La surimposition des revenus étrangers dans une société de portefeuille

Par Mathieu Huot | 12 novembre 2019 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Lorsqu’une personne possède une société détenant un portefeuille de placements, la discussion que son conseiller a avec elle porte souvent sur les répercussions des revenus étrangers et leur imposition plus importante. Tenter d’en expliquer les raisons peut devenir complexe. Voici un peu d’aide.

Le régime fiscal canadien impose les résidents canadiens sur leurs revenus mondiaux, incluant les revenus de placement générés à l’extérieur du pays. Quant à l’État où se situe l’émetteur du titre, celui-ci effectuera généralement une retenue d’impôt à la source du revenu gagné par un non-résident. Cela peut donc créer une double imposition.

Dans le but d’éviter cette situation, plusieurs pays ont signé entre eux une convention fiscale incluant des mécanismes d’intégration.

Ceux-ci permettent de demander un crédit pour impôt étranger dans sa déclaration de revenus canadienne égal à l’impôt retenu dans l’autre pays, limitant ainsi la facture fiscale. Cette méthode n’est toutefois pas parfaite lorsque les revenus sont générés par une société.

En application

Pour bien comprendre le tout, comparons un revenu d’intérêt canadien avec un dividende étranger incluant une retenue de 15 %. Le revenu d’intérêt canadien se compare au dividende étranger d’un point de vue fiscal, car ce dernier n’est pas majoré dans la déclaration de revenus et le crédit d’impôt pour dividendes ne peut pas s’appliquer. Le revenu étranger est donc pleinement imposable, tout comme le revenu d’intérêt canadien.

En 2019, le taux d’imposition sur les revenus de placement est de 50,27 %. Une partie de cet impôt est ajoutée à l’IMRTD de la société et sera récupérée lorsque des dividendes imposables seront versés à l’actionnaire. En 2019, l’IMRTD est de 30,67 %.

Toutefois, le crédit pour impôt étranger est déduit du calcul de l’IMRTD, ce qui ramène le taux d’IMRTD à 18,77 %. Le taux d’imposition net est donc de 31,5 % lorsqu’un crédit pour impôt étranger s’applique, comparativement à 19,6 % lorsqu’il n’y en a pas.

Par la suite, lorsque les sommes restantes sont versées à l’actionnaire sous forme de dividende ordinaire (taux d’imposition de 46,25 % en 2019), le taux d’imposition combiné pour un revenu étranger atteint 63,18 %!

Qu’en serait-il si le dividende était de source canadienne ? Le taux d’imposition combiné est de 40 % en 2019. Les taux d’imposition d’un dividende canadien et d’un dividende étranger ayant une retenue de 15 % affichent donc un écart de plus de 20 %.

Quelle solution?

Dans le cas des revenus de placement étrangers, une détention par l’entremise du portefeuille de placement non enregistré personnel est recommandée, car l’IMRTD ne s’applique pas aux individus. La retenue d’impôt est donc pleinement annulée par le crédit pour impôt étranger.

Il est aussi possible de détenir les titres étrangers dans une société par l’entremise d’un fonds constitué en société (fonds de catégorie de société). Contrairement à un fonds en fiducie, le fonds constitué en société peut verser des dividendes déterminés ou une distribution de gain en capital uniquement aux actionnaires. Cela fait en sorte que l’IMRTD de la société ne sera pas réduit par le crédit pour impôt étranger.

L’optimisation fiscale du portefeuille de placement devient plus importante que jamais. Il est donc essentiel de choisir l’outil d’épargne approprié selon la pondération des titres de croissance (canadiens et étrangers) et des titres à revenu fixe.

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Mathieu Huot, M.Fisc., Pl. Fin., CIM, est fiscaliste, planificateur financier et gestionnaire de portefeuille agréé à IG Gestion de patrimoine.

En collaboration avec Geneviève Leroux, LL. M. Fisc, directrice, Planification fiscale et successorale, à IG Gestion de patrimoine.


• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2019 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Mathieu Huot