Les talons aiguilles interdits à la City?

Par La rédaction | 16 mars 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le Parlement britannique a récemment débattu d’une mesure visant à interdire le port obligatoire des talons hauts sur le lieu de travail, ce qui a suscité une avalanche de réactions féminines, rapporte Le Monde.

Tout a commencé avec le coup de colère de Nicola Thorp, licenciée sans solde de son poste de réceptionniste en 2015 pour avoir refusé de porter des talons de cinq à dix centimètres comme l’exigeait son employeur, l’agence Portico, qui l’avait recrutée pour le compte du cabinet d’audit PriceWaterhouseCoopers.

Révoltée, cette jeune Londonienne de 28 ans avait alors lancé sur le site du Parlement une pétition destinée à « rendre illégale l’exigence des talons hauts pour les femmes au travail », une initiative qui avait entraîné de nombreuses réactions et recueilli plus de 152 000 signatures, soit largement plus que le minimum requis de 100 000 soutiens nécessaire au déclenchement d’un débat à Westminster.

« DOULEURS INVALIDANTES »

Ce débat, qui s’est tenu le 6 mars dernier, a été l’occasion pour la commission parlementaire sur les femmes et l’égalité de mener une enquête et d’ouvrir un forum en ligne où les témoignages de salariées confrontées aux mêmes exigences que Nicola Thorp ont afflué. « Nous avons repéré des attitudes qui relèvent davantage, j’allais dire des années 1950, mais peut-être même plus des années 1850, que du XXIe siècle », a affirmé la députée travailliste Helen Jones, présidente de la commission, en ouvrant la discussion.

Il faut dire que le « code vestimentaire » que Portico avait tenté d’imposer à la jeune femme était pour le moins contraignant, puisque ses employées devaient par exemple porter des collants « non opaques », tandis que les racines de leurs cheveux devaient être « invisibles » et qu’elles étaient tenues de « réajuster régulièrement » leur maquillage. Enfin, outre les talons aiguilles qu’elles devaient porter, elles avaient pour obligation de choisir l’une des quatorze nuances de vernis à ongles recommandées par la firme…

Les parlementaires ont profité de cette affaire pour consulter des spécialistes en santé publique. Diagnostic du Collège de podologie britannique : le port prolongé de talons hauts entraîne un « équilibre réduit » et une « mobilité de la cheville limitée » en même temps qu’il « affaiblit la force musculaire du mollet » et peut provoquer « des douleurs invalidantes ».

RESPECTER LA LOI

Intitulé « Talons hauts et codes vestimentaires sur le lieu de travail », le rapport de la commission (en anglais) publié dès le mois de janvier a conclu que « les codes vestimentaires discriminatoires demeurent courants dans certains secteurs de l’économie ». En conséquence de quoi les députés ont réclamé que le gouvernement applique une loi anti-discrimination votée en 2010, qui interdit toute règle dont l’application est « moins favorable » aux personnes de l’un des deux sexes.

Si le gouvernement de Theresa May, par ailleurs connue pour son goût immodéré pour les chaussures hors de prix, ne s’est pas prononcé sur ce dossier, Downing Street a néanmoins indiqué que « les codes vestimentaires des entreprises doivent être raisonnables et formuler des exigences équivalentes pour les hommes ou les femmes », avant de rappeler que c’était la loi et que les employeurs devaient la respecter. Une réaction plutôt timide qui n’a rien d’étonnant, souligne Le Monde, quand on sait que lorsqu’elle était chargée des femmes et de l’égalité en 2011, l’actuelle première ministre conservatrice avait déclaré que « les codes vestimentaires traditionnels en fonction du sexe » favorisaient « un sentiment de professionnalisme ».

Pour sa part, l’agence Portico a finalement changé son dress code et ses exigences vestimentaires ne se réfèrent plus aujourd’hui au sexe de ses employés!

La rédaction