L’avenir des devises numériques

Par La rédaction | 26 mars 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Les banques centrales doivent soigneusement peser les implications pour la stabilité financière et la politique monétaire de l’émission de monnaies numériques accessibles au grand public.

C’est ce qu’estime un récent rapport de la Banque des règlements internationaux (BRI). Dans ce document (en anglais) publié à la mi-mars, la BRI constate que si cette forme de monnaie dématérialisée est déjà à la disposition des institutions financières, le grand public, lui, n’y a pas encore accès.

Comme le relèvent Les Echos, la disparition des pièces et billets, « inéluctable à terme », a poussé les banques centrales de la planète à étudier quel serait leur rôle dans cette révolution annoncée des moyens de paiements.

RISQUE D’INSTABILITÉ FINANCIÈRE

Au contraire de ce qui se passe aujourd’hui en Suède, où l’utilisation de l’argent comptant affiche une baisse marquée et ne représente plus que 1,5 % du produit intérieur brut du pays (contre 4 % il y a une quinzaine d’années), la BRI note toutefois que « l’usage croissant des moyens de paiement électroniques depuis 2007 ne s’est pas traduit par une moindre demande pour le cash ». Même si, ajoute-t-elle, « dans de nombreux pays, les solutions de paiements pour les particuliers sont pratiques, efficaces et ont gagné la confiance du public au cours du temps ».

Les monnaies virtuelles émises par les banques centrales « pourraient prendre plusieurs formes », en fonction notamment des caractéristiques propres à chaque pays, et plusieurs n’ont d’ailleurs pas l’autorisation d’en émettre tant que la législation de l’État qu’elles représentent n’aura pas été modifiée, expliquent Les Echos.

Le journal affirme que l’arrivée à moyen terme de ces nouvelles devises dématérialisées ne devrait « pas perturber fondamentalement » la façon dont elles conduisent leur politique monétaire. Cependant, met-il en garde, « une devise [numérique] sûre et qui [fournit] des intérêts pourrait être perçue par les particuliers comme une alternative à leurs dépôts bancaires ». Avec à la clé un risque d’instabilité financière, puisque, en cas de crise, les consommateurs pourraient « se réfugier en masse » vers cette devise, et ce, au détriment des institutions financières.

UN PROBLÈME DE CONFIANCE

Dans ces conditions, « l’innovation technologique renforcera-t-elle cette confiance essentielle pour que la monnaie puisse fonctionner et être acceptée sans crainte de contrefaçons ou d’erreurs? » s’interroge le quotidien économique français. À son avis, la réponse ne coule pas de source et le rapport de la BRI, « qui pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses et invite les banques centrales à poursuivre leurs recherches sur les risques et bénéfices de ces nouvelles monnaies », en est l’illustration.

Outre les problèmes que celles-ci poseraient en termes de régulation, de sécurité et d’impact sur la courbe des taux d’intérêt, par exemple, il faudra aussi compter sur l’accueil que leur ferait le grand public. Dans plusieurs pays, notamment au Canada et aux États-Unis, l’utilisation de l’argent comptant représente en effet « un symbole fort de liberté individuelle et de distance avec le contrôle des gouvernements ou d’autres entités », écrivait Hendrix Vachon en 2016. Plusieurs personnes préfèrent ce mode de paiement et elles souhaitent conserver ce choix, insistait alors l’économiste de Desjardins.

La raison? Peut-être certaines jugent-elles qu’« il est plus facile d’utiliser des pièces et des billets », tandis que d’autres « peuvent y voir un outil pour mieux contrôler leurs dépenses ou pour initier leurs enfants à la gestion de leurs finances », sans oublier le fait que les personnes âgées, à faible revenu ou ayant un degré de scolarité peu élevé risquent d’être pénalisées, détaillait Hendrix Vachon. De même, la protection des renseignements personnels pourrait justifier de continuer à utiliser du cash plutôt qu’un autre mode de paiement pouvant laisser des traces. « Un consommateur pourrait juger que les informations recueillies par un tiers lors d’une transaction électronique risquent éventuellement être utilisées à son désavantage », concluait l’économiste.

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