Des dividendes pour vos clients ?

Par Ronald McKenzie | 19 janvier 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
9 minutes de lecture

L’année 2010 pourrait être celle des actions à dividendes, estiment plusieurs spécialistes du monde du placement. C’est que la croissance marquée des Bourses mondiales s’est déroulée selon le scénario classique. Présageant des lendemains plus sereins, les parquets boursiers ont recommencé à monter avant que la récession mondiale ne se soit estompée.

Entre autres, les actions des petites entreprises en ont mis plein la vue. L’indice américain Russell 2000 des petites capitalisations a bondi de 82 % depuis son creux de mars 2009, contre environ 60 % pour l’indice général S&P 500. Maintenant que le gros de la poussée est derrière nous et que la croissance des Bourses semble se stabiliser, « les investisseurs devraient diminuer leur niveau de risque et opter pour des titres de meilleure qualité », dit Bruce Cooper, vice-président à Gestion de placements TD.

Il existe plusieurs façons de juger de la qualité d’une action. Celles qui paient des dividendes sur une base régulière et qui en accroissent le montant sont scrutées à la loupe par les gestionnaires. Dans un contexte où les taux d’intérêt frôlent le 0 %, on comprend que les investisseurs soient intéressés à acheter des titres qui peuvent générer de 3 % à 5 % uniquement avec le rendement du dividende. Certes, le risque est plus élevé que de détenir un bon du Trésor ou des parts d’un fonds du marché monétaire. « Mais comme ces derniers produisent des rendements qui réussissent difficilement à dépasser le taux d’inflation, présentent-ils vraiment moins de risque ? », demande Michel Marcoux, président d’Avantages Services financiers.

« Avec les taux d’intérêt qui n’ont jamais été aussi bas, et les obligations de société dont les taux moyens offrent des paiements à peine plus généreux, l’attrait pour les dividendes pourrait être beaucoup plus important en 2010 », dit Avery Shenfeld, économiste principal à Marchés mondiaux CIBC.

À l’heure actuelle, les rendements des dividendes sur les titres du TSX sont plus près des rendements des obligations de société qu’ils ne l’ont été depuis des décennies, et leur écart par rapport aux rendements des bons du Trésor est de loin supérieur.

Dans ces circonstances, les actions qui versent des dividendes présentent un rapport risque/rendement fort attrayant, dit Avery Shenfeld.

Rendements intéressants et avantages fiscaux Pour voir concrètement ce que cela signifie, nous avons vérifié le rendement du dividende que versent les six grandes banques canadiennes sur leurs actions ordinaires. Nous avons retenu ces institutions financières, car elles ont la réputation de rémunérer leurs actionnaires beau temps mauvais temps. De plus, l’histoire montre qu’elles s’y sont appliquées avec une régularité presque sans faille. Les résultats figurent dans le tableau ci-dessous.

Titre Dividende par action (trimestriel) Cours de l’action* Rendement annuel projeté
Banque CIBC

0,87 $

65,58 $

5,31%

Banque de Montréal

0,70 $

53,49 $

5,23%

Banque Nationale du Canada

0,62 $

59,27 $

4,18%

Banque Royale du Canada

0,50 $

54,99 $

3,64%

Banque Scotia

0,49 $

46,18 $

4,24%

Banque TD

0,61 $

63,50 $

3,84%

* Au 15 janvier 2010. Les banques sont classées par ordre alphabétique.

Comme on peut le constater, le rendement du dividende qu’on peut tirer des actions ordinaires des six grandes banques se compare avantageusement aux produits générateurs d’intérêts, comme les obligations des gouvernements et les titres de dette des grandes entreprises. Et puis, il ne faut pas oublier que le cours des actions bancaires peut continuer à s’apprécier, ajoutant ainsi au rendement global de l’actionnaire. « En outre, les personnes qui reçoivent des dividendes de source canadienne ont droit à un avantage fiscal intéressant », rappelle Bruce Cooper.

Au Québec, on peut réclamer, pour l’année d’imposition 2009, un crédit d’impôt fédéral de 18,97 % et un crédit d’impôt du Québec de 11,90 %. Ainsi, un retraité québécois célibataire qui aurait touché un revenu annuel de 25 000 $ versé exclusivement en dividendes d’une entreprise cotée à la Bourse aurait reçu une facture fiscale de 122 $ seulement. Si cette somme avait été composée d’intérêts, sa note se serait élevée à… 3 870 $ !

Ordinaires ou privilégiées ? Les investisseurs moins tolérants au risque peuvent choisir d’acheter des actions privilégiées au lieu des actions ordinaires. Leur cours est moins sujet aux fluctuations boursières et elles versent un dividende sur une base régulière (trimestriel, normalement).

Les actions privilégiées confèrent, par rapport aux actions ordinaires, un droit prioritaire sur l’actif en cas de liquidation ou de dissolution de l’entreprise. Le droit des créanciers et des porteurs d’obligations et autres titres d’emprunt a préséance sur celui des actionnaires privilégiées, et les actionnaires ordinaires doivent se contenter de ce qui reste après que tous ceux en amont d’eux se seront payés.

