La Banque Laurentienne boude le français?

Par La rédaction | 8 avril 2021 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Banque Laurentienne
Photo : dennizn / 123RF

Les critiques ont fusé après la tenue de l’Assemblée annuelle des actionnaires de la Banque Laurentienne, mardi dernier. À cette occasion, la présidente-directrice générale de l’institution québécoise, Rania Llewellyn, a peiné à prononcer deux phrases dans la langue de Molière.

« C’est méprisant! c’est insultant! » réagissait Jean-Paul Perreault, président d’Impératif français en entrevue avec Benoit Dutrizac sur QUB Radio. D’après lui, le fait que la troisième institution privée au Québec nomme une PDG et présidente du CA unilingue anglophone est synonyme d’un manque de respect pour la culture québécoise. « Quand ton siège social est au Québec, c’est une prémisse incontournable de s’assurer que la PDG maîtrise le français. »

« Comme s’il n’y avait pas de compétences au Québec ou dans la francophonie capable d’assumer des responsabilités comme celles-ci! », se renfrogne-t-il.

« De voir qu’on va nommer des gens incapables de parler la langue de leur client, ça je dois dire que c’est carrément méprisant », ajoute-t-il.

Un avis partagé par Yves Daoust, directeur de la section Argent du Journal de Montréal sur QUB Radio et Willie Gagnon, directeur du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC).

Le premier souligne que la PDG avait pourtant promis d’apprendre le français lorsqu’elle a été nommée en octobre dernier. Et si l’institution affirme que son apprentissage se poursuit, pour le moment celui-ci ne semble pas avoir porté ses fruits.

Le second confie n’avoir pas même réussi à poser sa question au sujet du français lors de l’Assemblée annuelle. « Ils ont du front. Jusqu’à un certain point, c’est obscène pour une banque québécoise de ne plus avoir de dirigeants qui soient capables de s’exprimer en français pour au moins la moitié de l’assemblée », réagit-il.

Rappelons que le dernier PDG de la banque, François Desjardins, parlait très bien français et anglais.

Vers la fin de son entrevue, Benoit Dutrizac souligne tout de même que la Banque Laurentienne n’est pas la seule banque au pays ayant un PDG unilingue anglais. Argument que Jean-Paul Perreault a rejeté arguant que ce n’est pas parce qu’ailleurs ils font pareil que ça justifie de prendre une telle décision.

UN GESTE CRITIQUÉ

Afin d’aider la PDG à gérer l’enseigne bancaire dans la province du Québec, tout juste avant le congé pascal, la banque a créé un nouveau poste, celui de président, Marché du Québec. Ce dernier a été confié à Éric Provost, le vice-président exécutif et chef des Services aux entreprises, une initiative loin d’être bien accueillie.

Jean-Paul Perreault estime que cette nomination « comble le saccage ». Il trouve cela « extrêmement provocant ».

Les détracteurs se demandent ainsi pourquoi nommer un président pour le Québec pour une banque québécoise? Réponse à laquelle Fabrice Tremblay, porte-parole de la banque, a répondu : « La nomination de M. Provost renforce encore davantage notre engagement envers le Québec […]. Il conseillera la présidente et cheffe de la direction sur les moyens d’accroître la présence et la part de marché de la Banque au Québec. »

UNE RÉPONSE DE LA BANQUE

La Banque Laurentienne a répondu, jeudi, aux vives critiques publiées par le Journal de Montréal. Dans son communiqué envoyé à plusieurs médias, elle affirme être « fière de ses racines au Québec » et assure que celles-ci « sont au cœur de son identité ».

« Nous reconnaissons qu’il est toujours possible d’en faire davantage pour protéger et promouvoir la langue française dans un contexte professionnel », déclare l’institution ajoutant toutefois avoir offert des services de traduction simultanée pendant l’Assemblée annuelle des actionnaires.

« À titre d’institution financière québécoise, nous avons un rôle important à jouer à cet égard et nous avons pleinement l’intention d’être un partenaire constructif au moment où les gouvernements se penchent sur les façons de protéger le droit des Québécois et des Québécoises de travailler en français », assure-t-elle.

L’institution souligne également qu’elle se conforme volontairement à la Charte de la langue française, alors qu’elle est une banque régie par une charte fédérale. Elle promet d’ailleurs de continuer à travailler avec l’Office québécois de la langue française et de lui faire part des mesures prises pour que la langue française conserve une place importante dans l’institution.

La rédaction