L’été, fait pour jouer?

Par Philippe Pratte | 22 juin 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
9 minutes de lecture

S’il y a une période favorable à l’investissement pendant l’été, c’est habituellement en juillet. C’est surtout lors de ce mois qu’on peut connaître un rallye boursier, c’est-à-dire un moment où la plupart des valeurs d’un marché, voire la totalité, progressent de façon importante (au moins de 8 à 10 %)[1].

Le jour de l’Indépendance américaine est une célébration importante aux États-Unis et leurs citoyens s’en donnent à cœur joie. Les investisseurs surfent sur cette vague d’optimisme et les rendements en Bourse sont habituellement à la hausse. De plus, les compagnies déposent leur rapport trimestriel pendant ce mois, ce qui permet aux investisseurs de réévaluer le prix des titres de sociétés.

Août, quant à lui, a la réputation d’être un mois qui rapporte peu, se classant au quatrième rang des pires mois de l’année avec un rendement nul enregistré entre 1950 et 2011. Cependant, il offre tout de même plusieurs occasions.

Voici donc les nombreuses tendances à surveiller pendant l’été. Alors que plusieurs sont en vacances, d’autres en profitent.

Les indices américains connaissent une période favorable en juillet, suivie d’un mois d’août difficile. Le S&P 500 a enregistré une hausse moyenne de 2,18 % depuis cinq ans et de 2,33 % depuis dix ans en juillet, alors que les données du mois d’août ne sont pas aussi réjouissantes. Le résultat moyen d’août pour cet indice depuis les cinq et dix dernières années est respectivement de -1,14 % et -0,96 %.

Le Dow Jones, de son côté, a enregistré un gain moyen de 1,63 % depuis les cinq dernières années en juillet et de 2,28 % en dix ans. À l’instar du S&P 500, le mois d’août est difficile pour le Dow Jones, qui a connu une baisse moyenne de 1,54 % depuis cinq ans et de 1,07 % depuis les dix dernières années.

Le Nasdaq, encore une fois, affiche d’excellents résultats et bat les deux autres grands indices américains. Sa composition axée sur les sociétés technologiques peut expliquer ce phénomène. Avec une hausse moyenne de 3,70 % sur les cinq dernières années et de 3,42 % sur dix ans, nous pouvons ainsi affirmer que juillet est un mois Nasdaq.

Néanmoins, tous les indices semblent avoir tendance à connaître une correction au mois d’août, incluant le Nasdaq. Cependant, sa chute se limite à un recul moyen de 0,16 % depuis les cinq dernières années et de 0,58 % depuis les dix dernières, ce qui fait qu’il demeure intéressant étant donné sa baisse restreinte.

Tendances sectorielles

La technologie se retrouve sans grande surprise au premier rang des secteurs les plus intéressants en juillet. Analyser ses résultats au sein du S&P 500 permet d’en obtenir une vue plus juste, comme les secteurs composant les autres indices ne sont pas toujours aussi complets et sont parfois trop surpondérés.

Ce secteur y a progressé de 4,10 % en moyenne sur cinq ans et de 3,81 % depuis dix ans. Cette tendance positive à plus long terme démontre la force des sociétés de technologie au mois de juillet. Ce secteur est d’ailleurs celui qui compte le plus d’entreprises enregistrant une croissance importante de leurs bénéfices. En août, la baisse des autres indices et secteurs semble contagieuse, venant affecter directement le secteur des technologies, qui connaît une moyenne de 0,42 % depuis les cinq dernières années et -0,21 % sur les dix dernières années. Toutefois, ces données en font un choix estival intéressant, puisque le repli sur dix ans est minime et les résultats sur cinq ans demeurent positifs.

Le domaine de la santé du S&P 500 arrive bon deuxième en juillet. Sa hausse moyenne de 3,07 % depuis cinq ans en fait un secteur très tentant, mais son repli moyen de 1,77 % en août le rend toutefois moins attrayant que la technologie.

La grande perdante, non seulement au mois de juillet, mais aussi au mois d’août, est l’énergie. Et ce, malgré les fluctuations à la pompe lors des différentes fêtes de l’été. Au mois de juillet, le secteur de l’énergie du S&P 500 recule en moyenne de 1,15 % depuis les cinq dernières années. Il a aussi dégringolé de 2,0 % au mois d’août. Bref, mieux vaut s’abstenir pendant la période estivale.

Produits de base

Le pétrole tire profit de plusieurs célébrations durant l’été, alors que des millions d’Américains sont sur la route. Parmi les arrêts incontournables : la station d’essence. Ainsi, le pétrole obtient ses meilleurs résultats du 24 juillet au 3 octobre.