Les actions privilégiées donnent généralement droit à un dividende fixe. Rien ne garantit que le dividende « privilégié » sera versé, mais les chartes de certaines sociétés stipulent qu’il est interdit de payer des dividendes sur les actions ordinaires tant que les actionnaires privilégiés n’auront pas reçu tous les dividendes qui leur sont dus.

Dans certains cas, le dividende sur les actions privilégiées peut être passablement attrayant. En janvier 2009, au sortir de la crise, les grandes banques canadiennes en manque de capitaux ont réalisé des émissions d’actions privilégiées afin de financer leurs activités courantes. Ces dividendes « privilégiés » se traduisent par un rendement annuel moyen de 6,5 %, compte tenu du prix d’émission de 25 $ par action privilégiée. Pas mal pour des produits destinés à des investisseurs soucieux du risque.

Les investisseurs qui veulent profiter de cette offre ne doivent pas tergiverser, car le taux de 6,5 % est valable jusqu’en 2014. Après, le taux du dividende sera rajusté tous les cinq ans à un niveau correspondant au rendement des obligations de cinq ans du gouvernement du Canada, majoré d’une prime d’environ 400 points de base.

Les fonds de dividendes Pour la plupart des épargnants, la façon la plus simple et la moins coûteuse d’accéder à des actions génératrices de dividendes consiste à acheter un fonds commun de dividendes. Toutes les grandes familles de fonds en proposent. À titre indicatif, examinons le plus important fonds de cette catégorie au pays, soit RBC Canadien de dividendes.

Ce fonds coté 4 étoiles par Morningstar Canada gère un actif de près de 10 milliards de dollars. Parmi ses 10 principaux titres en portefeuille figurent les actions ordinaires des grandes banques canadiennes, de la Financière Manuvie, des pétrolières Suncor Énergie et EnCana et de la société Enbridge. Même si ce fonds a connu une année difficile en 2008 (- 27 %), il affiche un rendement annualisé de + 6,1 % sur cinq ans, de + 9,7 % sur 10 ans et de + 11,5 % depuis sa création en janvier 1993.

Les autres gros fonds de dividendes canadiens sont construits sur le même modèle avec à peu près les mêmes titres en portefeuille. Peut-on conclure que les actions qu’ils choisissent sont dignes de foi ? « Oui, on peut affirmer cela. Il s’agit de titres d’entreprises de haute qualité qui sont rentables et qui emploient leurs fonds autogénérés pour verser des dividendes croissants au fil du temps », dit Bruce Cooper.

Pour sa part, ce gestionnaire dirige le fonds TD Mondial de dividendes. Ce fonds de 455 millions de dollars a pour but de diversifier le portefeuille des investisseurs dans des secteurs moins représentés au Canada : multinationales des soins de santé, producteurs de biens de consommation, grandes entreprises du secteur industriel. Les 10 principaux placements du fonds comprennent Total SA (France), les sociétés américaines Johnson & Johnson, Abbott Laboratories et AT&T, les suisses Novartis et Roche Holding, de même que les britanniques Rio Tinto et HSBC Holdings.

Même si ce sont des actions ordinaires, elles affichent une volatilité moindre sur une longue période, indique Bruce Cooper. « Les investisseurs canadiens peuvent ainsi être exposés aux actions mondiales en limitant le risque associé aux placement étrangers », ajoute-t-il.

Michel Marcoux est aussi un adepte des fonds de dividendes. Il en recommande chaque année dans son guide Les 100 meilleurs fonds, rédigé en collaboration avec Alexandre Lebrun.

Il attire notre attention sur le fonds Omega Actions privilégiées, de la Banque Nationale. Le portefeuille de 215 millions de dollars est composé à plus de 90 % d’actions privilégiées, comme son nom l’indique. « C’est l’un de mes favoris, car le gestionnaire met l’accent sur la préservation du capital. Pour les retraités qui ont de l’argent hors REER, ce peut être une solution avantageuse », explique Michel Marcoux. Non seulement ce type de produit est moins volatil qu’un fonds ordinaire d’actions, mais il offre également une efficacité fiscale à ne pas négliger.

Un fonds de dividendes pour les retraités ? Michel Marcoux croit qu’un fonds de dividendes peut constituer le noyau d’un portefeuille d’une personne à la retraite. En effet, on conseille souvent aux retraités de se tourner vers les fonds à revenu fixe, histoire de réduire le risque financier. Or, en cette époque de très bas taux d’intérêt, les gestionnaires de fonds d’obligations doivent précisément courir des risques accrus pour générer du rendement.

Ils y parviennent en investissant dans des obligations de société ou en sélectionnant des titres de dettes à échéance longue. « Quand les taux d’intérêt baissent, cette stratégie peut être rentable. Mais si les taux se remettent à monter, ces fonds pourraient connaître de sérieuses difficultés. Les gens oublient cette réalité », conclut Michel Marcoux.

Ronald McKenzie