Revenir tôt ou tard aux vérités premières

Par Pierre Saint-Laurent | 21 juin 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
4 minutes de lecture

• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2003 de Conseiller. Il est aussi disponible en format PDF. Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.


Avec les mouvements brusques des marchés que nous avons vécus ces dernières années, le temps se prête bien à un examen des caractéristiques fondamentales, des vérités premières en matière de finance et d’économie. En voici quelques-unes :

VÉRITÉ PREMIÈRE Nº 1: les actions et les obligations servent à financer les activités économiques d’entreprises commerciales. Comme conseiller, vous agissez dans le marché secondaire des titres financiers, les bourses, électroniques ou autres. Mais il ne faut pas oublier pourquoi des entreprises émettent des titres financiers dans le marché primaire : pour financer des projets et leur croissance. Par conséquent, la compréhension de l’entreprise, de sa structure, de sa santé financière et de ses projets demeure importante pour évaluer le potentiel d’un titre boursier ou obligataire. Autrement dit, derrière le placement ou la spéculation, il y a une situation économique bien réelle, menant à la création d’usines, de magasins, d’emplois – une offre visant à répondre à une demande.

VÉRITÉ PREMIÈRE Nº 2: les marchés financiers, c’est une boîte à outils. La combinaison de titres, de fonds communs et de placements spéculatifs dans un portefeuille s’accorde aux caractéristiques de long terme des catégories d’actifs correspondantes, sur le plan du rendement, de la volatilité et de la corrélation. En clair : un portefeuille ne pourra être meilleur que ses ingrédients. Il y a une expression anglaise bien connue qui nous rappelle à l’ordre : garbage in, garbage out (ou GIGO). Des instruments financiers de piètre qualité donneront des résultats de piètre qualité. Mais, surtout, n’oubliez pas la boîte à outils : on ne construit pas un gratte-ciel avec une égoïne et un marteau; on ne construit pas un portefeuille qui produira un rendement de 25 % par an avec une volatilité raisonnable.

La finance béhaviorale aide à mieux comprendre ses clients parce qu’elle étudie l’irrationalité de l’investisseur.

VÉRITÉ PREMIÈRE Nº 3: tout ce que les investisseurs veulent, c’est être heureux. C’est votre tâche de trouver ce qui les rend heureux, financièrement parlant bien sûr. Les investisseurs savent ce qu’ils veulent (ou du moins devraient le savoir), et vous savez comment les marchés peuvent les aider à avoir ce qu’ils veulent. Parlezvous! Pour ce faire, il y a une foule de moyens : questionnaires d’investisseur, politiques de placement, bilan financier, projections, etc. Mais viennent bien avant cette quincaillerie la confiance à gagner et la capacité à établir et à entretenir un dialogue. Or, quand les marchés sont difficiles, les conseillers arrêtent d’appeler leurs clients, au grand désarroi de ceux-ci. Avec une relation solide en place, le dialogue se poursuit, pour le bénéfice des deux parties.

VÉRITÉ PREMIÈRE Nº 4: vous devez décoder ce que vos clients disent. Une nouvelle discipline, la finance béhaviorale, vise à intégrer les connaissances psychologiques aux principes financiers. D’ailleurs, le plus récent prix Nobel d’économie a été remporté par deux spécialistes de la finance béhaviorale, Daniel Kahneman et Vernon L. Smith. La finance béhaviorale aide à mieux comprendre ses clients parce qu’elle reconnaît et étudie l’irrationalité de l’investisseur. Par exemple, le concept d’ancrage, qui avance entre autres que l’on tend à croire que le juste prix d’un titre, c’est le prix qu’on l’a payé, explique pourquoi les investisseurs ont horreur de revendre des titres à perte même s’ils pourraient faire beaucoup mieux avec d’autres titres plus prometteurs. Un autre concept, la représentativité, porte sur le fait qu’un investisseur croira que le passé récent se reproduira dans l’avenir immédiat. Et ainsi de suite. La finance béhaviorale est riche de ces enseignements, c’est pourquoi je prévois qu’elle jouera un rôle primordial dans votre pratique dans un proche avenir.

Les vérités premières, on y revient tôt ou tard : c’est le fondement même de notre métier.

Pierre Saint-Laurent

Pierre Saint-Laurent

Pierre Saint-Laurent, M. Sc., CFA, est président d’ActifConseil à Montréal. On peut lui écrire à l’adresse psl@actifconseil.com.


• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2003 de Conseiller. Il est aussi disponible en format PDF. Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

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