La croissance lente menace la stabilité financière

Par La rédaction | 15 septembre 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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La diminution du potentiel de croissance de l’économie mondiale, et la baisse des taux d’intérêt qui l’accompagne, présentent des risques pour la stabilité financière, a déclaré hier la première sous-gouverneure de la Banque du Canada (BdC).

Dans un discours prononcé devant l’Official Monetary and Financial Institutions Forum, à Londres, Carolyn Wilkins a cependant estimé que ces risques pouvaient être atténués grâce aux efforts délibérés du secteur privé et des décideurs publics.

« Bien que l’on associe généralement les risques entourant la stabilité financière à une croissance élevée insoutenable, une croissance plus lente et des rendements plus faibles peuvent aussi exacerber les vulnérabilités au sein du système financier », souligne-t-elle.

BAISSE DU RENDEMENT DES PLACEMENTS

Carolyn Wilkins estime que la croissance pourrait rester anémique parce que les deux composantes qui déterminent la production potentielle, à savoir l’offre de main-d’œuvre et la productivité du travail, progressent plus lentement que dans le passé.

D’après les estimations de la BdC, la croissance du produit intérieur brut potentiel du globe est passée d’un sommet d’environ 5 % en 2005 à un peu plus de 3 % cette année, ce qui représente un « manque à produire » à l’échelle mondiale de quelque 1 500 milliards de dollars américains en 2016 seulement.

Pour la dirigeante, le ralentissement de la croissance potentielle a comme conséquences naturelles non seulement une baisse des bénéfices et des dividendes des sociétés, mais aussi un affaiblissement du taux de rendement moyen des placements. L’une des façons d’évaluer cet effet consiste à estimer le taux neutre [le taux d’intérêt nécessaire pour équilibrer l’épargne et l’investissement lorsque l’économie tourne à plein régime], qui s’établit aujourd’hui au Canada à 1,25 %, contre 3 % au début des années 2000, rappelle-t-elle.

ALOURDISSEMENT DE LA DETTE DES MÉNAGES

Avec un taux directeur se situant aujourd’hui à 0,5 %, la politique monétaire au pays demeure très expansionniste, mais moins qu’elle ne l’aurait été il y a 10 ans, lorsque le taux neutre était plus élevé, juge la première sous-gouverneure.

La croissance plus lente et le taux neutre plus faible accentuent les vulnérabilités des ménages, qui pourraient être confrontés à des périodes plus longues et plus fréquentes de diminution de leurs revenus, ce qui viendrait alourdir le fardeau de leur dette, poursuit Carolyn Wilkins.

Dans ces conditions, la dirigeante estime qu’un taux neutre plus bas pourrait inciter les investisseurs à prendre davantage de risques dans leur quête de meilleurs rendements, de même qu’il pourrait exercer des pressions sur les modèles d’affaires des banques, ce qui ouvrirait la porte à la migration d’importantes activités financières et des risques connexes vers les entités moins réglementées.

COMMENT PALLIER LES RISQUES?

Pour « atténuer les risques à venir », Carolyn Wilkins croit néanmoins qu’il existe des « stratégies prometteuses », la première d’entre elles consistant « à favoriser la solidité du système financier international ». « Les pays membres du G20 doivent mener à terme les réformes financières dont ils ont convenu après la crise, que celles-ci concernent les banques, les infrastructures de marchés financiers ou l’intermédiation financière non bancaire », insiste-t-elle.

Les investisseurs doivent s’adapter à des taux neutres plus faibles, tandis que les pays industrialisés doivent poursuivre leurs efforts et prendre les mesures budgétaires et structurelles qui amélioreront la croissance et la productivité à long terme.

Conclusion de la dirigeante : « Nous devons nous adapter à la nouvelle réalité que représente une croissance potentielle réduite. Ainsi, nous devons modifier nos stratégies d’investissement afin de tenir compte des taux de rendement plus bas. Les ménages, quant à eux, pourraient devoir épargner davantage pendant leur vie active ou se préparer en fonction d’un revenu de retraite moins élevé. Nous devons également reconnaître qu’on ne peut plus compter dans la même mesure qu’auparavant sur la croissance pour éponger les dettes. »

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