Des employés prêts à accepter une baisse de salaire

Par La rédaction | 29 janvier 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
6 minutes de lecture
freedomtumz / 123RF

Les entreprises qui n’investissent pas dans la santé mentale de leurs employés courent le risque de voir leur roulement de personnel augmenter, selon une enquête mondiale publiée lundi dernier par Morneau Shepell.

Celle-ci montre notamment que plus des trois quarts (77 %) des salariés canadiens seraient prêts à envisager de changer d’emploi pour un salaire identique si leur nouveau milieu de travail leur offrait un meilleur soutien en matière de bien-être personnel. Ce point est si important qu’une majorité de travailleurs (60 % des personnes interrogées) assurent qu’ils seraient susceptibles de quitter leur emploi actuel même si on leur offrait un salaire moindre, à condition toutefois que leur nouvelle situation soit  assortie d’un meilleur soutien.

Quel que soit le pays dans lequel les travailleurs ont été interrogés, ceux-ci ont placé la santé mentale au sommet des facteurs qui composent leur bien-être global, devant la santé physique et la santé financière. Ils ont également indiqué que le soutien de leur employeur sur ce plan influençait « considérablement » l’opinion qu’ils avaient de leur milieu de travail. Résultat : dans chaque pays, près des trois quarts des employés (76 % au Canada, 71 % aux États-Unis et 69 % au Royaume-Uni) affirment que les efforts déployés par leur entreprise pour favoriser la santé mentale constituent un facteur « déterminant » dans leur volonté de rester ou non en poste.

LES PRINCIPALES SOURCES DE STRESS

L’étude révèle également que même s’ils citent la santé mentale comme étant leur priorité principale, les employés canadiens et américains placent cependant le soutien des employeurs en cas de problèmes de santé avant leur bien-être mental et physique. « Les Canadiens disent que c’est le soutien en matière de santé mentale qui compte le plus pour eux, mais de nombreuses entreprises privilégient la rémunération dans leur stratégie de recrutement et de fidélisation, et elles offrent d’abord du soutien en matière de santé physique. Ce qui fonctionnait auparavant n’est plus un gage de succès. La santé mentale n’est plus un sujet aussi tabou qu’auparavant, et les employés accordent non seulement la priorité à celle-ci, mais ils s’attendent à ce quel leur employeur en fasse autant », souligne Stephen Liptrap, président et chef de la direction de Morneau Shepell.

L’enquête note également que l’alourdissement des exigences professionnelles devient aujourd’hui un facteur critique en matière de santé mentale. Si l’on en croit Morneau Shepell, cette nécessité d’un soutien dans ce domaine serait « principalement dictée par le stress constant que les Canadiens vivent dans leur vie personnelle et professionnelle ». Interrogés sur les principales sources de stress mental qui les affectent davantage, les employés qui en ont souffert au cours des six derniers mois affirment que le travail ou le milieu de travail (22 %) et le bien-être financier (21 %) sont les plus dommageables.

Globalement, l’enquête montre que le milieu de travail demeure l’un des principaux agents anxiogènes. Près de la moitié (45 %) des employés indiquent que les exigences psychologiques associées à leur emploi actuel ont augmenté au cours des 18 à 24 derniers mois, allant de la concentration et à la résolution de problème en passant par le besoin de créativité et d’adaptation au changement. À l’autre extrémité du spectre, seul un très petit nombre (4 %) d’employés estiment que les exigences auxquelles ils sont soumis se sont plutôt atténuées durant la même période.

LA PAROLE ET L’ÉCOUTE PLUTÔT QUE DES MÉDICAMENTS

Interrogés sur le type de soutien dont ils aimeraient bénéficier pour traiter l’anxiété ou la dépression causées par l’accumulation d’agents stressants dans leur environnement professionnel, plus de la moitié (53 %) des sondés citent la thérapie par la parole. Nombre d’entre eux aimeraient également pouvoir recourir à un programme numérique de pleine conscience ou de méditation (43 %) ou encore de développement des habiletés ou de thérapie cognitivo-comportementale (38 %), ce qui montre que ces types de programmes sont de plus en plus acceptés. En comparaison, seul un employé sur trois (39 %) indique qu’il serait prêt à prendre des médicaments sur ordonnance.

L’étude révèle par ailleurs que les Canadiens ressentent une pression financière accrue, peu importe leur niveau de revenu, par rapport aux années précédentes. Dans l’ensemble, plus de quatre employés sur 10 (42 %) affirment éprouver davantage de difficultés financières que d’autres personnes ayant le même revenu. Cette proportion est similaire au Royaume-Uni (41 %), mais elle augmente pour les employés américains, alors que près de la moitié (47 %) des salariés se disent préoccupés par la bonne gestion de leurs finances personnelles. Concrètement, le bien-être financier a une incidence directe sur le rendement au travail. L’enquête montre ainsi qu’un grand nombre d’employés canadiens indiquent que les problèmes financiers qu’ils éprouvent ont des répercussions négatives sur leur productivité (36 %) et leur assiduité au travail (24 %).

« Quand on parle de stress financier, on se rend compte que ce problème affecte les personnes de tous les niveaux de revenu. En outre, le fait que les Canadiens ressentent une pression financière extrême mais qu’ils soient quand même prêts à accepter un salaire moindre s’ils bénéficient d’un bon soutien en santé mentale en dit très long. Le soutien en santé mentale doit tenir compte de la situation dans son ensemble et être suffisant pour aider les employés à composer avec les difficultés dans tous les aspects de leur bien-être, que ce soit physique, financier, social ou mental », explique Paula Allen, première vice-présidente, Recherche, analytique et innovation, chez Morneau Shepell.

LE BIEN-ÊTRE AU TRAVAIL EST LIÉ À LA DIVERSITÉ ET À L’INCLUSION

Enfin, l’enquête montre que la diversité et l’inclusion sont des éléments cruciaux du sentiment d’appartenance au milieu de travail. La grande majorité (82 %) des employés indiquent en effet que ces deux facteurs ont une influence positive sur leur bien-être personnel. Au pays, l’étude relève que les employeurs se débrouillent plutôt bien sur le plan des groupes d’âge, du genre, de la race et de l’ethnicité, mais qu’ils ont encore du chemin à faire en ce qui concerne la religion, l’orientation sexuelle, les capacités et les incapacités de chacun.

« Bien qu’il n’y ait pas d’approche universelle pour le soutien en santé mentale, nous espérons que notre enquête aidera les entreprises à comprendre l’importance du bien-être au travail. Le soutien en matière de bien-être financier, de relations avec les collègues, de diversité et d’inclusion n’est qu’une étape dans une stratégie en santé mentale à grande échelle. En étant à l’écoute des besoins des employés, les entreprises peuvent éliminer le sentiment d’isolement et [progresser] d’une manière qui profite à tous », conclut Paula Allen.

L’enquête d’opinion a été réalisée en français et en anglais par Morneau Shepell auprès de 8 000 répondants en août et en septembre 2019. Elle avait pour objet de comprendre et de comparer le point de vue des employés au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni en ce qui concerne la santé mentale au travail. Ses données ont été pondérées pour assurer que la composition régionale et hommes-femmes de l’échantillon soit représentative de cette population. Sa marge d’erreur est de plus ou moins 3,2 %, 19 fois sur 20.

La rédaction