Les cinq principaux risques qui menacent le revenu de retraite, deuxième partie

Par Peter Drake | 19 août 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Tout le monde s’entend pour dire qu’en matière de planification du revenu de retraite, il vaut mieux prévenir que guérir et qu’il est important de planifier autant que possible en fonction des imprévus. Nous raisonnons de la même façon lorsque nous bouclons notre ceinture en voiture. Dans ma chronique du mois dernier, j’ai traité des deux principaux risques qui menacent le revenu de retraite et que vos clients ne peuvent maîtriser. Ce mois-ci, j’explorerai, à l’inverse, les trois principaux risques qu’ils sont en mesure de gérer, avec votre aide.

Si vous avez manqué la chronique précédente, sachez que Fidelity Investments a fait état des cinq principaux risques menaçant les revenus de retraite pour la première fois en 2005. Les risques relevés étaient la longévité, l’inflation, la répartition de l’actif, le taux de retrait et les frais de soins de santé non couverts. Depuis la publication de ce premier rapport, toutefois, la situation a beaucoup évolué, notamment en raison de la crise financière mondiale et de la récession qui a suivi, de la reprise économique et de la volatilité qui continue de régner sur les marchés. Nous avons cru bon de réexaminer les cinq principaux risques à la lumière des événements des dernières années pour confirmer la validité de notre analyse. Vous trouverez notre deuxième rapport intitulé Après la crise financière mondiale : les cinq principaux risques qui menacent les revenus de retraite sur notre site web.

Le mois dernier, nous avons conclu que non seulement la longévité et l’inflation demeurent des facteurs cruciaux, mais que le risque qu’elles représentent est peut-être plus élevé qu’avant la crise, particulièrement en ce qui concerne l’inflation. Voici les conclusions tirées de notre réexamen des risques liés à la répartition de l’actif, au taux de retrait et aux frais de soins de santé non couverts.

Peter Drake

Répartition de l’actif Lorsque vous abordez la question de la répartition de l’actif, il s’agit non pas de déterminer si une telle répartition est essentielle à la réussite financière de votre client (elle l’est toujours), mais bien de choisir la stratégie à adopter. Rares sont ceux qui nient que des changements tactiques ou à court terme dans la répartition des actifs peuvent être valables. Les gestionnaires de portefeuille de Fidelity effectuent régulièrement de tels ajustements pour profiter d’occasions qui se présentent sur divers marchés. En revanche, il en est tout autrement des changements stratégiques ou à long terme. À mon avis, une bonne répartition de l’actif doit d’abord reposer sur les caractéristiques fondamentales du client, tout particulièrement sa tolérance au risque et son horizon de retraite. Règle générale, les changements apportés à la stratégie de répartition de l’actif doivent être fondés uniquement sur des variables stratégiques comme l’âge du client, sa situation d’emploi ou ses objectifs de placement.

Une bonne répartition de l’actif aide les clients à composer avec les risques, la volatilité du marché et les liquidités. De nombreux investisseurs comprennent l’importance de ces trois éléments; c’est pourquoi la plupart des portefeuilles combinent actions, titres à revenu fixe et liquidités. Avant la crise financière mondiale, une perception prévalait, du moins chez certains investisseurs, selon laquelle le risque était quasi inexistant et pouvait être ignoré. Dans certains cas, les investisseurs qui jugeaient le risque faible détenaient des portefeuilles dont la répartition ne correspondait ni à leurs objectifs ni à leur situation. Cette perception a rapidement changé pendant la crise. De nombreux investisseurs ont modifié la répartition de leur actif durant la crise, se repliant sur les placements liquides, plus sûrs. Résultat : un portefeuille beaucoup trop prudent pour les investisseurs qui nécessitent une certaine croissance afin d’atteindre leurs objectifs de revenu de retraite.

Toutes ces observations donnent à penser que la répartition de l’actif demeure l’un des principaux risques menaçant le revenu de retraite. Elles suggèrent également que le risque s’est accru depuis la crise financière, certains clients ayant réagi de manière exagérée aux événements, de telle façon que leur portefeuille ne reflète plus leurs objectifs.

Taux de retrait Des cinq principaux risques, ce sont les taux de retrait qui ont le plus souffert de la crise et de ses répercussions. Dans ce cas, le problème est simple, mais la solution est malheureusement loin de l’être. Les recherches de Fidelity indiquent qu’un taux de retrait annuel dépassant 4 ou 5 % de la valeur initiale du portefeuille, indexé annuellement en fonction de l’inflation, augmente le risque que l’investisseur épuise ses fonds de son vivant. Les clients qui ont augmenté leur taux de retrait durant la crise pour compenser la diminution de valeur de leur portefeuille (et donc la diminution du montant des retraits mensuels) font maintenant face à une nouvelle difficulté, particulièrement s’ils ont ajusté leur portefeuille de manière à répartir leur actif avec une plus grande prudence. Leur bas de laine a diminué de beaucoup et ils n’ont pas pu participer à la reprise des marchés après la chute des valeurs boursières.

