Évitez les actions, disent trois experts

14 janvier 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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En conférence à l’Empire Club du Canada, trois experts ont indiqué que les investisseurs devraient favoriser les obligations et l’or au cours des prochains trimestres.

Dans un premier temps, Peter Gibson a brossé un portrait d’ensemble de la situation des taux d’intérêt aux États-Unis. Le directeur général de Marchés mondiaux CIBC estime que la Réserve fédérale (Fed) n’a guère le choix de les maintenir à de bas niveaux. Compte tenu de l’état de l’économie américaine, la Fed verra à ce que le rendement des bons du Trésor de 10 ans soit de moins de 4 %. Les taux d’intérêt, eux, ne devraient pas franchir la barre de 2 %.

Tant que les taux d’intérêt oscilleront à l’intérieur de cette fourchette, la Fed continuera d’appliquer une politique monétaire accommodante. Cela profitera au marché obligataire. Les entreprises et les consommateurs auront accès au crédit, ce qui stimulera l’investissement, a indiqué Peter Gibson.

Le hic, c’est que cette politique accommodante risque d’engendrer de l’inflation. Si les prix et les salaires se mettent à grimper de manière systématique, la Fed sera contrainte de remonter les taux d’intérêt. Les États-Unis pourraient alors connaître une nouvelle crise financière, car toute poussée des taux aura pour effet de freiner la reprise économique.

Si c’est ce qui se produit, que fera le gouvernement américain ? Il emploiera les mêmes mesures que celles qu’il a adoptées pour circonscrire la crise financière de 2007-2008 : importants allégements fiscaux, aide directe aux entreprises et assouplissement de la politique monétaire. « Le cycle reprendra, et l’on assistera à une autre hausse du rendement des obligations », a dit Peter Gibson.

Éviter les actions Pour sa part, David Rosenberg estime que les investisseurs devraient se méfier du marché boursier et opter pour des produits générateurs de revenu fixe. Les obligations offrent un meilleur rapport risque/rendement que les actions, a souligné l’économiste en chef de la maison Gluskin Sheff + Associates.

« Regardez le dernier sondage de la firme Barrons. Tout le monde n’en a que pour les actions. On semble ignorer l’or et les obligations de sociétés », a dit David Rosenberg. Il trouve « ironique » que la seule catégorie d’actifs qui suscite l’optimiste généralisée (les actions) soit celle qui ait vu sa valeur baisser au cours des dix dernières années. Au contraire, note le spécialiste, l’or et les obligations de société ont très bien tiré leur épingle du jeu durant cette période.

David Rosenberg souligne que l’indice S&P 500 est exagérément optimiste comme indicateur précurseur de la croissance économique. « La seule fois qu’il a bien anticipé la direction de l’économie, c’est lorsque les cours boursiers ont atteint leur creux de 2009 », a-t-il expliqué.

Actuellement, le S&P 500 annonce une croissance économique de 5 % aux États-Unis. Or, le consensus des experts se situe entre 2 % et 3 %, ce qui semble plus réaliste. Du côté des obligations, les cours reflètent une progression de 2,5 % de l’économie américaine. Du point de vue des investisseurs, le rapport risque/rendement favorise le placement dans les obligations, en déduit David Rosenberg.

Le spécialiste constate que les portefeuilles types sont actuellement surpondérés en actions, comparativement à leur contenu en produits à revenu fixe. Or, cela pourrait changer radicalement avec le vieillissement des baby boomers.

En effet, à mesure qu’ils prendront de l’âge, les baby-boomers auront besoin de produits financiers générateurs de revenus, non pas de croissance. Inexorablement, la demande pour ces instruments de placement ira croissant. Les investisseurs qui en auront déjà fait provision seront bien positionnés pour profiter de la hausse des prix, prévoit David Rosenberg.

Pleins feux sur l’or « En 2009, l’or a repris son rôle monétaire historique, celui d’être une non-devise. » Avec cette phrase-choc, Nick Barisheff, président de Bullion Management Group, a capté l’attention de son auditoire.

Il a expliqué que l’or n’est pas un métal comme les autres. « Son prix n’est pas uniquement tributaire des fluctuations de l’offre et de la demande, mais il est influencé par les questions complexes liées aux politiques monétaires mondiales », a indiqué Nick Barisheff.

En 2009, les achats d’or effectués dans un but d’investissement ont dépassé ceux faits par les joailliers et les orfèvres pour produire leurs bijoux. Pour la première fois en 20 ans, les banques centrales ont été des acheteurs du métal jaune. Avant, elles en vendaient.

Aux yeux de Nick Barisheff, ces deux phénomènes traduisent bien le sentiment de la communauté internationale à l’égard de l’or. La dernière crise financière a mis en évidence un point faible des devises : les États peuvent imprimer des billets tant qu’ils peuvent, même si cela entraîne d’importantes fluctuations dans les cours et stimule l’inflation.

Pour contrebalancer ces inconvénients, que font les gouvernements et les investisseurs institutionnels ? Ils achètent de l’or, et à un rythme tel que le prix du métal jaune pourrait atteindre 5 000 $US l’once, croit Nick Barisheff. « Si les caisses de retraite et les fonds de couverture convertissent seulement 5 % de leurs actifs en or, nous dépasserons certainement ce sommet », conclut-il.