  • frais de poste,
  • formations avec UFC,
  • intérêts sur emprunts pour l’achat de clientèle,
  • frais de bureau,
  • frais d’amortissement,
  • sans oublier l’assurance responsabilité auprès de votre employeur.

Le fichier Excel fournit un aide-mémoire exhaustif.

Le salaire versé pour un assistant peut également être déduit à 100 %, à condition qu’il conserve un statut de travailleur autonome et ne soit pas considéré comme un employé. Un conjoint ou votre enfant majeur sans emploi pourrait être engagé comme assistant. Ce salaire permettra de réduire l’impôt de la famille.

Autre dépense à ne pas oublier : les frais de représentation. Les frais d’hébergement et de restauration liés à une rencontre client, incluant le pourboire, sont déductibles du revenu à hauteur de 50 %. Documentez méticuleusement ces dépenses, car les déductions pour frais de représentation attirent l’attention de l’Agence du Revenu du Canada (ARC) lors des vérifications.[3] Mon conseil : oubliez les déductions d’alcool.

Confiez la préparation de vos déclarations de revenus à un comptable professionnel. Bien que cela coûte plus cher, la probabilité d’une vérification du fisc pourrait être moindre. Votre fichier Excel sauvera du temps à votre comptable et fera diminuer vos frais.

VOS PLACEMENTS

La façon d’organiser vos placements devrait aussi vous permettre de tirer le meilleur parti de la Loi sur les impôts.

Seuls les placements non enregistrés donnent droit à la déduction pour une perte en capital. Vos comptes non enregistrés doivent donc regrouper vos placements les plus risqués pour pouvoir déduire d’éventuelles pertes en capital.

Selon la Foreign Account Tax Compliance Act, la FATCA, les dividendes américains sont imposés directement aux États-Unis, à l’exception de ceux réalisés dans les comptes enregistrés de retraite. Vos investissements en dollars américains devraient donc se retrouver dans votre REER, ou éventuellement dans votre FERR.

Le fiduciaire de ces placements vous enverra des feuillets d’impôt pour les dividendes et intérêts perçus dans ces comptes. Il suffit d’en rapporter les montants à votre déclaration de revenus.

La détention d’un titre américain dans un compte de placements non enregistré canadien obligera votre comptable à calculer le taux de change et l’imposition américaine à la source, ce qui pourrait faire gonfler sa facture.

GAIN EN CAPITAL DANS LES COMPTES NON ENREGISTRÉS

Il existe deux types de gain en capital avec un fonds d’investissement : celui réalisé par le gestionnaire du fonds de placement dans ses opérations quotidiennes, sur lequel vous n’avez aucun contrôle, et celui que vous pouvez réaliser en vendant vos titres. Sur les gains que le gestionnaire du fonds réalise, vous recevrez un feuillet d’impôt et vous aurez à déclarer un gain, ou une perte, en capital sur ce placement sans l’avoir vendu vous-même.

La feuille « Gain_perte » du fichier Excel vous permettra de calculer le deuxième gain en capital.

Concernant les achats périodiques de parts de fonds, une feuille Excel vous permettra de calculer un coût moyen d’acquisition pour vos impôts. Inscrivez le montant dans la feuille « Gain_perte ».

Imprimez ensuite la feuille « Gain_perte » du fichier Excel et reportez les totaux à l’annexe 3 de votre déclaration de revenus. Il est requis de conserver la liste détaillée de vos gains et pertes en capital réalisés annuellement, mais seulement pour vos comptes d’investissements non enregistrés.

Attention : si vous, ou votre client, effectuez de nombreuses transactions financières, vous pourriez être considéré comme un courtier professionnel et perdre l’imposition privilégiée des gains en capital. Les conseillers en valeurs mobilières, en options et en commodités, sont particulièrement visés par cette mesure et surveillés par le fisc.

IMPLICATIONS FISCALES DE LA PANDÉMIE

La pandémie mondiale a touché l’ensemble des pays et des professions. Vous connaissez probablement certaines mesures instaurées par les gouvernements fédéral et provincial en 2020. Trois programmes d’aide financière peuvent toutefois vous concerner davantage en 2020 et en 2021 :

  • Prestation canadienne d’urgence (PCU) : si vous êtes, fiscalement, un employé d’une institution financière.
  • Prestation canadienne de la relance économique (PCRE) : si vous êtes, fiscalement, un travailleur autonome.
  • Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC)[4]: si vous êtes un conseiller senior avec des assistants à son cabinet.

La PCU peut concerner les conseillers à salaire, qui par exemple travaillent dans une banque ou en assurance générale et qui auraient perdu leur emploi temporairement à cause de la COVID-19, mais qui ne peuvent pas réclamer le chômage.

