Faire échec aux émotions à l’aide d’une stratégie de répartition d’actifs

4 avril 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les investisseurs qui gèrent leurs portefeuilles en suivant le rythme de leurs émotions peuvent réussir des coups fumants tout comme ils peuvent détruire leur capital en un tournemain. Bien que cet état de fait soit connu depuis des lustres, le gestionnaire Matthew Beckerleg, du cabinet Pembroke Management, dit que cette question mérite qu’on s’y arrête de nouveau.

En entrevue à Advisor.ca, Matthew Beckerleg dit que tous les intervenants de monde du placement finissent par succomber, un jour ou l’autre, à leurs émotions. Ils prennent alors des décisions irréfléchies. « Cela arrive non seulement aux épargnants, mais aussi aux investisseurs institutionnels et professionnels. Dans certaines circonstances, tous réagissent de la même façon, à quelques exceptions près », dit-il.

Le scénario classique est de vendre en panique lorsque les cours chutent, et d’acheter avec frénésie lorsque les marchés s’enflamment. Matthew Beckerleg note que les instruments de placement sont l’une des rares marchandises dont la demande explose lorsque les prix sont élevés et qu’on ignore quand elles sont offertes à bas prix!

Dans le secteur du placement, les émotions évoluent selon le cycle suivant : optimisme, euphorie, doute et peur, puis on recommence. Matthew Beckerleg comprend qu’on puisse éprouver une grande difficulté à briser ce cercle vicieux, car la masse des investisseurs se fond dans une espèce de « troupeau » où les différences sont aplanies et où on trouve une chaleur bienfaisante.

L’ennui, c’est que ce réconfort n’est qu’apparent. Il a tendance à créer de l’interférence dans le processus rationnel de prise de décision, dit Matthew Beckerleg. Le rôle du conseiller est alors d’éliminer cette source d’interférences en proposant à leurs clients émotifs une stratégie de répartition d’actifs qui répond leurs besoins à long terme.

Cette stratégie doit être disciplinée et évolutive. Disciplinée : si l’allocation idéale d’actifs pour un client donnée est de 60 % en actions et de 40 % en obligations, eh bien, on conservera intactes ces proportions jusqu’à ce que des changements majeurs justifient une autre pondération. « Dès qu’on note un écart de 5 % dans l’allocation, on doit revenir au plan de départ », indique Matthew Beckerleg.

Évolutive : le portefeuille doit être adapté en fonction du cycle de vie du client, non pas de l’humeur des marchés. L’histoire montre qu’il est très risqué de tenter d’identifier quels seront les secteurs de l’heure au cours d’une année, car cela revient à essayer de synchroniser les marchés. En revanche, certains changements fondamentaux doivent commander des modifications dans la stratégie. « À mesure qu’une personne vieillit, par exemple, ses revenus peuvent commencer à diminuer. Le moment peut être alors propice de positionner le portefeuille de manière plus défensive », explique le gestionnaire.

Cependant, avant de réorganiser les placements, le conseiller doit faire une évaluation exhaustive de la situation financière de son client, non seulement pour ce qui est des actifs, mais aussi du passif. Les actifs incluent toutes les sources de revenus. « Les prestations d’un régime privé de retraite doivent être considérées comme un actif de premier plan », souligne l’expert. Quant au passif, il comprend le solde hypothécaire et celui des prêts à la consommation, bien sûr, mais aussi les coûts liés à l’éducation post-secondaires des enfants. « Il est important que le passif soit compensé par des actifs tangibles et qu’il serve à atteindre des buts raisonnables. L’analyse d’un conseiller sera d’une aide précieuse pour ce client », dit Matthew Beckerleg.

Enfin, Matthew Beckerleg exhorte les investisseurs à ne pas se laisser influencer par les médias et la publicité des institutions financières. En effet, les messages qui sont véhiculés risquent d’exacerber leurs émotions, car ils ne présentent la plupart du temps que des situations idéales : des stratégies qui ont bien fonctionné pour untel, des placements qui ont rapporté gros pour l’autre, etc. Pour éviter ce piège, il convient de bien connaître sa tolérance au risque et de se faire à l’idée qu’un plan financier doit prendre de cinq à dix ans avant de porter fruit. Ici aussi, l’aide d’un conseiller sera inestimable dans la réussite de cet objectif, conclut Matthew Beckerleg.