Cryptomonnaies : quelles sont mes obligations fiscales?

Par Alepin Gauthier Avocats inc. | 14 mars 2022 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
5 minutes de lecture

On entend de plus en plus parler des cryptomonnaies. Certains les qualifient même de « Monnaie du futur ». Si de plus en plus de gens en parlent et se renseignent à leur sujet, il n’est pas étonnant que les autorités fiscales s’y intéressent également.

Les cryptomonnaies ne sont pas des devises émises par la banque centrale d’un gouvernement. Elles peuvent être utilisées de différentes façons. Le site Web de Revenu Québec nous en donne cinq exemples :

  • La vente de monnaie virtuelle;
  • L’acquisition d’un bien en échange de monnaie virtuelle;
  • L’échange d’une monnaie virtuelle contre une autre;
  • Le minage de cryptomonnaie; et
  • La conversion de monnaie virtuelle en devise monétaire.

Dans une interprétation technique[1], l’Agence du Revenu du Canada (ARC) est d’avis que les opérations en monnaie virtuelle doivent être considérées comme du troc ou du commerce de contrepartie. Le troc est généralement défini comme étant un échange réciproque de biens et services sans contrepartie en argent. Pour les fins fiscales, les valeurs doivent être converties en dollars canadiens.

Le profit ou la perte résultant de l’aliénation des cryptomonnaies sera traité fiscalement soit comme un revenu ou une perte d’entreprise, soit comme un gain ou une perte en capital, le cas échéant. Naturellement, il s’agit d’une question de fait afin de déterminer s’il s’agit d’un revenu d’entreprise ou de gains en capital. Afin d’en déterminer plus aisément la nature, le bulletin d’interprétation technique IT-479R, Transactions de valeurs mobilières résume les critères qu’il faut prendre en considération pour établir si le contribuable exploite une entreprise de négociation de cryptomonnaies, ce qui engendrerait alors un revenu d’entreprise. Ainsi, il faudra, notamment, examiner :

  1. a) « Les répétitions de transactions semblables : un historique d’achats et de ventes intensif de valeurs mobilières ou de ventes rapides de biens;
  2. b) La période de détention : les titres sont habituellement détenus pour une courte période;
  3. c) La connaissance des marchés des valeurs mobilières : le contribuable a des connaissances ou de l’expérience de ces marchés;
  4. d) Si les transactions de valeurs mobilières font partie des activités habituelles du contribuable;
  5. e) Le temps consacré : le contribuable consacre une partie importante de son temps à l’étude du marché des valeurs mobilières et à la recherche d’achats éventuels;
  6. f) Le financement : les valeurs mobilières sont principalement achetées sur marge ou financées par un autre genre de dette;
  7. g) La publicité : le contribuable a annoncé ou a fait savoir autrement qu’il était prêt à acheter des valeurs mobilières, et
  8. h) dans le cas d’actions, leur nature : elles sont habituellement de nature spéculative ou ne produisent pas de dividendes. »

Depuis l’année d’imposition 2020, les particuliers, les fiducies et les sociétés doivent indiquer dans leurs déclarations de revenus du Québec s’ils ont reçu, vendu, cédé, échangé, donné ou autrement aliéné de la monnaie virtuelle.

Une fausse déclaration autorisera Revenu Québec à émettre de nouveaux avis de cotisations au-delà de la période normale de cotisation de trois ans et le cas échéant, des intérêts et pénalités pourraient être ajoutés aux impôts additionnels résultant des transactions en cryptomonnaies non déclarées. Pour sa part, l’ARC a publié récemment un document informant les contribuables de l’importance de déclarer tout revenu généré par les cryptomonnaies. Toutefois, les déclarations du fédéral ne contiennent pas une question similaire aux déclarations du Québec à savoir si une personne a effectué des transactions avec de la monnaie virtuelle.

Toute personne qui a omis de déclarer des revenus ou gains en capital tirés d’opérations en cryptomonnaies pourra régulariser sa situation fiscale en présentant une demande de divulgation volontaire auprès des autorités fiscales si cette dernière respecte par ailleurs toutes les conditions d’admissibilité relative au programme de divulgation volontaire.

Toutefois, la personne devra être en mesure de démontrer et justifier les transactions qu’elle aura effectuées au courant de l’année d’imposition, d’où l’importance de tenir un registre de toutes les opérations qu’elle aura effectuées en cryptomonnaies qui seraient acceptables aux yeux des autorités fiscales. Tous les documents et pièces justificatives devront être conservés pour une période minimale de six ans après la fin d’année à laquelle ils se rapportent.

Le 28 avril 2021, Revenu Québec a annoncé la mise en place d’un comité sur les cryptomonnaies regroupant plusieurs organismes publics. Avec la mise en place de ce comité, il faut s’attendre à des développements importants qui surviendront dans un avenir rapproché afin de s’assurer que les contribuables comprennent les incidences fiscales liées à l’utilisation des cryptomonnaies et que les revenus/profits soient correctement déclarés.

L’utilisation des cryptomonnaies est en forte progression à travers le monde et les autorités fiscales devront s’adapter rapidement pour faire face à cette nouvelle réalité afin de s’assurer que les contribuables se conforment à leurs obligations fiscales.

L’organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié en 2020 à l’intention des ministres des Finances et des gouverneurs de Banque Centrales du G20, un rapport sur l’implication fiscale des monnaies virtuelles pour les aider à améliorer leur politique fiscale en matière de monnaie virtuelle.

Me André Perron

Alepin Gauthier Avocats Inc.

 

Cette chronique contient de l’information juridique d’ordre général et ne devrait pas remplacer un conseil juridique auprès d’un avocat ou d’un notaire qui tiendra compte des particularités de votre situation.

[1] 2013-051401I7