Les nouvelles règles hypothécaires vont ralentir le marché

Par La rédaction | 1 novembre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les récentes mesures du gouvernement fédéral pour resserrer les règles hypothécaires entraîneront « un ralentissement certain du marché immobilier à court et à moyen terme », selon la Fédération des chambres immobilières du Québec.

Dans une analyse économique publiée vendredi, la FCIQ affirme que celles-ci disqualifieront de nombreux premiers acheteurs potentiels, réduiront le montant des emprunts autorisés et feront grimper les taux hypothécaires dans la province. Alors qu’elle entend revoir « significativement à la baisse » ses prévisions pour 2017, la Fédération avance aussi que le nombre de transactions et la valeur des propriétés pourraient chuter.

« L’impact sur le nombre de ventes sera à tout le moins aussi important que le resserrement hypothécaire de 2012, qui a fait diminuer la période maximale d’amortissement de 30 à 25 ans », soutient Paul Cardinal, directeur Analyse de marché à la FCIQ, ajoutant qu’« il y a un réel risque de voir les prix diminuer ».

DES MESURES INADAPTÉES À TOUT LE PAYS

« Les propriétés étant le principal actif des ménages, une diminution de leur sentiment de richesse et de leur confiance pourrait en retour affecter négativement leurs dépenses de consommation », redoute l’analyste.

Par ailleurs, la FCIQ se dit inquiète du fait que les resserrements prévus par Ottawa et par le Bureau du surintendant des institutions financières entreront en vigueur presque au même moment. Or, indique-t-elle, même si ces mesures se veulent préventives et visent à protéger la sécurité financière des Canadiens et à appuyer la stabilité à long terme du marché du logement, « leurs effets se combineront, dans un contexte où la croissance du prix des propriétés est déjà anémique au Québec et dans d’autres provinces ».

Pour justifier son initiative, le gouvernement fédéral affirme être préoccupé par la hausse rapide des prix des maisons dans certaines grandes villes, comme Toronto et Vancouver.

Pourtant, « quelque 75 % de la population canadienne habite en dehors de ces deux régions métropolitaines, dans des marchés qui ne présentent aucun signe de surchauffe », souligne la FCIQ. Pire, comme le montrent des données publiées dans son analyse économique, les prix baissent, stagnent ou sont en faible croissance (moins de 3 %) depuis le début de l’année dans la plupart des provinces.

LES PREMIERS ACHETEURS PÉNALISÉS

En outre, la nouvelle loi prévoit que tous les prêts assurés auprès de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (lorsque la mise de fonds est inférieure à 20 % du prix d’achat de la propriété) soient désormais soumis à « une simulation de crise des taux d’intérêt hypothécaires », rappelle la FCIQ.

Résultat : cet exercice fait en sorte que l’emprunteur n’est plus qualifié en fonction du taux hypothécaire qu’il a obtenu de son institution financière, mais plutôt d’un taux de référence fixe de cinq ans déterminé par la Banque du Canada.

Or, celui-ci est d’environ deux points de pourcentage plus élevé, « ce qui pénalisera fortement les premiers acheteurs » et aura pour effet de « réduire considérablement tant le nombre de ménages qui remplissent les conditions pour obtenir un prêt hypothécaire assuré que les montants des prêts accordés », met en garde la Fédération.

VERS DES TAUX HYPOTHÉCAIRES PLUS ÉLEVÉS

« Ces changements feront diminuer la disponibilité des fonds et la concurrence sur le marché hypothécaire, ce qui risque fort de se traduire par des taux hypothécaires plus élevés », avertit-elle.

« Les principaux impacts prévisibles de cette pluie de nouvelles mesures sont : la disqualification d’un nombre important de premiers acheteurs potentiels, la réduction du montant des emprunts permis, la diminution des fonds disponibles sur le marché hypothécaire, et une hausse des taux hypothécaires. La portée de tous ces changements sera majeure », conclut la Fédération.

Association à but non lucratif, la FCIQ regroupe les 12 chambres immobilières de la province, de même que près de 13 000 courtiers immobiliers membres.

Ottawa surveillera le marché immobilier

Le gouvernement fédéral va surveiller le marché immobilier pour s’assurer que son ralentissement ne freine pas la croissance économique du pays, affirme Bill Morneau.

Dans un discours prononcé vendredi devant la Chambre de commerce de la région de Toronto, le ministre fédéral des Finances a expliqué qu’il était « ultimement responsable » du maintien de la stabilité du système financier du pays.

Il s’est également engagé à s’assurer que l’endettement des ménages demeure soutenable et que les prêteurs agissent avec prudence, soulignant que, dans ce contexte, les nouvelles règles hypothécaires représentaient un outil clé, rapporte La Presse canadienne.

PAS D’AUTRES MESURES EN VUE

Bill Morneau a précisé que le gouvernement ne prévoyait pas mettre en place d’autres mesures spécifiques à l’immobilier, mais qu’il allait continuer à avoir la situation à l’œil. Ottawa a cependant récemment lancé une consultation avec des membres de l’industrie afin d’évaluer la mise en place d’une stratégie de partage des risques avec les prêteurs.

Cette politique ferait en sorte que les banques assumeraient une plus grande part du risque associé aux prêts hypothécaires. À l’heure actuelle, les assureurs couvrent la totalité des pertes en cas de défaut de paiement et, en vertu de la garantie offerte par le gouvernement, ce fardeau incombe aux contribuables.

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