Le bonnet d’âne est décerné à…

16 octobre 2013 | Dernière mise à jour le 16 octobre 2013
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Réalisé grâce à Vanguard

3. Quelle sera l’incidence sur l’offre globale?

La commission se retrouve dans toutes les sphères du domaine financier et, virtuellement, pour tous les produits. Si on abolit le système de commission, ce devrait être pour l’ensemble des produits. Est-ce que ceci réduira l’offre?

Naturellement, on songe plus facilement aux produits d’investissement comme les fonds communs de placement (FCP). Il y a aussi les certificats de placement, les obligations d’épargne du Canada, les fonds distincts, la vie universelle ou les diverses formes de rentes. La Banque du Canada ne pourrait plus payer de commission comme elle le fait actuellement.

Le mode commission existe aussi pour les produits de crédit et ils sont nombreux : prêts hypothécaires, prêts personnels ou cartes de crédit, pour n’en nommer que quelques-uns.

Est-ce que l’institution financière offrira des produits de la concurrence si elle ne perçoit pas de commission lors de leur vente?

Même si la relation entre un fabricant de produits et un distributeur n’est qu’indirectement liée au client ultime, le fait de payer une commission pourrait, au même titre, biaiser l’offre.

On doit bien jauger tous ces aspects pour assurer disponibilité et équité.

Nous avons réservé les trois dernières pistes aux clients et aux organismes de réglementation.

4. Le fait de passer à un mode à honoraires provoquera-t-il une concurrence sur les prix?

Si c’est le cas, cela engendrerait potentiellement une baisse de qualité. C’est le risque que recèlent les honoraires. Tous les professionnels, à l’exception des pharmaciens, doivent détailler leurs honoraires, tarifs et temps de travail. Il s’avère parfaitement possible d’introduire cette notion… si tous les intervenants le font en même temps, même les employés salariés.

5. Comment seront transformés les devoirs subséquents?

Qu’adviendra-t-il des suivis et mises à niveau avec le client ? Aujourd’hui, nous sommes tenus de faire des suivis avec chaque client. Par exemple, nous devons réévaluer annuellement son aversion aux risques financiers.

Si le client décide de ne pas payer d’honoraires récurrents, l’intermédiaire ne devrait plus avoir ce devoir. Votre avocat et votre fiscaliste ne sont redevables que si des honoraires sont payés. Pourrait-on nous imposer, malgré tout, ce devoir de suivi si aucune rémunération n’est accordée? Assurément possible, mais pourquoi devrions-nous faire du bénévolat?

6. Quel sera l’effet pour le petit épargnant?

Ne sera-t-il pas pénalisé?

Illustrons la situation. Monsieur X, nouveau client, veut acquérir 1 000 $ de FCP. Dans la situation actuelle, il paiera des frais de 2,5 % dont 50 % reviendront à l’intermédiaire, soit environ 12,50 $. Par la suite, celui-ci recevra une commission de maintien.
Ouvrir un dossier requiert un minimum de temps. Admettons que ce travail dure 60 minutes. Quel serait l’impact des honoraires pour des clients acquérant pour 1 000 $ de parts de fonds? Considérons une rémunération de 75 $ de l’heure : si nous reprenons notre exemple, Monsieur X subirait une augmentation de 600 % de ses frais, qui s’élèveraient alors à 75,00 $ au lieu de 12,50 $ au moment de l’achat.

Rappelons ici que quand on établit la valeur des honoraires, on considère généralement que la rémunération finale est de 40 % du tarif, soit, dans ce cas, 30 $ l’heure.

Quelles solutions?

Il existe de nombreuses pistes de solutions qui se montrent acceptables pour tous. L’une de celles-ci, applicable à tous les produits à commission, viendrait standardiser l’élément de rémunération.

Une première mesure s’appliquerait par famille de produits (épargne, crédit hypothécaire, valeurs mobilières…), puis serait complétée par une disposition venant harmoniser les choix globaux (arbitrage entre les types de produits équivalents).

Une seconde mesure porterait sur la divulgation, commune à tous les intervenants, des éléments de rémunération, quelle que soit leur relation avec un distributeur ou un employeur. Le client pourrait ainsi comparer directement les frais entre les diverses possibilités.

Les chantiers à couvrir sont nombreux. Un tel train de mesures ne fera pas l’unanimité et le débat s’étirera.

Conclusion

Devons-nous revoir tous les systèmes de rémunération du secteur financier? S’il le faut, oui! Mais probablement pas.

Cependant, le législateur devra veiller à bien respecter chacune des parties : les clients, les intermédiaires et les institutions. Il devra également établir une « transparence transversale » (applicable à tous les intervenants et comparable) et veiller à ne pas complexifier un marché déjà hyper réglementé. Enfin, il devra créer un nouvel équilibre qui profitera aux petits comme aux grands investisseurs.

Posons les bonnes questions si nous voulons d’excellentes solutions durables et équitables. Sinon, le remède pourrait bien tuer le patient.


Michel Mailloux, MBA, Pl. Fin. www.deontologie.ca et www.canadianfinancialcompliance.ca.

À lire : Jamais sans mes commissions!