Ce que la blockchain pourrait changer dans l’industrie

Par Nathalie Côté | 17 avril 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Monsit Jangariyawong / 123RF

Surtout connue pour avoir donné naissance au bitcoin, la blockchain pourrait avoir d’autres applications dans le domaine financier. Jonathan Hamel, fondateur de l’Académie Bitcoin, en a donné un aperçu dans le cadre de l’évènement Insurtech QC vendredi dernier.

QU’EST-CE QUE LA BLOCKCHAIN?

La blockchain (chaîne de blocs) est un registre informatique réparti dans des ordinateurs partout sur la planète. « Une des particularités importantes, c’est que les transactions inscrites au registre sont horodatées, explique M. Hamel. Elles sont aussi signées cryptographiquement. Les transactions enregistrées sont immuables, on ne peut pas les modifier. Il y a aussi des spécificités aux blockchains publiques comme bitcoin et ethereum. »

Un autre avantage de taille : la sécurité. « Pirater une clé privée représenterait un travail astronomique de milliards d’ordinateurs pendant des milliards d’années pour tenter toutes les combinaisons potentielles. Vous avez plus de chance de trouver la combinaison gagnante du 6/49 neuf fois d’affilée que de trouver une seule clé privée sur le réseau bitcoin », illustre M. Hamel.

QUELLES APPLICATIONS DANS LE DOMAINE FINANCIER?

Voici quelques pistes d’applications potentielles pour la blockchain dans le domaine financier.

  • Éviter la compensation des échanges. « Actuellement, quand vous échangez un produit financier, il y a tout un mécanisme de compensation derrière qui s’enclenche, explique M. Hamel. Récemment, on est passé de trois à deux jours pour la compensation. Dans le futur, ce pourrait être fait de manière quasiment instantanée grâce à une technologie semblable. On enlève l’intermédiaire pour que les parties puissent échanger directement. »
  • Faciliter les mouvements de valeurs. « Imaginez ce que ça prendrait pour transférer 5 M$. Si vous vous présentez au comptoir de votre institution financière pour ça, je pense qu’on va vous dire de voir le gérant et d’attendre un petit peu, indique M. Hamel. Avec une technologie comme le bitcoin, ça peut être fait presque en temps réel. »
  • Créer des contrats intelligents. « C’est un terme un peu trompeur, car ce n’est ni un contrat ni intelligent, souligne M. Hamel. En fait, c’est un script, soit une recette qui va exécuter un acte après avoir été déclenché par un événement quelconque. Des conditions sont préprogrammées. Par exemple, ce pourrait être qu’advenant un évènement particulier sur les marchés, si je reçois une quantité de cryptomonnaie, elle sera séparée entre deux personnes. »
  • Fournir des preuves d’activité. « Ça peut être intéressant pour prouver à l’assureur vie que j’ai une certaine capacité physique, avance M. Hamel. On pourrait le faire avec une application de captage biométrique et la police pourrait être ajustée en fonction de mon état de santé. Si je me laisse aller pendant des mois, ça aurait une incidence sur ma prime, par exemple. »
  • Fournir des preuves de localisation. « La blockchain peut permettre de prouver où j’étais et à quel moment, indique M. Hamel. Cela peut être fait avec une combinaison de preuves cryptographiques et un captage de données GPS. Ma prime d’assurance voyage pour affaires, par exemple, pourrait varier selon que je sois à Longueuil ou en République démocratique du Congo, parce que le risque n’est pas le même. »
  • Fournir une preuve de création de documents. La blockchain permet de dire qui a créé un document, à quel moment et à quel endroit. « Plusieurs des transactions que les notaires effectuent tous les jours pourraient être automatisées », illustre M. Hamel.

QUELLES SONT LES LIMITES?

Pour l’instant, la reconnaissance légale des enregistrements blockchain n’est pas encore acquise. « C’est en train de se faire de fil en aiguille », note M. Hamel.

Il y a aussi des risques techniques. « Les avancées de l’informatique quantique sont une menace pour la cryptographie, avance M. Hamel. Il sera alors possible d’effectuer des calculs des dizaines, voire des milliers de fois plus rapidement que maintenant. La cryptographie actuelle est donc un peu à risque, mais il commence à y avoir des modèles qui pourraient résister à l’informatique quantique. »

Le nombre limité de transactions possibles et les possibilités de failles informatiques sont aussi des risques.

QUAND VERRONS-NOUS CES INNOVATIONS ARRIVER?

Difficile de dire quand et comment de telles innovations ou d’autres nouveautés pourraient faire leur place concrètement dans le domaine financier. « Pour les technologies de blockchain publiques, nous sommes comme en 1994 en années Internet, illustre M. Hamel. C’est difficile de voir comment cela va évoluer dans les 10, 15 ou 20 prochaines années. »

Nathalie Côté