À surveiller en 2011 : les tendances de l’économie et de la retraite

Par Peter Drake | 12 janvier 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Peter Drake

Ce début d’année est propice aux projections visant l’évolution de certains aspects propres à l’économie et aux marchés des capitaux ainsi qu’à divers éléments qui auront un impact sur les régimes de retraite des Canadiens dans les années à venir. Ensemble, ces facteurs permettront d’analyser plus en profondeur les perspectives de l’économie de la retraite en 2011.

Voyons d’abord l’économie et les marchés des capitaux Certaines grandes tendances qui ont marqué l’année 2010 se poursuivront en 2011. Nous savons par expérience que ces dernières subiront des revirements inattendus et que nous devrons inévitablement faire face à des événements imprévisibles, inexistants en 2010.

À l’aube de cette nouvelle année, tous les regards demeurent tournés vers le déficit public et la crise de l’endettement qui sévissent en Europe. Le progrès – ou l’absence de progrès – des gouvernements qui luttent pour hausser les revenus fiscaux et réduire les dépenses, tiendra un rôle majeur dans cette histoire. Cependant, il existe deux autres volets tout aussi importants, à commencer par la mesure dans laquelle les 16 gouvernements européens qui forment l’Union économique et monétaire parviendront à établir de façon concertée les règlements et pénalités qui s’appliqueront à la gestion individuelle du budget de chaque État. Certes, les embûches ne manqueront pas, mais cette initiative permettra d’assurer la viabilité économique future de l’UEM. Au cœur même du sujet – c’est-à-dire l’aspect qui pourrait bien déterminer les mesures supplémentaires essentielles au renflouement des pays en difficulté – sera le jugement posé par les marchés financiers, principalement obligataires, sur les améliorations apportées en vue de résoudre les problèmes. Il est clair que les opérations de sauvetage financier destinées à secourir la Grèce et l’Irlande en 2010 sont majoritairement attribuables au fait que les marchés des obligations doutaient de la capacité des dirigeants de ces pays à se tirer eux-mêmes d’affaire.

La reprise et la politique économiques, aux États-Unis, constituent la seconde tendance qu’il faudra suivre de près. L’optimisme face au maintien de la reprise s’est accru par rapport aux derniers mois, et pour cause! En effet, les consommateurs ont continué de contribuer à la croissance économique et devraient y participer davantage en 2011, surtout si les modestes progrès observés dans le secteur de l’emploi se poursuivent – et, avec un peu de chance, se renforcent – en 2011. Les entreprises américaines ont investi dans les biens d’équipement et devraient augmenter la cadence. Néanmoins, tout n’est pas rose, puisque le marché de l’habitation suscite toujours de l’inquiétude. Même si les prix des maisons se sont stabilisés depuis leur chute vertigineuse entre 2006 et 2008, les résultats publiés à la fin de l’année dénotaient de légères baisses comparativement à l’automne de 2009.

En ce qui concerne la politique économique, la principale préoccupation aura trait au progrès réalisé dans l’établissement d’un plan à long terme et crédible en vue de diminuer le déficit budgétaire fédéral des États-Unis. Un deuxième problème – récemment annoncé dans le cadre du programme économique de l’Administration – vise le plan destiné à contrecarrer l’augmentation de l’inégalité des revenus parmi les Américains. Si la résolution de cette question ne semble pas revêtir un grand intérêt pour les investisseurs, elle permet pourtant d’assurer la solidité des piliers économiques et de rendre ainsi l’investissement aux États-Unis intéressant. Ces deux aspects constituent des politiques à long terme et nous ne devrions pas nous attendre à grand-chose à moyen terme, bien que les marchés pourraient réagir assez favorablement à un plan de diminution sérieux du déficit budgétaire.

La croissance économique et l’inflation dans les pays émergents d’Amérique latine et d’Asie représentent la troisième tendance à surveiller étroitement. Les défis que pose la politique économique de ces régions sont bien différents de ceux que connaissent l’Europe et les États-Unis. Conséquence d’une vigoureuse croissance économique, l’inflation est particulièrement problématique en Asie. Toutes deux aux prises avec la hausse généralisée et continue des prix, l’Inde et la Chine ont décidé de contrer l’inflation en augmentant les taux d’intérêt et en freinant un tant soit peu les prêts bancaires.

Il ne s’agit pas exclusivement d’un problème interne propre à l’Asie. Le contrôle de l’inflation n’est pas seulement crucial pour la santé des pays directement touchés par cette dernière mais aussi pour tous ceux qui, ailleurs dans le monde, souhaitent exporter leurs produits vers ces marchés en expansion rapide.

Abordons maintenant les changements potentiels en matière de retraite. La politique publique fait l’objet de débats à l’heure actuelle. Les administrations publiques, les groupes de réflexion et les universitaires ont discuté pendant plusieurs années de politiques de retraite, mais jusqu’à présent, ces débats sont restés stériles plus souvent qu’autrement. Le grand problème, c’est que trop peu de travailleurs canadiens – soit à peine quatre sur dix – participent à un régime de retraite d’employeur. En deux mots, les gouvernements ont hâte de combler cet écart. Au cours de la réunion des ministres des Finances fédéral et provinciaux qui s’est tenue en décembre 2010, M. Flaherty, ministre des Finances du Canada, a proposé la création de régimes de pension agréés collectifs (RPAC) qui seraient administrés par des institutions financières du secteur privé. Avant la rencontre, cette idée était perçue comme une solution de remplacement à une majoration du Régime de pensions du Canada (RPC), tandis qu’après, il semblait bien que les RPAC avaient passé la rampe. Le projet de recourir à une hausse des cotisations au RPC n’est pas nécessairement mort, mais on propose d’en approfondir l’étude et de présenter un rapport sur le sujet lors de la rencontre des ministres des Finances en juin 2011.