Comment les clients devraient-ils aborder une telle situation? Deux voies s’ouvrent à eux. La première consiste à épargner et à investir des sommes suffisantes pour se constituer un revenu adéquat avec un taux de retrait de 4 % au début de la retraite, selon la valeur projetée du portefeuille. De cette façon, si la valeur du portefeuille chutait juste avant la retraite, le client pourrait s’en tenir au taux de quatre pour cent tout en parvenant à boucler son budget. La deuxième stratégie consiste à se « serrer la ceinture » dans les premières années de la retraite, là où il importe le plus de limiter les retraits annuels. Une telle approche exige probablement de réduire les dépenses en début de retraite par rapport à la planification initiale, ou encore d’aller chercher un revenu d’emploi pour compenser la diminution des revenus provenant du portefeuille. Au fil de leur retraite, les clients verront leur horizon de planification se resserrer et pourront alors réévaluer leur taux de retrait annuel.

Tout cela confirme que le taux de retrait constitue toujours un risque en matière de revenu de retraite. En fait, même si le Chicago Board Options Exchange Volatility Index (VIX) ne le laisse pas présager à l’heure actuelle, nombre d’entre nous percevons tout de même une certaine volatilité des marchés, ce qui porte à croire que le risque que pose le taux de retrait est plus élevé qu’avant la crise.

Frais de soins de santé non couverts Les dépenses en soins de santé posent un problème particulier parce qu’elles sont en grande partie imprévisibles. En contrepartie, et c’est là toute la beauté du système de santé public canadien, les coûts pris en charge par vos clients sont prévisibles et, pour la plupart d’entre eux, négligeables. D’autres caractéristiques des dépenses directes liées aux soins de santé méritent toutefois d’être soulignées. Pour les mettre en contexte, mentionnons que la prise en charge des dépenses de santé se répartit entre les secteurs public et privé dans une proportion d’environ 70/30 depuis maintenant plusieurs décennies, et que malgré certains signes laissant entrevoir à l’avenir un financement accru provenant du secteur privé, aucun virage majeur ne semble imminent. Il faut garder à l’esprit que ce ne sont pas toutes les dépenses de santé relevant du secteur privé qui sont déboursées directement par le patient, certains coûts étant assumés par les régimes d’assurance privés. Autre élément dont il faut tenir compte, les coûts des soins de santé financés par le secteur privé ont connu une hausse annuelle de 3,1 à 3,3 % au cours des 10 dernières années, contre 1,9 % pour l’indice des prix à la consommation. La différence peut sembler minime, mais au cours d’une retraite de 25 ans, elle peut prendre une importance bien réelle. Par exemple, au taux de croissance annuel composé de 3,2 %, une somme de 1000 $ en frais de soins de santé non couverts déboursée par le client au cours de sa première année de retraite équivaut à plus de 2 500 $ à sa 25e année.

Pour en revenir à l’imprévisibilité des dépenses de santé non couvertes, la vraie question n’est pas de savoir si vos clients y seront confrontés, mais bien d’estimer à combien elles se chiffreront. À ce chapitre, l’éventail des possibilités est très large. La solution la plus simple, bien sûr, est l’assurance, mais les clients n’auront pas tous une assurance couvrant tous les risques éventuels. Que faire, dans ce cas? Une des approches possibles consiste à veiller à ce que le portefeuille du client compte assez de liquidités pour pouvoir débourser, au besoin, plusieurs milliers de dollars en frais de soins de santé non couverts. De plus, pour les clients qui ne disposent pas de beaucoup de liquidités en cas d’imprévus, l’idéal consiste à déterminer d’avance quelles dépenses pourraient être éliminées de façon temporaire ou permanente pour compenser les coûts liés à un problème de nature médicale.

Les frais de soins de santé non couverts font donc toujours partie des principaux risques qui menacent le revenu de retraite. Rien ne prouve clairement que la crise financière à elle seule ait augmenté ce risque, mais chose certaine, il devient de plus en plus important, simplement en raison du vieillissement de la population, conjugué aux dépenses de santé qui tendent à augmenter rapidement au cours des dernières années de la vie.

Les trois risques en contexte Il est possible pour vos clients de mettre en place des mesures permettant de maîtriser les trois risques que nous venons de présenter. Comme c’est le cas en voiture, il est parfois impossible d’éviter un accident, mais on peut se protéger en adoptant de bonnes mesures de sécurité, par exemple boucler sa ceinture.

Je suis convaincu que la récente crise financière mondiale et la récession qui l’a suivie ont causé du tort non seulement financièrement, mais également émotionnellement. Cela vaut particulièrement pour les Canadiens qui, à l’époque, approchaient de la retraite ou étaient déjà retraités. Les recherches de Fidelity permettent de conclure que dans l’ensemble, les risques qui menacent le revenu de retraite n’ont pas changé. Avec un peu de chance, toutefois, les investisseurs canadiens auront compris toute l’importance de procéder à une évaluation plus approfondie du risque individuel et d’établir un plan de revenu de retraite écrit qui englobe des stratégies pour atténuer les effets des cinq principaux risques décrits dans la présente série d’articles.

Peter Drake est vice-président, Retraite et recherches économiques, Fidelity Investments Canada. Fort de plus de 35 années d’expérience à titre d’économiste, il dirige les initiatives de recherche de Fidelity axées sur la retraite au Canada à notre époque.

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