Délits d’initiés : la cour rejette une demande d’appel de l’AMF

Par La rédaction | 5 juin 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’AMF poursuit deux représentants

Déboutée par le tribunal dans une affaire de délits d’initiés, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a récemment subi un nouveau revers alors que la justice a rejeté sa demande d’appel, a-t-elle annoncé vendredi dans un communiqué.

Par ce jugement, rendu en novembre dernier, la Cour d’appel du Québec refuse que soit revue une décision rendue en octobre 2014 par le Bureau de décision et de révision (BDR, devenu aujourd’hui le Tribunal administratif des marchés financiers).

En juin 2012, l’Autorité a demandé au Bureau l’imposition de pénalités administratives à l’encontre de Daniel Pharand, Jacques Gagnon*, Éric Dupont*, Louis Paquet et Louise Blais* ainsi que du Fonds d’intervention économique régional (FIER) Cap Diamant.

PAS DE PREUVES SUFFISANTES

Les procédures entamées concernaient des transactions boursières effectuées entre le 29 avril et le 6 juin 2008 sur des titres de la firme Arura Pharma par son ex-président, Daniel Pharand, ainsi que Jacques Gagnon et le FIER, actionnaire d’Arura. L’Autorité alléguait qu’ils avaient effectué ces transactions alors qu’ils détenaient « une information inconnue du public » à propos de l’ampleur des difficultés financières que vivait alors la compagnie. Au moment des faits, Éric Dupont et Louis Paquet étaient membres du comité de placement du FIER Cap Diamant, tandis que Louise Blais en était la vice-présidente.

Dans sa décision d’octobre 2014, le BDR a conclu que la preuve circonstancielle présentée par l’Autorité n’était pas suffisante pour déterminer que les intimés Éric Dupont, Louis Paquet, Louise Blais et le FIER avaient disposé d’informations privilégiées et avaient négocié en fonction de celles-ci. Il a au contraire jugé que les intimés avaient « témoigné de manière franche » et que « leurs réponses [étaient] parfaitement cohérentes avec la réalité d’un fonds qui se spécialise dans le financement des petites entreprises ».

« Tout le monde conviendra que le délit d’initié est une contravention grave à la législation en matière de valeurs mobilières. Les conséquences d’une poursuite ou d’une condamnation sont tout aussi graves. Il signifiera souvent la fin de la carrière pour un PDG ou une personne dans l’industrie des valeurs mobilières. C’est pourquoi la preuve prépondérante doit être convaincante. Or, [l’AMF] n’a pas fait cette preuve prépondérante et convaincante à l’égard des intimés », a affirmé le BDR.

« LOIN DU DÉLIT D’INITIÉ TRADITIONNEL »

« Il est utile de mentionner que, dans le présent dossier, on est loin du concept du délit d’initié traditionnel comme on l’imagine souvent, à savoir à titre d’exemple un fonds de couverture qui utilise de l’information obtenue d’une banque d’investissement pour acheter des options d’achat afin de réaliser un profit maximal dans le cadre d’une offre publique d’achat », soulignait-il par ailleurs, ajoutant que « l’étude des faits laisse au tribunal l’impression que les agissements des intimés ne sont pas en correspondance avec ce que l’Autorité conclut à leur égard ».

À l’époque, le Bureau avait néanmoins conclu au délit d’initiés en ce qui concerne Daniel Pharand et Jacques Gagnon, qui avaient admis les faits en litige. Ceux-ci avaient été condamnés à payer respectivement 5 000 et 20 000 dollars. Tant l’Autorité que Daniel Pharand avaient interjeté appel de cette décision.

La Cour du Québec a toutefois confirmé en septembre 2016 les conclusions du Bureau, qu’elle trouve raisonnables. « L’AMF n’a pas démontré que les conclusions factuelles de la majorité [des membres du BDR] ne trouvent pas d’assises dans la preuve ».

L’Autorité et Daniel Pharand se sont alors adressés à la Cour d’appel pour obtenir la permission d’en appeler de ce jugement de la Cour du Québec. Cette nouvelle requête est refusée à l’AMF en novembre 2016. Toutefois, puisque le BDR a conclu à l’absence d’informations privilégiées envers les autres intimés dans ce dossier, le juge a accueilli l’appel de Daniel Pharand et renversé la décision du Bureau.


*L’AMF souligne qu’il ne faut pas confondre l’intimé Jacques Gagnon avec Jacques Gagnon, détenteur du certificat 113392 en assurance de dommages (courtier) et rattaché au cabinet Hub International Québec. De même, Éric Dupont ne doit pas être confondu avec son homonyme détenteur du certificat 135119 et exerçant comme représentant de courtier en placement et en dérivés chez Valeurs mobilières Desjardins. Enfin, l’intimée Louise Blais ne doit pas être prise pour Louise Blais, détentrice du certificat 103410, représentante de courtier en épargne collective auprès de Desjardins Cabinet de services financiers.

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