Rémunération des conseillers : vos réactions

13 Décembre 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Portrait of a boy with the Australian flag painted on his face

Vos réactions à notre article intitulé Rémunération des conseillers : doit-on s’inspirer de l’Australie ? n’ont pas tardé à venir. En voici des extraits. Et continuez à nous écrire !

« Il est vrai qu’il existe des conflits d’intérêts systémiques dans l’industrie financière, écrit Jacques Bello BAA, Adm. A., AVC et représentant en épargne collective auprès d’Investia Services Financiers inc. Cependant, ces conflits ne proviennent pas, selon moi, du système de rémunération actuelle. »

« Lorsque j’ai appris, au printemps dernier, la décision qu’ont pris l’Angleterre puis l’Australie d’interdire les commissions, je me suis posé la question suivante : que s’est-il passé pour qu’ils en arrivent à ça ? La réponse qui me paraît évidente est que lorsque l’on s’intéresse au coût, c’est qu’on a de la difficulté à saisir où est la plus-value du service pour lequel je suis facturé », poursuit-il.

« Or, il est ici le vrai malaise ! Et c’est ici, où nous devrions avoir un débat, estime M. Bello. La décennie 2000 a été fatale au niveau des rendements à cause de la prolifération des scandales et des fraudes. Naturellement, les premières victimes ont été les investisseurs. La question qui est devenue naturelle pour eux est que « si mon rendement sur dix ans a été de 0 %, comment se fait-il que la rémunération de mon conseiller demeure la même ? » »

« Or, il y a deux points importants à considérer ici :

Premièrement, ce n’est pas la première fois dans l’histoire que les rendements moyens sur 10 ans donnent du zéro ou même du négatif. Lorsque cela arrive, les décennies qui suivent affichent toujours des rendements bien au-dessus de la moyenne à long terme. Lorsque je regarde tout ce qui se passe sur la planète actuellement, tout semble indiquer que ce sera effectivement le cas pour la présente décennie. Les rendements moyens d’ici 2020 pourraient bien atteindre des records historiques. Pour faire la démonstration de ce que j’avance, cela demanderait plusieurs pages d’explications.

Malheureusement, pour les investisseurs et pour l’industrie des services financiers, le rôle que l’on s’est donné sera un obstacle pour générer de la plus-value pour nos clients.

M. Béland mentionne dans l’article Rémunération des conseillers : doit-on s’inspirer de l’Australie ? que le premier devoir du conseiller envers son client, c’est de vérifier son seuil de tolérance.

Or, ceci, est selon moi, la première cause qui fait que l’industrie est en train de s’autodétruire. Cela fera bientôt 24 ans que je suis dans le domaine des fonds communs. Dois-je rappeler que le concept de tolérance aux risques n’est arrivé qu’en 1995 dans notre industrie ? Or, cette identification de tolérance au risque a résolu différents problèmes liés à des excès comme des clients qui étaient 95 % investis en haute technologie en l’an 2000. Cependant, ce mécanisme a engendré d’autres problèmes beaucoup plus graves.

Cette méthodologie dirige les clients où ils ne devraient pas aller compte tenu du contexte économique et boursier, d’où leur réelle frustration quant à notre plus-value. Et c’est la base même de leur questionnement sur notre rémunération.

Démonstration :

– Je rencontre une personne alors qu’il y a un sommet boursier, comme en 2000. Cette personne veut de la croissance et dit avoir une tolérance au risque élevé. Moi, je sais que le style de gestion de type croissance est à maturité et que le style valeur et les obligations donneront de meilleurs résultats (explications un peu plus bas).

– Une personne qui désire de la croissance dans un sommet, doit-elle perdre parce que le système dit qu’elle devrait être 70 % en actions et 30 % en obligations ?

– Je rencontre cette même personne, mais plutôt dans un creux au début de 2003. Je lui demande si elle veut de la croissance ou de la sécurité et quelle est sa tolérance au risque. Elle me répond qu’elle a perdu 40 % de son portefeuille. Elle ne veut plus perdre. Elle veut sécuriser ce qu’il reste de son capital. Je l’écoute et place son argent dans des fonds de revenus fixes (100 % obligations). Je connais la relation directe qu’il y a entre la Bourse, l’économie et les taux d’intérêt. Je sais aussi que lorsque les taux augmentent, la valeur des obligations diminue. Les taux augmentent quand ? Quand ça va bien. Et quand ça va bien ? Après une période où c’a été mal. Après la pluie, le beau temps…

– Mais, la conformité oblige et je place son portefeuille 100% en revenu fixe. Cinq ans plus tard, mon client va jouer au golf avec un copain et apprend que le portefeuille de ce dernier a un rendement moyen de 15% depuis 5 ans alors qu’il a fait à peine 3% par an avec moi. Il m’appelle pour me dire que je ne suis pas bon parce que le conseiller de son ami lui a fait réaliser 15% en moyenne sur ces 5 ans.

