Lien$ familiaux – Si être parent m’était compté

Par Jean-François Venne | 3 janvier 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les responsabilités financières familiales ont un impact considérable sur la capacité d’épargner. Elles sont encadrées par des lois, qu’un conseiller en services financiers a intérêt à connaître pour bien guider ses clients.

On l’appelle la « génération sandwich ». Selon Statistique Canada, ils sont plus de 700 000 au pays. Ils ont entre 45 et 64 ans, et doivent composer avec la lourde tâche de s’occuper à la fois d’enfants encore à charge et d’un parent âgé. Des centaines de milliers d’autres individus vivent avec une seule de ces deux responsabilités financières. Obligation légale, dans le cas des enfants, et basée sur le sens des responsabilités, dans le cas des parents, explique Marie-Annik Walsh, associée au cabinet d’avocat Dunton Rainville et présidente de l’Association des avocats et avocates en droit familial du Québec.

« Les parents ont une obligation alimentaire à l’égard de leurs enfants, c’est-à-dire qu’ils doivent les nourrir et les entretenir, et ce, parfois au-delà de l’âge de 18 ans, s’ils sont aux études ou souffrent d’un handicap, explique l’avocate. Toutefois, il n’y a pas d’obligation légale de s’occuper de ses parents vieillissants, puisque toutes les parties de cette relation sont des adultes. »

On oublie souvent que cette obligation alimentaire est assortie de certaines règles quant au comportement de l’enfant envers les parents. « Si l’enfant majeur manque de gratitude envers les parents, ou a un comportement vraiment disgracieux envers eux, l’obligation alimentaire peut être remise en question », explique Me Walsh. Par exemple, une pension alimentaire à un enfant (majeur) peut être remise en cause si l’enfant est paresseux, souhaite obtenir cette pension pour satisfaire un caprice, a un comportement inacceptable envers le parent ou cohabite avec un(e) conjoint(e). Ce sont toutefois des cas très rares.

Par ailleurs, les dettes des parents ne se transmettent pas directement aux enfants lorsque les premiers décèdent. « On fait un inventaire de tous les actifs et passifs, et l’on n’accepte la succession que si le bilan est positif », ajoute-t-elle. De son côté, le ministère de la Justice du Québec conseille d’attendre la clôture de cet inventaire pour accepter ou refuser la succession, car cette décision est irrévocable. Or, il peut arriver que cet inventaire mette à jour des actifs inconnus ou, à l’inverse, des créanciers ignorés. On a six mois, à partir de la date du décès, pour signifier, par acte notarié, le refus d’une succession.

Gérer pour un autre

Les conseillers doivent savoir ce que la loi prescrit dans le cas d’un parent qui gère le patrimoine d’un mineur ou les actifs d’une personne vieillissante en perte d’autonomie. Il peut arriver qu’un enfant mineur se retrouve en possession d’une importante somme d’argent, par exemple en raison d’un héritage ou d’activités lucratives (pensez aux petits bouts de chou qui cumulent les publicités à la télévision ou les rôles au cinéma). Ce patrimoine sera géré par un tuteur légal, généralement sous la supervision d’un conseil de tutelle.

« Par exemple, dans le cas du décès d’un des deux parents, celui qui reste est considéré tuteur de l’enfant, explique Julie Delorme, notaire à Montréal. Toutefois, si l’enfant de moins de 18 ans hérite d’une somme de plus de 25 000 $, le curateur public exigera du tuteur qu’il en gèle une partie ou qu’il offre une garantie sur ses propres biens. Pour pouvoir l’administrer, le tuteur devra se soumettre au droit de regard de trois personnes, qui formeront un conseil de tutelle. Les décisions financières importantes devront être approuvées par ce dernier. » Toutes les décisions prises doivent l’être pour le bien actuel et futur de l’enfant. L’objectif principal étant de conserver son patrimoine et de le lui remettre lorsqu’il sera considéré adulte.

Dans cette situation, la prudence est de mise. « Le tuteur peut faire des placements, mais ils doivent présenter un niveau de risque très bas », explique Marie-Annik Walsh.

Dans le cas des parents vieillissants, il est fortement recommandé de prévoir ce qui se produira dans l’éventualité d’une perte de capacité de gérer ses actifs. « Une personne âgée peut choisir la personne qui va gérer ses biens en cas d’inaptitude totale diagnostiquée par un médecin, en rédigeant un mandat d’inaptitude, explique Julie Delorme. Ce mandat peut être notarié, ou simplement signé en présence de deux témoins. En l’absence d’un tel document, c’est une assemblée formée de membres de la famille qui choisira le curateur à la personne et aux biens, dans le cadre d’une procédure judiciaire. Un conseil de tutelle composé de trois personnes sera également formé. Le curateur devra présenter un rapport annuel au Curateur public et au conseil de tutelle. » Si personne ne peut prendre en charge la gestion des actifs, le curateur public le fait lui-même.

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Jean-François Venne