Les PME québécoises ne manquent pas de ressources, mais d’ambition

Par Frédérique David | 26 novembre 2013 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Des solutions pour inciter les entrepreneurs québécois à mieux saisir les occasions qui se présentent à eux sur la scène internationale étaient dévoilées le 19 novembre dernier, lors d’un déjeuner conférence organisé par la firme KPMG-Secor. Cet événement était tenu dans le cadre du projet Focus Stratégique, lancé en 2010, qui regroupe la Banque de développement du Canada, Export Québec, Industrielle Alliance, Investissement Québec et le Mouvement Desjardins.

Afin de situer le Québec sur l’échiquier mondial, Focus Stratégique a comparé les exportations de la province à celles de sept régions références : la Colombie-Britannique, l’Ontario, le Massachusetts, le Minnesota, la région Rhône-Alpes (France), la Finlande et la Suède. Les exportations des entreprises québécoises, qui représentent 18 % du PIB de la province en biens et 7 % de son PIB en services, se sont avérées nettement inférieures à celles de la plupart de ces régions. « Notre propension à être actif à l’international est 50 % plus faible que dans l’ouest du Canada, a indiqué Daniel Denis, associé chez KPMG-Secor. La proportion des entreprises de petite et moyenne taille qui exportent est 2,5 fois moins élevée au Québec qu’en Suède ou dans la région Rhône-Alpes. »

Pour identifier les causes de cette faible performance des PME québécoises à l’international, Focus Stratégique a mené une enquête auprès de 3000 entrepreneurs québécois en mai 2013 et analysé les réponses provenant de 440 entreprises, dont la moitié détiennent un chiffre d’affaires inférieur à 1 million. Le 29 octobre dernier, plusieurs répondants étaient invités à participer à des ateliers afin d’identifier « les grandes orientations et les bonnes pratiques » qui permettront d’améliorer les performances des entreprises québécoises à l’étranger.

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Manque de ressources financières et concurrence L’insuffisance des ressources financières et la concurrence sur les marchés étrangers arrivent en tête des barrières que les dirigeants d’entreprises québécoises perçoivent à l’exportation. Cependant, Michel Bergeron, premier vice-président, Marketing et Affaires publiques de la BDC, ne partage pas l’avis des 33 % de répondants au sondage qui ont cité le manque de financement. « Quand on se compare à d’autres juridictions, nous sommes privilégiés en termes d’accès au financement, a-t-il déclaré lors du déjeuner conférence. L’entrepreneur a une responsabilité d’aller chercher l’information nécessaire. »

Alain Proulx, sous-ministre adjoint chez Export Québec, a d’ailleurs rappelé que le gouvernement québécois a récemment dévoilé un Plan pour le développement du commerce extérieur pour les trois prochaines années, assorti d’une enveloppe de 82 millions de dollars. « Il existe un crédit d’impôt à la diversification des marchés qui n’est pas connu », a-t-il ajouté.

Le sondage de Focus Stratégique révèle également que 78 % des entrepreneurs misent sur la qualité de leurs produits pour exporter. « Pensez-vous que Starbucks a attendu d’avoir le meilleur café au monde pour s’internationaliser? », illustre Aurélia Le Tareau, directrice chez KPMG-Secor, qui insiste du même souffle sur la nécessité de déboulonner le mythe du bon produit.

Pour pallier le manque de compétences identifié par certains entrepreneurs comme une barrière à l’exportation, Michel Bergeron suggère de développer des partenariats. « Le Québec compte de nombreux jeunes compétents qui sont multilingues, indique-t-il. Il est facile de se doter de ces compétences », ajoute-t-il en donnant l’exemple d’une entreprise de la Rive-Sud de Montréal qui est allée chercher l’aide de deux étudiants chinois au MBA de McGill pour développer ses affaires en Chine. Une meilleure intégration des immigrants au marché du travail figure également parmi les solutions à envisager afin de pallier le manque de compétences au sein des entreprises pour leur permettre d’exporter. Le nombre d’immigrants internationaux a franchi le seuil des 50 000 nouveaux arrivants par année au Québec, rappelle Daniel Denis. « Nous avons un haut niveau d’immigration, dit-il. Par contre, nous intégrons mal ces immigrants. »

Une culture à développer Les experts invités à s’exprimer sur le défi de la mondialisation des PME québécoises, lors du déjeuner conférence auquel participaient de nombreux dirigeants d’entreprises, croient que la culture est le principal facteur qui retarde l’éclosion du plein potentiel des PME du Québec à l’international. « Quand on parle de culture, on parle de la capacité que les dirigeants d’entreprises ont et se donnent pour aller à l’international. On parle de leur volonté, de leur ambition », explique Daniel Denis. « La barrière que les entreprises perçoivent est souvent imposée par les entreprises elles-mêmes, souligne Michel Bergeron. Le sondage réalisé par KPMG-Secor révèle d’ailleurs que 37 % des entrepreneurs se disent prêts à tenter l’aventure de l’internationalisation et ne manquent pas de ressources financières, mais semblent manquer d’ambition. » « Malgré tous les incitatifs, on voit encore beaucoup de résistance, conclut pour sa part Guy Langlois, associé-directeur de KPMG au Québec. Il faut encourager les entreprises québécoises à avoir de l’ambition. »

Orientations et bonnes pratiques

Pour trouver le financement, il faut :

  • Ne pas sous-estimer la capacité financière de l’entreprise
  • Mettre à profit la complémentarité des solutions de financement offertes
  • Bien s’informer auprès des institutions financières privées, publiques ou paragouvernementales sur les réalités du financement à l’étranger

Pour définir un modèle d’expansion, il faut :

  • Consulter des pairs, se faire épauler à l’externe
  • Adapter la stratégie de croissance aux régions ciblées
  • Garder à l’esprit que le choix d’un bon partenaire d’affaires est une condition du succès

Pour sélectionner un marché cible, on doit :

  • S’entourer de gens qui connaissent l’international et le marché cible
  • Développer une stratégie de commercialisation claire (plan marketing et plan de vente), avec des objectifs mesurables, à la fois ambitieux et réalistes.
  • Sélectionner le canal de distribution/modèle d’affaires approprié, selon la maturité de l’entreprise

Source : Focus Stratégique, Les secrets de l’internationalisation : d’un entrepreneur à l’autre

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Frédérique David