Qui paiera le prix du grand ménage?

Par Daniel Guillemette | 30 juin 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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pogonici / 123RF

Depuis quelques années, nous assistons à un mouvement irréversible de désir de transparence dans l’industrie des services financiers à travers le monde entier. Tout cela se passe bien au-dessus de la tête du conseiller qui continue d’exercer sa profession comme il l’a toujours fait jusqu’à présent.

Jour après jour, les régulateurs resserrent l’étau autour des acteurs des marchés financiers pour les pousser à agir de manière transparente et avec un plus grand respect envers le public investisseur. En assistant à l’addition incessante de nouvelles mesures de contrôle, certains pourraient conclure que la société québécoise a donné beaucoup trop de pouvoir à un seul homme, qui semble s’être donné le mandat de faire le grand ménage dans notre industrie.

Pour ma part, quand il n’y a pas de poussière sur le plancher, je ne passe pas le balai. L’industrie des services financiers a-t-elle laissé la poussière s’accumuler au cours des 100 dernières années? Si oui, elle est donc responsable des bouleversements que nous observons.

À QUI LA FAUTE?

Mais de qui parle-t-on ici? Il y a les banques, les sociétés de fonds d’investissement, les compagnies d’assurance, les agents généraux et au bout de la chaîne, les conseillers. Nous pourrions aujourd’hui nous demander quelle est leur part respective de responsabilité dans l’accumulation de frustrations de la part des consommateurs en ce qui a trait à la transparence.

À l’origine, les banques ont été créées précisément pour permettre le blanchiment d’argent. Les fortunes des plus grands bandits de la planète ont été cachées dans les banques suisses, bien à l’abri des enquêteurs. Leur fameux secret bancaire… Il vient encore d’être invoqué récemment par la CIBC dans sa partie de bras de fer injustifiée avec la CSF, que cette dernière a heureusement gagnée devant les tribunaux après avoir dépensé des sommes faramineuses en frais juridiques, prélevées à même les cotisations versées à la CSF par l’ensemble des conseillers de la province de Québec. Quelle honte!

Viennent ensuite les sociétés de fonds d’investissement et les compagnies d’assurance qui, historiquement, n’ont pas toujours été particulièrement soucieuses de divulguer toute l’information pertinente à une prise de décision éclairée en ce qui concerne les produits qu’elles ont lancés sur le marché.

Que dire des agents généraux qui, malgré le fait qu’ils ne soient aucunement encadrés par quelque réglementation que ce soit, auraient dû, à mon opinion, s’autodiscipliner depuis longtemps? Certains d’entre eux ont trop longtemps laissé passer des ventes en fermant les yeux sur des stratagèmes frauduleux que même un astronaute myope aurait pu voir à travers le hublot de sa navette spatiale à des milliers de kilomètres de la Terre.

ET LE CONSEILLER DANS TOUT ÇA?

Finalement, que devrions-nous penser de ces conseillers qui, pour faire une vente nécessaire au paiement de leur épicerie de la semaine, sont prêts à faire signer n’importe quoi à n’importe qui, sur n’importe quelle base et sans analyse!

À mon humble avis, devant tous ces faits, l’industrie des services financiers en entier a amplement mérité de se faire savonner la langue par l’opinion publique et par les organismes de réglementation.

Qui paiera le prix du grand ménage maintenant?

Logiquement, ça devrait être le plus faible, celui qui n’a pas la capacité de s’adapter aux conditions changeantes. Sur cette base de raisonnement, c’est le conseiller indépendant qui est appelé à disparaître.

Il ne faudrait cependant pas sous-estimer la puissance du regroupement. Depuis l’an dernier, les conseillers se sont donné, grâce à la Chambre de la sécurité financière, une association (le Conseil des professionnels en services financiers ou CDPSF) dont la mission est de les aider à s’adapter plus rapidement à leur environnement, qui change à un rythme effréné.

Ils n’ont pas besoin d’une association qui vise à les protéger contre des ennemis venant de l’extérieur. Leurs plus grands ennemis sont depuis toujours dans leurs propres rangs, et je soupçonne qu’il en traîne encore quelques-uns qui, je l’espère, disparaîtront au plus tôt.

Aujourd’hui plus que jamais, les conseillers ont besoin d’augmenter leur agilité, leur capacité à réagir de manière instantanée à une série de facteurs totalement hors de leur contrôle.

L’époque de la compétition est révolue. Leur survie réside désormais dans leur capacité à collaborer entre eux.

Les conseillers seront-ils à la hauteur et pourront-ils survivre à ce raz-de-marée?

Seul l’avenir nous le dira.

Daniel Guillemette

Daniel Guillemette est conseiller en sécurité financière depuis 1984. Il a terminé ses études en fiscalité à l’Université de Sherbrooke en 2000. Il dirige plusieurs cabinets de services financiers qu’il a acquis au fil du temps, la première acquisition datant de 1996. En 2008, inspiré de ses propres besoins, il a commencé à s’investir dans le projet iGeny, une entreprise visant à augmenter son agilité, sa capacité à s’adapter aux conditions changeantes. iGeny commercialise aujourd’hui iGeny Form, iGeny Pro, ScanSquad et offre également aux conseillers un service d’adjointes virtuelles.