· Je lui réponds que je ne pouvais lui vendre les mêmes placements de son ami parce qu’il m’a dit en 2003 que sa tolérance était faible et qu’il visait la sécurité. Même si je lui avais vendu, les transactions auraient été bloquées par la conformité qui est là pour veiller à ses intérêts selon ce qu’il désire dans ses objectifs.

· Jusque-là, ça va. Le drame, c’est que là, il désire avoir le même genre de portefeuille que son ami et veut changer son profil d’investisseur à nouveau pour profiter de la manne qui passe. Le hic, c’est que nous nous approchons à nouveau d’un sommet…

· Dans ce contexte, les formations en conformité, données par une firme d’avocats mandatée par la Chambre, nous disaient expressément, dans ce cas précis, qu’il faut refaire le KYC avec les nouveaux objectifs de placement, les nouvelles tolérances aux risques du client ET inscrire dans les notes du représentant :

· L’objectif et le profil du client ont changé. Il est conscient que des placements destinés à la croissance – et nécessitant un profil de tolérance aux risques élevés – peuvent engendrer des gains ou des pertes élevés. Et le client signe ce changement.

Cette approche protège qui ? Le client ou le conseiller en cas de poursuite ? Ceci n’est qu’un autre conflit d’intérêts systémique. Quel est donc le rôle du conseiller ? Dire au client ce qu’il veut entendre ou lui dire ce qu’il devrait faire pour atteindre ses objectifs ? Avez-vous déjà vu des patients dire à leur médecin : « je ne suis pas à l’aise avec la pilule bleue, je préférerais la pilule rouge » ?

Que dire de la capacité des gestionnaires de caisse de retraite à livrer les prestations promises s’ils appliquaient la même approche ? », écrit Jacques Bello.

« Les comptes à honoraires sont pour les très gros clients » « Je distribue mes fonds en « FA », sans frais d’entrée ni de sortie, soit 1 % en commissions de suivi, explique quant à lui Jacques, conseiller indépendant et lecteur de la région de Québec. J’explique les différences dans les formules disponibles. Si mon client fait de l’argent, je fais de l’argent et l’inverse. »

« Les comptes à honoraires sont pour les très gros clients qui demandent en plus une planification successorale, écrit-il plus loin. Pour les petits et clients moyens, il y a des logiciels simples à comprendre pour le commun des mortels, mais il faudra toujours un conseiller, comme un pilote à bord de l’avion. Les courtiers en valeurs mobilières qui touchent des commissions à l’achat et à la vente, pour ensuite acheter de nouveau…, c’est de la rémunération en série, estime-t-il. Heureusement, ce ne sont pas tous les courtiers qui font rouler leur volume pour se créer une rémunération. »

« Pensons à la clientèle modeste, qui représente 90 % de la population, soit celle composée de personnes qui gagnent moins de 100 000 $ par année. S’ils investissement 2 000 $, 3 000 $ ou 5 000 $ par année, c’est bien beau. Pourrais-je leur demander de me payer 100 $ l’heure pour leur offrir mes services ?, demande Jean-François, MBA, un conseiller de l’Estrie. Dans votre article il est question que notre rémunération est trop chère, mais par rapport à quoi ? Un simple suivi en orthophonie nous coûte 96 $/h, c’est à peu près la même chose au niveau de l’ostéopathie et presqu’autant pour la réparation automobile. »

« Or, avec le principe actuel des commissions, je ne puis, au maximum, que recevoir 5 % sur le montant investi, signale-t-il. Pourriez-vous dire que c’est rentable d’offrir des REEE de 500 $, 1 000 $ ou 2 000 $ ? Or, dans la réalité, comme je ne souhaite point pénaliser le client, je n’offrirai pas la structure de commissions à frais de vente différés, mais plutôt celle à frais de vente modiques. Ce n’est donc plus 5 % que je recevrai, mais bien 2 %. Et encore. Il faut considérer la portion de plus en plus élevée que la cabinet doit conserver pour payer le transactionnel et surtout cette conformité sans queue ni tête. Sur une contribution REEE de 2 000 $, il ne me restera tout au plus que 28 $ de revenus IMPOSABLES ! Et cela m’aura pris combien de temps pour expliquer le REEE, les différences entre les régimes collectifs, individuel et familial, les PAE. Et pour remplir toute cette paperasse ? Oseriez-vous prétendre que les clients seraient avantagés s’ils nous payaient des honoraires, alors qu’un spécialiste coûte au bas mot aux environs 100$/h ? »

« Pourquoi croyez-vous que la majorité des conseillers visent la clientèle aisée ? C’est que pour s’avérer le moindrement rentable pour le conseiller les clients doivent investir un minimum de 10 000 $ avec eux. Mais à honoraires, combien de gens pourront encore ne serait-ce que penser à investir ? Or, comme je l’ai mentionné antérieurement, y a-t-il quelqu’un qui s’est penché sur la problématique des institutions financières. Eux-aussi sont payés indirectement par le biais du 1 % des frais de gestion. Le marché osera-t-il exiger que ceux qui travaillent dans les institutions financières devront aussi facturer leurs honoraires à l’heure ? », demande-t-il.