Même si les détails concernant ces propositions étaient encore à l’état embryonnaire au moment de la rédaction du présent article, nous avons pu cerner quelques-uns de leurs aspects essentiels. Dans l’ensemble, les placements et l’administration des nouveaux régimes de retraite seraient confiés à des « institutions financières réglementées qui sont capables de remplir un rôle fiduciaire ». D’après un communiqué du Ministère des Finances, il s’agirait de compagnies d’assurance, de sociétés de fiducie et d’autres institutions financières ayant une filiale de fiducie.

Selon les décideurs en matière de retraite du Canada, cette proposition permet d’atteindre plusieurs objectifs, à savoir : 1) Alors que dans un des deux régimes proposés, l’employeur est appelé à s’acquitter de certaines tâches administratives, à recueillir les cotisations de ses employés et, potentiellement, à verser lui-même des cotisations, les travailleurs auront la possibilité de recourir à un second régime et d’y adhérer en tant qu’employé ne bénéficiant pas de régime d’employeur ou à titre de travailleur indépendant. Cette proposition a l’avantage de permettre à des travailleurs indépendants de participer à un régime et libère les employeurs – notamment les PME – de la responsabilité de promouvoir et de gérer un régime, choses que certains d’entre eux veulent éviter. Un autre élément favorisant la participation est l’intention apparente de demander une disposition spécifique permettant aux employés ne voulant pas adhérer au régime de s’en retirer. 2) Les décideurs considèrent vraisemblablement les RPAC comme un moyen de contenir le risque et les coûts. 3) Le fait de confier l’administration de ces régimes à des institutions financières du secteur privé (probablement sous la supervision plus ou moins étroite de l’État) laisse présager un allégement de la bureaucratie et des dépenses gouvernementales, contrairement au recours à un système public. Tout gouvernement soucieux de renouer avec l’équilibre budgétaire aurait considéré ce point. 4) Il est manifestement plus facile de rallier les provinces autour de la mise sur pied d’un régime du secteur privé que sur l’accroissement des cotisations au Régime de pensions du Canada.

La relance des débats sur la manière d’épargner en vue de la retraite correspondra sans doute au deuxième thème s’articulant autour de la retraite – partiellement en raison des discussions soulevées par les RPAC. En d’autres termes, les clients devraient-ils d’abord penser à remplacer les niveaux de revenus dont ils disposaient avant leur retraite, se concentrer uniquement sur les dépenses prévues ou adopter une approche totalement différente, si elle existe? Une partie des arguments reposera sur des préceptes tels que ceux-ci : existe-t-il des règles simples et universelles ou la situation de chaque client est-elle unique? Je vous en parlerai dans un prochain article, m’attardant sur les facteurs spécifiques que j’ai mentionnés ci-dessus et à la question visant à savoir si l’industrie se doit d’être hautement normative dans ses conseils – faites ceci indépendamment de votre situation – ou pleinement consciente de l’unicité de chaque client.

À mon avis, le revenu de retraite constituera le troisième domaine de discussion. Quoique le souvenir de l’énorme correction du marché s’estompe de plus en plus chez certains clients, il demeure très vif chez d’autres. Récemment, Fidelity a mis à jour sa recherche inédite sur les cinq risques clés qui guettent le revenu de retraite. Au cours des prochains mois, je vous entretiendrai de ce que nous avons découvert, en particulier, de ce qui a changé à la suite de la crise financière et de la récession économique survenues à l’échelle mondiale et de ce qui est resté pareil.

Prises dans leur ensemble, toutes ces tendances laissent présager une année fort occupée pour les spécialistes en placements. Je me réjouis à l’idée de reprendre ma chronique mensuelle afin de vous faire part des perspectives ayant trait à chacune de ces questions importantes et de vous aider ainsi à renseigner vos clients pour qu’ils comprennent l’économie de la retraite en 2011.

Peter Drake est vice-président, Retraite et recherches économiques, auprès de Fidelity Investments Canada. Fort de plus de 35 années d’expérience à titre d’économiste, il dirige les initiatives de recherche de Fidelity axées sur la retraite au Canada à notre époque.

Toute opinion exprimée sur une société, un titre, une industrie ou un secteur du marché en particulier représente un point de vue personnel à un moment donné et ne constitue pas nécessairement celui de Fidelity ou d’une autre personne au sein de l’organisation. Ces opinions sont appelées à changer à tout moment en fonction de l’évolution des marchés et des autres facteurs, et Fidelity décline toute responsabilité en ce qui a trait à la mise à jour de ces points de vue. Ces points de vue ne peuvent pas être considérés comme un conseil en placement.


Peter Drake est vice-président, Retraite et recherches économiques, Fidelity Investments Canada. Fort de plus de 35 années d’expérience à titre d’économiste, il dirige les initiatives de recherche de Fidelity axées sur la retraite au Canada à notre époque.

Les opinions exprimées sur une société, un titre, une industrie ou un secteur du marché en particulier représentent un point de vue personnel à un moment donné et ne constituent pas nécessairement celles de Fidelity ou d’autres personnes au sein de l’organisation. Ces opinions sont appelées à changer à tout moment en fonction de l’évolution des marchés et des autres facteurs, et Fidelity décline toute responsabilité en ce qui a trait à la mise à jour de ces points de vue. Ces opinions ne peuvent pas être considérées comme des conseils en placement fiables.

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