Steve Forbes s’en prend aux politiques monétaires

Par Jean-François Parent | 22 septembre 2016 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Steve Forbes (Photo : Gage Skidmore)

Le gourou de la presse financière Steve Forbes a une dent contre la politique monétaire utilisée depuis une décennie pour tenter de relancer l’économie.

De passage à Montréal mardi comme invité d’honneur du Forum FinTech, il n’a pas mâché ses mots.

« Les politiques utilisées pour tenter de relancer l’économie ont failli à la tâche », a-t-il déclaré devant un parterre de quelque 300 entrepreneurs des technologies et du capital risque.

Citant les exemples des États-Unis, du Canada, de l’Europe, de Hong Kong, de la Chine et du Brésil, qui traversent tous une période creuse héritée du gel du crédit en 2008, il constate que ces tempêtes économiques provoquent plusieurs crises politiques.

« La xénophobie surgit partout et l’instabilité prend le dessus, comme on le voit en Angleterre avec l’épisode du Brexit », affirme-t-il.

Selon lui, les pouvoirs publics se montrent incapables d’affronter le problème. L’ennemi à abattre : la politique monétaire, notamment américaine, qui insiste sur la manipulation du dollar, pense Steve Forbes.

UNE MANIPULATION DANGEREUSE

Le gouvernement américain entretient l’idée qu’il faut que sa balance commerciale se solde par un surplus, selon le magnat de la presse. Et pour y arriver, le président Obama insiste notamment sur un affaiblissement du dollar afin de mousser les exportations, affirme-t-il.

« Ce n’est pas logique : un dollar fort fait davantage pour la croissance économique qu’un dollar affaibli », insiste Steve Forbes. Il cite l’exemple du prix du pétrole, qui demeure abordable lorsque l’économie profite d’un dollar fort.

« Dans les dernières années, lorsqu’on a maintenu le dollar à un bas niveau, le baril de pétrole a atteint des sommets. Au contraire, lorsqu’on soutient un dollar fort, comme c’est le cas actuellement, on se retrouve avec un baril de pétrole moins cher. »

Le prix du brut demeurant une variable importante dans la croissance économique, Steve Forbes est d’avis que de jouer sur la force du dollar (et donc sur les cours pétroliers) a de fâcheuses conséquences. Un baril à fort prix amène une pression à la baisse sur la croissance du PIB et cause ainsi un ralentissement économique, selon lui. Avec un dollar faible, les salaires n’augmentent pas, ni les investissements, ajoute-t-il.

Autre effet pervers d’une politique monétaire désastreuse, toujours selon Steve Forbes, c’est le recours à la planche à billets (la création monétaire) pour injecter de l’argent dans l’économie.

« L’assouplissement quantitatif, utilisé pour racheter des actifs toxiques, s’est traduit par une émission de dette sans précédent dans notre histoire », soutient-il.

Ces rachats ont été financés par de la dette, faisant en sorte que cette dette obligataire compose maintenant plus de la moitié des actifs, comparativement à 39 % avant la crise du crédit.

« C’est beaucoup trop, et surtout ça ne sert personne. Les PME par exemple ne peuvent pas se financer avec de la dette, elles doivent plutôt avoir accès à du capital ».

REDONNER SON LUSTRE À L’ARGENT

Pour lui, la solution serait de cesser d’instaurer des politiques monétaires « qui ne font rien pour stimuler la croissance ». D’où l’importance de renouer avec l’étalon-or, postule Steve Forbes. En théorie, l’étalon-or permet à la monnaie de mieux résister à l’expansion du crédit et de la dette, et l’État ne peut sortir la planche à billet pour stimuler son économie. Le crédit reste sain, croit le conférencier.

« Pendant les 150 années au cours desquelles les États-Unis ont utilisé l’or comme contrepartie au dollar, la croissance annualisée s’est établie aux alentours de 3 à 4 % », fait remarquer Steve Forbes.

Une des erreurs qui a conduit l’économie américaine au bord du gouffre, c’est de vouloir à tout prix attribuer une valeur intrinsèque à la monnaie, insiste Forbes. « Mais un dollar n’est qu’une unité de mesure. Le manipuler ne peut être qu’une erreur. »

Il donne l’exemple d’un pèse-personne, dont on ne se sert pas pour perdre du poids, seulement pour savoir combien de kilos il faut perdre.

« On ne s’en sortira pas tant qu’on ne redonnera pas de la vigueur à la monnaie, en en faisant une monnaie stable, exempte de manipulation. Et on y arrivera seulement en réinstaurant le système de l’étalon-or », martèle-t-il.

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Jean-François Parent