Sex shops, bingo et égouts pour financer la retraite

Par La rédaction | 7 novembre 2016 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
4 minutes de lecture

Les taux d’intérêts anémiques et le vieillissement de la population placent les régimes de retraite dans une position difficile. Auparavant plutôt conservateurs, ceux-ci rivalisent maintenant d’imagination pour générer des revenus, quitte à devoir se boucher le nez, comme le fait remarquer Bloomberg.

L’Europe est particulièrement touchée par cette course aux actifs peu traditionnels. Le régime de retraite des employés de la vénérable British Broadcasting Corporation (BBC) contribue à la construction d’égouts à Londres. Pension Insurance Corporation achète de la dette adossée à des pistes d’atterrissage à l’aéroport Heathrow. Et l’Allemande Versicherungskammer Bayern a même envisagé investir dans les abris pour réfugiés un peu plus tôt cette année.

LE NOUVEAU NORMAL

Finis, donc, les jours tranquilles passés à magasiner les obligations et les actions pépères. « Les régimes de retraite ont vraiment besoin de revenus à une époque où les rendements sont aussi bas, alors ils utilisent un très large filet », explique John Walbaum, d’Hymans Robertson, une firme qui conseille ces institutions.

Entre 1995 et 2015, l’investissement des plus gros régimes de retraite dans ce type d’actifs alternatifs a bondi de 5 % à 24 %, selon Willis Towers Watson. Tellement que ce qui était autrefois alternatif est devenu assez courant et pousse les fonds à rechercher de nouvelles occasions encore plus exotiques.

POURQUOI PAS LES SEX SHOPS?

À Amsterdam, c’est vers le sulfureux Red Light District que se tournent certains investisseurs. Depuis 2013, il y a là une panoplie de petits édifices abritant des bordels légaux, des sex shops et des cafés où l’on peut consommer de la marijuana, pour lequels on n’arrivait pas à trouver preneur.

Récemment, deux régimes de retraite en ont acquis une partie. Le premier représente les travailleurs agricoles néerlandais et le second les employés de Rabobank Groep. En juin, ils ont acheté une part de 35 % dans un portefeuille de 100 édifices, pour 60 millions d’euros (89,5 M $CAN). Si les termes du contrat interdisent l’utilisation de ces immeubles pour faire de la prostitution ou vendre de la drogue, ils n’interdisent pas les sex shops.

Boris van der Gijp, directeur pour Syntrus Achmea Real Estate & Finance, qui conseille ces deux régimes, admet que de tels investissements peuvent étonner. Mais il justifie le tout par l’ébullition du marché immobilier à Amsterdam, lequel offrait des retours sur investissement variant de 10 à 15 %.

C’est déjà mieux que les rendements négatifs de certaines obligations…

Les achats d’obligations par les banques centrales européennes font que l’équivalent de 4 billions de dollars américains (5,36 T $CAN) d’obligations offrent des rendement inférieurs à zéro. En Grande-Bretagne, cela se traduit par un manque à gagner de 1,3 billions de dollars américains (1,74 T $CAN) pour les régimes qui paient aux retraités un pourcentage de leur ancien salaire.

JOUER À LA LOTERIE

Pas étonnant qu’ils aient envie de jouer à la loterie. Lottoland, un site permettant de miser sur les tirages des plus grosses loteries au monde, incluant EuroMillions et MegaMillions, a récolté 100 M$ en 2015 auprès d’investisseurs pour s’assurer contre le paiement éventuel de fortes sommes aux parieurs chanceux. Ces investissements ont été renouvelés en août 2016, malgré le fait que les investisseurs aient dû casquer deux fois pour payer des gros lots.

Le bingo, quant à lui, n’attire plus seulement les retraités, il attire aussi ceux qui versent leur pension. M&G Investments, qui représente notamment le régime de retraite de l’Association médicale britannique, a acquis 52 clubs de bingo de Gala Leisure pour 173,5 M £ (291 M$), contre un retour net de 8,4 %.

Personne ne sait si le propriétaire de Gala Leisure a hurlé « Bingo! » en mettant la main sur ce magot…

La rédaction vous recommande :

La rédaction