Le don d’actions d’un fonds constitué en société de série T à un FVAD

Par Karine Précourt | 3 octobre 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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C’est un fait connu, la culture philanthropique au Québec est moins développée que dans la majorité des autres provinces du Canada.

Plusieurs raisons peuvent l’expliquer :

Manque de liquidités

Appréhension d’une mauvaise utilisation des dons

Crainte d’être de plus en plus sollicité

Ne pas savoir à qui donner[1]

Les propriétaires de sociétés et les sociétés elles-mêmes pourraient surmonter la plupart de ces freins en faisant leur don à un fonds à vocation arrêtée par le donateur (FVAD). Les FVAD sont des fondations publiques constituées en société ou en fiducie reconnues par l’Agence du revenu du Canada (ARC) et créées exclusivement à des fins de bienfaisance. Ils offrent aux donateurs les mêmes avantages que les fondations privées (comme l’émission de reçus pour dons aux fins fiscales et la continuité du fonds après le décès du donateur), mais aussi certains autres tels que :

Court délai d’ouverture du compte

Aucun enregistrement du compte requis auprès de l’ARC

Réduction de la bureaucratie et faible coût d’administration

Économie de temps

Choix révocable des produits d’investissement et des donataires reconnus bénéficiaires

Conservation de l’actif sous la gestion de conseillers en services financiers et des donateurs

Les sociétés qui font un don d’actions d’un fonds constitué en société de série T peuvent bénéficier d’avantages fiscaux particulièrement intéressants. En vertu de l’alinéa 38 a.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR)[2], un don de titres admissibles (comme des actions d’un fonds constitué en société de série T) à un donataire reconnu (tel un FVAD) entraîne une disposition du titre à sa juste valeur marchande (JVM) au moment du don, mais le taux d’inclusion du gain en capital réalisé est nul.

Cette forme de don est particulièrement profitable lorsque le titre admissible montre un faible prix de base rajusté (PBR) et pourrait générer un gain en capital élevé à sa vente. Les avantages pour la société donatrice sont :

Un revenu périodique exonéré d’impôt pendant la période de détention des actions[3].

Un gain en capital réalisé au moment du don exonéré d’impôt. La totalité de ce gain est versée au compte de dividendes en capital (CDC)[4] et, selon le cas, transférée sans impôt aux actionnaires[5].

Une dépense d’opérations déductible du revenu équivalant à la JVM des actions au moment du don[6].

Au fédéral, le montant du don peut être reporté au cours des cinq années suivant l’année au cours de laquelle le don a été fait[7]. Au Québec, il peut être reporté au cours des vingt années suivant l’année du don[8].

L’avantage de donner des actions d’un fonds constitué en société de série T au lieu d’un autre titre admissible réside dans la possibilité de récupérer l’investissement initial sous forme de remboursement de capital pendant la période de détention.

Lorsque le capital n’est pas réinvesti, bien que cette récupération entraîne une diminution de la JVM totale des actions données et, du même coup, de la déduction fiscale pouvant être réclamée, cette forme de don reste intéressante pour les sociétés qui ont besoin de liquidités aujourd’hui, mais veulent faire un don fiscalement avantageux demain.

Le don d’actions d’un fonds constitué en société de série T par une société à un FVAD accorde les avantages fiscaux déjà mentionnés, une plus grande flexibilité, de même que des économies substantielles en temps d’administration et en honoraires professionnels.


[1] Statistique Canada, 89-652-X, Les dons de bienfaisance des particuliers, Tableau 8, Raisons des donateurs de ne pas avoir donné davantage, 2013. [2] LRC 1985 (5e suppl.) telle que modifiée. À moins d’indication contraire, toute référence à une disposition de la LIR dans le présent texte implique une référence à la disposition correspondante de la Loi sur les impôts (Québec) (LI), RLRQ, c I-3 telle que modifiée. [3] Le remboursement de capital (RDC) n’est pas imposable dans l’année du versement, mais réduit le PBR des actions. Lorsque ce dernier atteint zéro, les distributions additionnelles de RDC sont imposables à titre de gains en capital, puis le PBR est ramené à zéro. Voir : par. 40(3), al. 53(1)a) et (2)a) LIR. [4] Al. 89(1)a) « Compte de dividendes en capital » LIR. [5] Suivant les conditions du par. 83(2) LIR. En ne tenant pas compte de la réforme de la fiscalité des sociétés en cours. [6] Sous réserve du par. 110.1(1) LIR. [7] Id. [8] Art. 710 LI.

• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2017 de Conseiller.

Karine Précourt