Investir dans les produits dérivés n’est pas un péché

Par La rédaction | 25 juillet 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : Elnur Amikishiyev /123rf

L’un des organismes de régulation des marchés aux États-Unis défend l’utilité des produits financiers dits dérivés, après que ceux-ci ont fait l’objet de violentes critiques de la part du Vatican, rapporte l’Agence France-Presse.

Dans une lettre envoyée la semaine dernière à la Congrégation pour la doctrine de la foi et au dicastère pour le service du développement humain intégral, Christopher Giancarlo, le président de l’autorité de régulation des marchés à terme et des produits dérivés aux États-Unis (Commodity Futures Trading Commission, CFTC), et Bruce Tuckman, économiste en chef de l’organisme, tentent de justifier l’existence de ce type de produits.

« Nous vous écrivons en tant que professionnels de la finance qui tentent de mener une vie respectueuse des principes de la morale », écrit notamment l’un des deux auteurs de la missive, Christopher Giancarlo, qui se décrit comme étant un « catholique pratiquant ».

DÉFENSE DES PRODUITS DÉRIVÉS

S’ils indiquent que les récents commentaires critiques du Vatican sur le fonctionnement actuel de la finance mondiale sont « importants et sensibles » à leurs yeux, les deux dirigeants affirment aussi « se sentir obligés de répondre et de défendre les produits dérivés ». Et en particulier les credit default swaps (CDS) qui, selon eux, représentent une assurance en cas de faillite d’un pays ou d’une compagnie.

Dans leur lettre, les deux dirigeants de la CFTC évoquent également « l’utilité sociale » des produits dérivés, qui, expliquent-ils, permettraient par exemple à un agriculteur d’établir à l’avance le prix auquel il vendra sa récolte à la fin de la saison. En outre, ils « aident à stabiliser le prix des matières premières et des taux d’intérêt au niveau mondial d’une façon qui profite particulièrement aux plus pauvres », soutiennent les dirigeants de la CFTC.

Quant aux CDS, fustigés par le Vatican qui les accuse d’inciter certains gros investisseurs à parier sur la misère d’autrui, ils « permettent de générer des renseignements précieux sur la situation financière [d’une entité] par rapport au reste de l’économie », estiment Christopher Giancarlo et Bruce Tuckman.

UN SYSTÈME JUGÉ « AMORAL »

Ces derniers reconnaissent néanmoins que les produits dérivés les plus complexes, notamment ceux qui ont entraîné la crise financière de 2007-2008, posent problème. Et ils concluent leur plaidoyer en assurant faire tout leur possible pour « contrôler les marchés des CDS et tous les autres marchés de produits dérivés » en vue de « faire avancer la liberté, la vérité et la justice ».

En mai dernier, la Congrégation pour la doctrine de la foi et le Dicastère pour le service du développement humain intégral, créé par le pape François, avaient publié conjointement un rapport de 18 pages qui dressait un constat accablant de la planète finance. Intitulé Considérations pour un discernement éthique sur certains aspects du système économique et financier actuel, ce document analysait de façon très technique ce système, jugé globalement « amoral ».

Les analystes du Vatican insistaient notamment sur le fait que, « aujourd’hui plus que jamais, les problèmes économiques et financiers attirent notre attention en raison de l’influence croissante des marchés sur le bien-être matériel d’une bonne partie de l’humanité », ce qui devrait requérir à la fois « une juste régulation de leurs dynamiques » et « un fondement éthique clair ».

La rédaction