Bien gérer une caisse de retraite : l’ICRA à la rescousse

Par Pierre Saint-Laurent | 20 mai 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le lundi 17 mai avait lieu à Montréal la première de plusieurs journées régionales de formation de l’ICRA nommées Les régimes de retraite : Niveau avancé. L’objectif visé était de proposer aux participants, membres de comités de retraite pour la plupart, l’occasion d’une mise à jour sur les plus récentes approches et questions pertinentes à la régie et la gestion de régimes de retraite.

En quatre modules, la formation a démarré avec un exposé de Me François Turgeon (Morneau Sobeco) portant sur la responsabilité des membres de comités de retraite. Me Turgeon a su convaincre son auditoire que cette responsabilité est bien réelle, somme toute bien balisée par la Loi sur les régimes complémentaires de retraite (Loi RCR), le Code civil et d’autres statuts, et que cette responsabilité doit être gérée par les membres de comités. La Loi 30 est bien sûr venue changer plusieurs éléments de cette responsabilité et Me Turgeon a été clair sur les conséquences pratiques de ces changements, tant en termes d’interprétation des statuts que de saines pratiques à la lumière de ces changements. Les participants ont pu apprendre les points à surveiller plus particulièrement pour effectuer cette gestion, comme par exemple la présomption de prudence du comité de retraite en cas d’action de bonne foi sur l’avis d’un expert ou la bonne gestion des conflits d’intérêt.

La gouvernance des comités de retraite Me Louis-Georges Mongeau (Standard Life), a ensuite éclairé les participants sur la question importante de la gouvernance des comités de retraite. Mot large s’il en est, Me Mongeau a justement réussi à cerner les enjeux pratiques de gouvernance qui affectent les comités de retraite. Il a particulièrement insisté sur la question de la création de règlements intérieurs des comités, les politiques de production et de conservation de documents ainsi que la sélection de fournisseurs dans les règles de l’art. Comme le dit Me Mongeau lui-même, « pas de documents, pas de défense! » : la gestion des documentations émanant des activités du comité de retraite est essentielle à une bonne gouvernance, reconnue par les autorités réglementaires ainsi que les tribunaux le cas échéant.

Le troisième module était présenté par l’actuaire Patrick DeRoy (UBS Canada). Traitant du compromis entre risques et rendement, M. DeRoy a su efficacement vulgariser des questions complexes de gestion de portefeuille et de risques pour montrer que c’est la gestion du surplus de la caisse, non la gestion des actifs de celle-ci, qui doit préoccuper les membres du comité de retraite. En d’autres mots, c’est la gestion du désappariement entre actif et passif qui doit constituer la priorité en matière de gestion de placements. Pour ce faire, Il a exposé la notion de budget de risque et a proposé de regarder les niveaux de risque obtenus des composantes du portefeuille (actions, obligations, placements alternatifs) en fonction de leurs rendements respectifs.

Par des analyses d’attribution de rendements et de risque entre ces catégories d’actif, mis en parallèle avec le passif de la caisse, il a su convaincre que certaines de ces catégories d’actif rémunèrent mal ou peu le risque encouru. La conséquence en est qu’il est possible de modifier le portefeuille afin d’en maintenir la performance de placement tout en en atténuant le risque. C’est donc un changement de mentalité que M. DeRoy propose aux responsables de caisses de retraite : il faut repenser la relation rendement-risque à la lumière des instruments financiers disponibles, surtout lorsque cette nouvelle relation entre l’actif et la passif d’une caisse permet d’améliorer l’atteinte des objectifs visés. Surtout, M. DeRoy a été convaincant en proposant un cas pratique et réel de caisse de retraite, produisant une discussion animée parmi le groupe.

Des cas pratiques de jurisprudence Enfin, Me Josée Dumoulin (Lavery) a clos la journée de formation de belle façon, en montrant plusieurs cas pratiques de jurisprudence pertinents à la gestion de comités de retraite. Entre autres, elle a touché a des questions telles que l’identité des bénéficiaires de rentes, les pénalités encourues pour documentation erronée, les calculs fautifs de montants de rentes, les situations de divorce et d’attribution des droits ainsi que la diligence raisonnable et le devoir de supervision. Elle a conclu avec un exposé de recours pendants, touchant à la responsabilité des membres de comités de retraite, celle de consultants ainsi que celle des employeurs. L’approche pratique de Me Dumoulin, basée sur des cas bien réels, a su rejoindre son auditoire, qui dans plusieurs instances a constaté qu’il faisait face à des défis semblables à ceux exposés.

Par la mise en place de ces journées de formation bien ciblées et au contenu dense et pertinent, l’ICRA contribue significativement à la mise à jour des membres de comités de retraite et permet efficacement, en l’espace d’une journée, de comprendre des enjeux qui importent. Ces journées de formation se transporteront à tour de rôle à Saguenay et à Québec dans un avenir rapproché.

Pierre Saint-Laurent, CFA, CAIA, FRM, est président d’ActifConseil inc. et attaché d’enseignement en Finance à HEC Montréal. PSL@ActifConseil.com

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