Techniquement, les conseillers dont le salaire consiste en des avances sur commissions déduites d’un fond d’établissement où s’accumulent les commissions à mesure qu’elles sont générées sont des travailleurs autonomes, pas des employés. Le mot « salaire » est un leurre pour les conseillers qui débutent. Consultez votre département de comptabilité pour une confirmation.

La PCRE peut concerner les conseillers qui sont des travailleurs autonomes à commission, qui n’ont pas droit au chômage et dont le confinement a réduit les revenus de commissions. Deux conditions permettent l’admissibilité : avoir subi une diminution de 50 % de ses revenus à cause de la COVID-19 et un revenu annuel maximal de 38 000 $. Au-delà, le fisc vous demandera de rembourser 50 sous pour chaque dollar de prestation.

La SSUC s’adresse aux conseillers qui, en tant qu’entrepreneurs, engagent des assistants, car la subvention sert à couvrir partiellement leur salaire. La demande requiert plusieurs calculs : taux de base, taux compensatoire, taux de la subvention globale, et ce pour tous les mois. Je suggère de contacter un comptable pour cette demande.

Les dépenses liées au télétravail sont dorénavant déductibles. Selon un ancien collègue, entre 70% et 80% des conseillers travaillent maintenant à domicile et ont recourt à la vidéo-conférence. Pour cette année et l’an prochain, des dépenses liées à votre travail à la maison[5] peuvent donc figurer à votre déclaration de revenus, en lien avec le pourcentage d’utilisation professionnelle de la résidence[6].  Référez-vous à la nouvelle feuille Excel intitulée « Résidence ».

ZONE GRISE

Pour certains conseillers, il peut être difficile d’évaluer la perte de revenus liée à la pandémie.  Un conseiller reçoit deux types de revenus : des commissions mensuelles de service récurrentes découlant du travail des années passées, et des commissions provenant de nouveaux contrats.

Seuls les revenus de ces dernières commissions ont été affectés par le confinement. Votre revenu brut est la somme de ces deux montants, mais pas nécessairement le montant de vos revenus déclarés. La loi n’est pas claire concernant ces deux sources de commissions.

Plusieurs conseillers choisissent de retirer chaque semaine seulement un montant fixe de leur fonds de capitalisation pour conserver des réserves. Si vous demandez des prestations liées à la COVID-19, gardez cela en tête.

CHIFFRIER : MISE AU POINT ET INSTRUCTIONS

La version 2020-2021 du chiffrier n’est pas un logiciel de comptabilité ni un programme pour la déclaration de revenus. C’est un outil destiné à noter vos dépenses. Confiez à votre comptable le calcul des détails fiscaux comme les frais d’intérêts, les déductions d’amortissement, la TPS/TVQ, vos cotisations d’assurances collectives au bureau, les sociétés en commandite et autres abris fiscaux plus exotiques.

Avant de l’utiliser, faites une copie du fichier Excel, l’original pour 2020 et la copie pour vos dépenses de l’an prochain. Il n’y a qu’une seule cellule à changer pour tout mettre à jour, la cellule {Kilométrage}: B2. Les cellules en bleu contiennent des formules qu’il ne faut pas modifier.

Débutez l’entrée de données par la dépense la plus importante : votre voiture. Les totaux de toutes vos dépenses des différentes feuilles vont se rapporter automatiquement sur la première feuille lorsque vous entrez vos informations dans les cellules en blanc.

À titre d’exemple, j’ai inscrit des données fictives dans les cellules des premiers jours de janvier à chacune des pages et des feuilles. Pour entrer vos propres informations, vous n’aurez qu’à effacer le contenu de ces cases.

Bernard Viau est un conseiller à la retraite.

[1] Étudiez l’incontournable Planiguide fiscal 2020  de Raymond Chabot Grant Thornton, le chapitre sur les dépenses reliées à un emploi  et aussi la nouvelle publication spéciale de l’ARC, Dépenses d’emploi 2020, section les employés à commission  émise suite à la pandémie de Covid.

[2] J’ai choisi quatre pages web qui répondront à toutes vos questions sur le sujet.  De la firme Intuit Turbo Impôt, du groupe Raymond Chabot,  du site d’Info Entrepreneurs et enfin celui de Revenu Québec pour les mesures financières liées à la pandémie.

[3] Le père de mon premier amour d’adolescent était un vérificateur fiscal passionné. Une publication plus récente? Visitez la page de Turbo-Impôt Intuit Conseils pour éviter une vérification d’impôt.

[4] Cette page de Raymond Chabot Grant Thompton explique le fonctionnement de la SSUC

[5] Le télétravail selon Raymond Chabot Grant Thompton

[6] Consultez le site de l’ARC

Bernard Viau