Révision de la loi 188 : le CDPSF dépose son mémoire à temps

Par Pierre-Alexandre Maltais | 1 octobre 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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lenetsnikolai / 123RF

Les parties qui désiraient remettre un mémoire dans le cadre de la révision de la Loi sur la distribution des produits et services financiers avaient jusqu’à hier pour déposer leurs documents. Du moins, c’est ce qui était prévu, puisque le ministère des Finances a fait savoir qu’il accepterait les mémoires jusqu’au début de la semaine prochaine.

« Il fallait indiquer une date limite [30 septembre], explique Jacques Delorme, responsable des relations médias au ministère des Finances. Mais, si on reçoit des mémoires au cours des prochains jours, même jusqu’au début de la semaine prochaine par exemple, on va les accepter, c’est sûr. »

L’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF) est l’un des organismes qui bénéficiera de ce délai. Son président Flavio Vani a dit vouloir remettre son mémoire au cours des prochains jours.

De son côté, la Chambre de la sécurité financière fignolait les derniers détails de son document hier après-midi, et a remis son propre mémoire tard en soirée. La présidente de la CSF, Marie Elaine Farley, s’adressera aux médias aujourd’hui. Rappelons que l’organisme de régulation est particulièrement touché par le projet de révision de la LDPSF, qui remet son existence même en cause.

Le Conseil des professionnels en services financiers (CDPSF) a quant à lui déposé son mémoire hier. Conseiller a pu y jeter un oeil avant sa publication. Voici donc les grandes lignes de ce document cosigné par plusieurs agents généraux majeurs de l’industrie.

RIEN NE PRESSE

Mario Grégoire

D’entrée de jeu, le président du CDPSF, Mario Grégoire, y va d’un plaidoyer senti contre la façon de faire du gouvernement. Il juge que « le tempo actuel de la réforme est trop empressé, à un moment où rien ne justifie l’urgence d’agir », peut-on lire dans le mémoire. Il souligne également son « inquiétude par rapport à certains passages du rapport » d’application de la loi 188.

Il demande d’ailleurs que le gouvernement mette sur pied immédiatement « un groupe de travail multipartite » qui serait chargé « d’étudier en profondeur l’avenir de l’encadrement de l’industrie des services financiers au Québec. »

Ce groupe de travail, qui inclurait idéalement le Cercle d’intégrité financière – sorte de regroupement d’acteurs de l’industrie créé le 9 septembre dernier –, produirait un rapport détaillé au ministre, en amont de toutes initiatives législatives concernant le projet de loi 188.

Les cosignataires du mémoire sont :

  • AFL Groupe Financier, Yan Charbonneau
  • BBA Groupe Financier, Benoit-Alexandre Gingras
  • BBA Groupe Financier, Pierre Morais
  • Financière S_entiel, Dominic Demers
  • Groupe Cloutier, Michel Kirouac
  • Groupe Cloutier, Patrick Cloutier
  • Groupe Financier, Boulos Roger Boulos
  • Groupe Financier Horizons, James McMahon
  • Groupe Financier Multi Courtage, Guy Duhaime
  • Groupe Financier Peak, Linda Cockburn
  • Groupe SFGT, Caroline Thibeault
  • Lafond Services financiers Inc., Robert Lafond
  • Les Agences d’assurance Copoloff inc., Rosario Loggia
  • MICA Cabinets de services financiers, Gino-Sébastian Savard
  • Planifax Inc., Daniel Bissonnette
  • Pro Vie Assurances, Christian Laroche
  • Pro Vie Assurances, Michel Lévesque
  • Union 2005, Serge Bouillon
Voici quelques extraits tirés du mémoire déposé par le CDPSF :

1. À PROPOS DE LA VENTE D’ASSURANCE PAR INTERNET

Le CDPSF s’oppose à la recommandation première du rapport d’application de la LDPSF, soit de « s’inspirer des recommandations du Conseil canadien des responsables de la réglementation d’assurance pour mettre en place un cadre législatif souple qui permettra aux assureurs d’offrir leurs produits par Internet ».

Les intermédiaires offrant de l’assurance de personne au Québec – qu’ils soient « agents généraux » ou représentants — soutiennent qu’il n’existe pas de produits simples en assurance de personne. Pour une « simple » police temporaire, de 10 ou 20 ans par exemple, des informations portant sur les conditions de renouvellement ou de remplacement de la police sont inaccessibles pour les consommateurs.

C’est ce que fait dire aux signataires de ce mémoire que, sans les conseils personnalisés d’un représentant certifié, le risque de souscrire un produit qui ne convient pas au consommateur est plus élevé, en raison du manque de connaissances de ce dernier.

2. À PROPOS DE LA DISTRIBUTION SANS REPRÉSENTANT

Nous avons plusieurs réserves quant à la deuxième recommandation du rapport, qui suggère de « mettre en place un cadre législatif pour la distribution sans représentant (DSR) qui s’appliquera directement aux assureurs qui devront veiller à ce que leurs mandataires (actuellement appelés des distributeurs) respectent les règles ».

Si le ministère des Finances et l’AMF veulent mettre les assureurs au pas, c’est qu’ils considèrent que certaines pratiques posent problème. Mais voilà qu’on demande à ces mêmes assureurs de surveiller eux-mêmes ces pratiques, ce qui nous semble audacieux.

La solution la plus équitable financièrement et offrant la meilleure protection du public réside dans l’intervention d’un représentant certifié. Ce dernier étant déjà soumis à une panoplie de mécanismes disciplinaires, le coût d’une telle mesure serait presque nul pour les consommateurs, les assureurs et les distributeurs.

3. À PROPOS DU FARDEAU RÉGLEMENTAIRE

Poser la question du rapport coûts-bénéfice quant à privilégier un autorégulateur plutôt qu’un autre, comme le laisse entrevoir le rapport d’application, nous apparaît comme une solution simpliste.

D’où la critique, fort légitime par ailleurs, qu’il faille se conformer à deux types de régulateurs : la Chambre de la sécurité financière au Québec, qui n’encadre que les représentants, et l’ACFM ailleurs au Canada, qui n’encadre que les cabinets.

C’est mal poser le problème, cependant. Tant l’AMF que la CSF démontrent avec brio que l’encadrement est de plus en plus efficace au Québec.

EN CONCLUSION?

Pour toutes les raisons élaborées dans le présent mémoire, le CDPSF demande au ministère des Finances de sursoir à la révision de la loi 188 telle que proposée dans le document de consultation de mai 2015, de nommer un comité d’experts auquel participerait le Cercle d’intégrité financière, et de rendre publiques les discussions entourant une éventuelle réforme de la loi 188.

Pierre-Alexandre Maltais