Les marchés émergents séduisent de nouveau les grands investisseurs

Par Ronald McKenzie | 18 avril 2011 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
5 minutes de lecture

Les marchés émergents recommencent à capter l’attention des investisseurs institutionnels, rapporte l’agence Reuters. Aux États-Unis, de grands fonds de placement engagent des milliards de dollars dans des investissements en Chine, dans les pays de l’Europe de l’Est, au Proche-Orient, en Russie et en Afrique.

Certes, ils comptent profiter du développement des ces régions, mais c’est surtout parce qu’ils boudent les économies industrielles traditionnelles qu’ils favorisent de tels placements. Ces dernières, estiment-ils, marquent le pas depuis quelques semaines, et rien ne laisse présager qu’elles reprendront du poil de la bête à court terme. Bref, c’est un peu par défaut qu’ils optent pour les pays émergents.

Ce changement de cap donne lieu à d’importants et rapides mouvements de capitaux. Ainsi, Reuters évalue à près de 4 milliards de dollars US les sommes que les investisseurs ont placées dans des fonds des marchés émergents, et ce, uniquement au cours de la première semaine d’avril. Afin de répondre à la demande, la firme américaine Van Eck Global a lancé la semaine dernière un fonds négocié en Bourse (FNB) dédié aux actions russes à petite capitalisation.

De son côté, la maison PIMCO a commercialisé le 12 avril dernier deux fonds d’actions des pays émergents. «Nous croyons qu’un grand nombre d’investisseurs sont insuffisamment exposés aux marchés émergents», a indiqué une gestionnaire de PIMCO à Reuters.

Changement de donne en février

L’engouement des grands investisseurs institutionnels pour les marchés émergents est arrivé subitement. En effet, ils les avaient boudés pendant la majeure partie de 2010, craignant la formation d’une bulle spéculative en Chine, notamment, causée par l’embrasement du marché immobilier. L’inflation était aussi une cause de soucis.

Parallèlement, les économies des États développés se tiraient bien d’affaire. Cela s’est reflété dans les grands indices. Le MSCI World Stock Index, qui mesure la performance boursière des pays développés a crû de 6,45 % depuis le début de 2011, alors que l’indice MSCI pistant les pays émergent n’a progressé que de 2,5 %.

Mais la donne a changé en février, note Reuters. Les troubles politiques au Maghreb et dans certains pays du Proche-Orient ont fait bondir le prix du pétrole, ce qui risque d’entraver la reprise mondiale. Le tremblement de terre au Japon, auquel se sont ajoutés un tsunami dévastateur et un grave accident nucléaire, porte un dur coup à la croissance dans la troisième économie du monde, elle qui en a tant besoin. Aux États-Unis, la relance demeure fragile. Le chômage est élevé, le marché immobilier piétine et la valeur du dollar américain est en net recul. Ces éléments négatifs ont incité la firme Merrill Lynch à revoir à la baisse ses perspectives de croissance du PIB américain pour 2011. Au lieu de + 3,1 %, elle anticipe maintenant + 2,5 % seulement.

À l’opposé, le PIB global des pays émergents devrait avancer de 6,5 % cette année. La Chine a annoncé qu’elle prendrait des mesures pour garder l’inflation sous la barre des 5 %. Quant à son PIB, il a crû de 9,7 % au premier trimestre de 2011. Résultat : depuis le 24 février, l’indice MSCI des pays émergents a augmenté de plus de 10 %, alors que le MSCI World Stock Index n’a gagné que 2 %.

Soucieux d’inscrire des gains là où ils peuvent en faire, les investisseurs institutionnels ont pris le chemin des pays émergents.

Plus de réserve avec l’Amérique latine

Mais tout n’est pas rose au royaume des nouvelles économies. Si l’on fonde de grands espoirs pour la Chine, l’Inde, la Russie et les pays de l’Europe de l’Est, on est plus réservé en ce qui concerne l’Amérique latine.

Des firmes d’investissement, comme la sud-coréenne Mirae Asset Global Investment, espère que la lutte à l’inflation portera ses fruits dans des pays comme le Brésil. «Nous ne sommes pas pressés d’y investir. Comme nous prenons des positions à long terme, nous attendons les bons points d’entrée», a déclaré un porte-parole de l’entreprise.

Pour sa part, la maison Van Eck a préféré prendre tout de suite les devants dans cette région du monde. Elle a mis en marché en mars dernier un FNB axé sur la Colombie. Ce petit fonds de 2 millions de dollars US investit dans une vingtaine de titres colombiens, principalement des actions bancaires et du secteur de l’énergie (pétrole). Il faut souligner que ce fonds ne convient qu’aux audacieux. Parmi les risques qui y sont liés figurent, outre les traditionnelles fluctuations boursières, les dangers d’instabilité politique, de troubles sociaux et de conflits armés ! Mais, comme le dit Van Eck, les investisseurs pourraient tirer de grands profits de la croissance de cette «région dynamique».

Ronald McKenzie