La crise de 2008 a causé un demi-million de décès par cancer

Par La rédaction | 27 mai 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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La hausse du chômage consécutive à la crise financière de 2008 aurait contribué à une surmortalité par cancer de plus d’un demi-million de personnes dans le monde, selon une étude britannique parue mercredi et rapportée par l’AFP. Car dans un certain nombre de pays, qui dit chômage dit accès plus restreint aux services de santé.

« Le cancer est la cause principale des décès dans le monde, donc comprendre comment les changements économiques peuvent influer sur la survie à un cancer est crucial », estime le docteur Mahiben Maruthappu de l’Imperial College à Londres, qui a dirigé ces travaux menés par des chercheurs américains et britanniques basés sur des données de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale de la santé.

Selon les conclusions de l’étude publiées dans la revue britannique The Lancet, la récente crise économique a fait 260 000 morts supplémentaires par cancer dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) entre 2008 et 2010, et plus de 500 000 à l’échelle planétaire durant la même période.

Rappelons qu’en 2012, le cancer a provoqué 8,2 millions de décès dans le monde.

DIAGNOSTIC TARDIF

« Nous avons découvert que la hausse du chômage était associée à une augmentation de la mortalité par cancer mais qu’une couverture santé universelle protégeait la population contre ces effets, explique le Dr Maruthappu. En particulier dans le cas de cancers pour lesquels il existe un traitement, comme le cancer du sein, de la prostate et le cancer colorectal. À l’inverse, des coupures dans les soins de santé peuvent coûter des vies. »

Les chercheurs ont ainsi observé le lien entre chômage, coupes budgétaires dans la santé et mortalité par cancer de plus de 70 pays, représentant plus de deux milliards de personnes. Ils ont suivi les tendances entre 1990 et 2010, les données après cette date n’étant pas disponibles.

Les cancers ont été classés selon deux catégories : « ceux que l’on peut traiter », dont le taux de survie est supérieur à 50 %, et les « incurables », dont la survie est inférieure à 10 %.

Le lien entre chômage et surmortalité a été le plus marqué pour les cancers que l’on peut traiter, relèvent les chercheurs. Aux États-Unis, 18 000 décès supplémentaires ont été comptabilisés et 1 500 en France. En revanche, les chercheurs n’ont constaté aucune surmortalité sur la période 2008-2010 au Royaume-Uni ou en Espagne.

« Dans les pays où il n’existe pas de couverture sociale universelle, l’accès aux soins dépend souvent du contrat de travail, explique le professeur Rifat Atun, de Harvard. Sans emploi, les patients sont probablement diagnostiqués tardivement et bénéficient d’un mauvais traitement ou en retard. »

CHÔMAGE ET SURMORTALITÉ

Plusieurs études avaient déjà montré l’impact de la hausse du chômage et des coupes budgétaires en matière de santé mentale ou physique.

Le chômage serait ainsi à l’origine de quelque 45 000 suicides chaque année dans 63 pays, dont les économies occidentales, selon une étude de chercheurs suisses publiée en février 2015 dans The Lancet Psychiatry.

Une autre étude menée par l’Institut français pour la santé et la recherche médicale (Inserm) et publiée en mars 2015 avait mis en évidence une « surmortalité très importante » chez les chômeurs, presque trois fois supérieure à celle des non-chômeurs.

Le chômage a notamment « des effets majeurs sur la survenue d’accidents cardiovasculaires et de pathologies chroniques », observaient les chercheurs.

Rappelons que, selon les chiffres du Bureau international du travail (BIT), entre 2007 et 2009, le taux de chômage a progressé de près de 1 % dans le monde. Les pays de l’OCDE en ont payé un lourd tribut puisque, bien que représentant moins de 16 % de la main-d’œuvre mondiale, ils ont participé pour plus de 40 % à la hausse du chômage mondial durant la période, et ont enregistré des taux de 8,4 % en 2009 contre 6 % en 2008 et 5,7 % en 2007.

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