Petit guide de l’accompagnateur chevronné

Par Bernard Viau | 25 septembre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
6 minutes de lecture

Qu’on les appelle directeurs des ventes, directeurs de division, coachs ou parrains, ces professionnels, chargés d’enseigner à la relève les « trucs » du métier, sont tous d’anciens conseillers. Leur objectif? Rendre ces recrues, qui ont moins de trois ans d’expérience au compteur, parfaitement autonomes dans leur carrière.

Leurs aptitudes à transmettre leur savoir sont cruciales, le parrainage ayant été identifié par une étude de la Chaire en assurance de l’Université Laval comme le meilleur outil pour conserver son personnel. Cette donnée est d’autant plus intéressante que cette analyse, réalisée en 2004, a démontré que les recrues ont seulement une chance sur quatre d’être encore conseillers après leur cinquième année de pratique. La rétention des conseillers est donc un véritable enjeu pour la profession.

LAISSER LES RÉSULTATS DE CÔTÉ

Un parrain doit d’abord évaluer les activités de ses conseillers plutôt que les résultats obtenus. Au début, la méthode de travail importe plus que les ventes qui, pour leur part, viendront avec le temps.

L’accompagnateur doit ensuite fixer des objectifs très précis à ses conseillers. Ceux-ci doivent pouvoir se comparer à des résultats spécifiques en termes de vente. En quantité raisonnable, ces objectifs doivent également être réalisables sur une courte période, de l’ordre d’une semaine ou d’un mois, afin de ne pas faire fuir la relève. Psychologiquement, réussir à atteindre des cibles à court terme est plus encourageant pour un débutant.

Parmi les qualités incontournables d’un directeur des ventes, certaines institutions vont privilégier son excellence en vente. D’autres vont préférer un directeur à l’intelligence émotionnelle solide, une qualité importante quand il s’agit de développer la carrière de la recrue. D’autres encore vont miser sur son humanité, par exemple, en insistant sur l’importance d’offrir un service éthique au client, quelle que soit sa situation financière. Sa capacité à faire évoluer sa relation avec un conseiller vers du mentorat sera également prise en compte.

LES QUALITÉS D’UN PARRAIN : TROIS EXEMPLES

1- Groupe Investors

Au Groupe Investors, c’est le directeur de division ou de succursale qui s’occupe du parrainage des nouveaux conseillers, explique son vice-président principal pour le Québec, Carl Thibeault. « Chaque nouveau conseiller doit s’engager à obtenir le titre de planificateur financier après une période de quatre ans », ajoute-t-il. Ce diplôme donnerait la confiance en soi qui permet de surmonter les difficultés de la profession.

Le parrain supervise la formation concernant les produits financiers, les outils technologiques de l’entreprise et les techniques de vente. Il accompagne fréquemment ses conseillers chez leur client, surtout au cours des six premiers mois. Des rencontres hebdomadaires avec le directeur sont prévues pour faire un suivi des objectifs et des manuels sont également mis à la disposition des débutants.

Sur le plan fiscal, les directeurs qui chapeautent les recrues sont, en partie, des travailleurs autonomes. Ces derniers reçoivent une rémunération proportionnelle au nombre de conseillers qu’ils supervisent ainsi qu’à la croissance de leur équipe.

2- Industrielle Alliance

À l’Industrielle Alliance, on appelle les parrains des directeurs des ventes. La plupart du temps, ils sont choisis à l’interne, car ils connaissent la culture de l’entreprise et ont déjà fait leurs preuves comme conseillers, indique Samuel Lajoie, directeur de succursale à Rivière-du-Loup. « Un directeur des ventes est d’abord un instructeur », explique-t-il.

Il doit en outre suivre la recrue comme son ombre, du moins en début de carrière. Auprès de conseillers plus expérimentés, son rôle évolue ensuite vers de la supervision, du support administratif et, parfois, du mentorat.

Tout d’abord, le professionnel montre aux nouveaux représentants les étapes du cycle de vente : comment prospecter, comment présenter les produits adéquats, comment conclure une vente, mais aussi comment recueillir des données sur le client, non seulement financières, tels le salaire ou le revenu d’entreprise, mais également personnelles, comme l’engagement dans des activités bénévoles et sociales, ou encore la nature de ses loisirs et projets d’avenir. Le but est de découvrir les besoins futurs du client.

Ensuite, le deuxième mandat d’importance du parrain est de s’occuper du recrutement. Il doit donc être reconnu comme un expert dans son domaine. Samuel Lajoie estime le taux de rétention des nouveaux représentants de son équipe à 50 % au cours de la dernière année.

À l’Industrielle Alliance, les directeurs des ventes sont des entrepreneurs, des travailleurs autonomes à part entière, tout comme les conseillers qu’ils supervisent.

3- SFL

Chez SFL, partenaire de Desjardins Sécurité Financière, les cabinets sont des franchises. Un tel contrat laisse les propriétaires des firmes beaucoup plus libres de leurs décisions administratives. Chaque franchise peut ainsi utiliser sa propre formule de parrainage.

Depuis deux ans, Frédéric Deschamps, directeur et copropriétaire du Centre financier SFL du Littoral, utilise une formule originale pour aider ses conseillers : faire appel à un coach personnel. « Son rôle est d’accompagner le conseiller dans sa croissance personnelle en tant qu’entrepreneur. » Comme il attribue son propre succès professionnel à l’aide d’un coach, il a donc naturellement pensé à une solution similaire pour les conseillers de son agence.

L’originalité de l’approche, selon lui, consiste à déléguer cet accompagnement à une personne qui n’est pas nécessairement un spécialiste des produits financiers et qui ne souhaite tirer aucun avantage financier lié aux performances de vente des conseillers. Cette personne, qui est salariée, se définit comme une gestionnaire en coaching stratégique.

D’après lui, le taux de rétention du personnel au centre financier du littoral de SFL, qu’il estime à 80 %, est très supérieur à la moyenne de l’industrie des services financiers. Notons toutefois que si l’expérience est prometteuse et donne déjà d’excellents résultats, ce recentrage de sa pratique d’affaires ne date que de 2015.

Combien d’argent une recrue coûte-t-elle à l’entreprise chaque année? Plusieurs milliers de dollars, au bas mot. Qu’il soit salarié ou entrepreneur, un nouveau conseiller doit donc absolument recevoir du soutien sur le plan professionnel afin de réussir sa carrière. Le rôle des directeurs, instructeurs, coachs, mentors et parrains, peu importe le nom qu’on leur donne, est ainsi essentiel. Encadrer une recrue est un travail très enrichissant sur le plan relationnel. Comme le souligne Samuel Lajoie, un parrain, « c’est quelqu’un de fiable, un rassembleur naturel, qui n’hésite pas à donner de son temps pour aider les plus jeunes en carrière. »

La clé d’une bonne rétention semble donc liée à la qualité de la direction d’une succursale. Est-ce le cas dans la vôtre?

Bernard Viau est un conseiller à la retraite.

Bernard Viau