L’or noir connaît une première vague haussière de la fin février jusqu’en mai. Celle-ci est plutôt liée à l’inventaire, alors que les raffineries retournent à la production d’essence, ce qui diminue l’offre d’huile et contribue à soutenir les prix. La deuxième vague est davantage due au délaissement de la production d’essence pour celle du mazout et aux effets de la saison des ouragans. Cette dernière peut ainsi venir perturber la production et faire augmenter les prix de manière drastique.

Par contre, en regardant les données enregistrées dans les dernières années, le pétrole semble être en difficulté pendant l’été. Depuis cinq ans, les contrats à terme sur le pétrole ont reculé de 4,76 % en moyenne et maintiennent une baisse depuis dix ans de 2,75 %.

L’or commence à briller en juillet, et ce, jusqu’en octobre, notamment grâce aux célébrations et aux mariages en Inde. Les bijoux en or sont très présents dans la culture indienne et les prix augmentent avec cette demande soudaine. Les contrats à terme sur l’or enregistrent une avance moyenne de 0,38 % depuis cinq ans en juillet et de 0,82 % depuis dix ans. Alors que les indices boursiers ont tendance à reculer en août, l’or, souvent considéré comme un produit de protection en portefeuille, montre une tendance haussière. Avec un gain moyen de 2,04 % depuis cinq ans et de 2,34 % depuis dix ans, l’or pourrait être utile pendant les fluctuations de ce mois.

Par chez nous

Du côté des indices canadiens, la situation n’est pas bien différente. Le mois de juillet demeure positif, tandis que le mois d’août est plus difficile. Néanmoins, avec notre indice très pondéré en sociétés aurifères, la volatilité d’août semble être plus modérée au Canada.

Le TSX, l’indice majeur de Toronto, a tendance à produire des rendements positifs au mois de juillet, affichant une moyenne de 1,40 % depuis les cinq dernières années et de 0,66 % sur dix ans. En août, la surpondération de notre indice boursier en ressources l’aide à être stable, avec des résultats moyens de -0,08 % depuis cinq ans et 0,45 % depuis dix ans.

Le secteur gagnant au Canada est celui de la consommation de base, qui a enregistré une augmentation moyenne de 4,60 % depuis cinq ans en juillet et de 2,40 % sur dix ans, le portant en tête de liste. Nous retrouvons en deuxième place la santé, avec une moyenne de 4,26 % en juillet depuis les cinq dernières années et de 2,37 % depuis dix ans. Bonne nouvelle : ces deux secteurs ont tendance à rester au vert au mois d’août alors que la plupart des marchés sombrent dans le rouge.

Le secteur de la consommation a été positif pendant cette période depuis les cinq dernières années (moyenne de 0,22 %) et les dix dernières années (1,16 %). Le secteur de la santé a, de son côté, enregistré des hausses moyennes de 0,61 % sur cinq ans et de 1,38 % depuis dix ans. Mais il faut rester prudent avec le secteur de la santé canadienne. La hausse fulgurante, puis l’implosion de la pharmaceutique Valeant dans les dernières années viennent selon moi contaminer les données.

Agriculture

Le secteur agricole débute sa tendance haussière durant les cinq derniers mois de l’année, soit d’août à décembre, en raison des récoltes estivales. Cependant, ce secteur reste tout de même volatil. L’été demeure difficile pour les contrats à terme sur le blé (moyennes de -2,91 % en juillet et de -2,23 % en août depuis cinq ans). La fin du mois d’août pourrait ainsi représenter une occasion d’achat pour ce produit de base.

L’Europe semble aussi synchronisée avec les indices américains. L’Euro Stoxx 50 a enregistré une moyenne de 2,53 % sur cinq ans en juillet et un recul moyen de 1,76 % en août.

philippe_pratte_thumb_150x150L’été demeure le moment de l’année où les équipes de gestion de portefeuille prennent des vacances, remplacées par du personnel de soutien avec moins de latitude. Ainsi, les volumes de transaction ont tendance à diminuer, tout comme les occasions. L’atmosphère est à la détente; les investisseurs se reposent pour revenir en septembre et démarrer la prochaine poussée haussière.

Philippe ­Pratte est président, chef des investissements et gestionnaire de portefeuille chez ­Pratte Gestion de portefeuilles.


Les opinions (y compris les recommandations, s’il y a lieu) exprimées dans le présent billet sont celles de l’auteur seulement et ne représentent pas nécessairement celles de ­Pratte ­Gestion de portefeuilles, ni celles de ­Conseiller. Ce texte ne doit pas être considéré comme un conseil personnel de placement ou une sollicitation d’achat ou de vente de titres. Les renseignements qu’il contient proviennent de sources considérées comme fiables, mais leur exactitude et leur exhaustivité ne peuvent être garanties. L’auteur, ­Pratte ­Gestion de portefeuilles et ­Conseiller n’assument aucune responsabilité quant aux erreurs qui pourraient s’y glisser.


[1] Les Echos, « Rallye boursier », bit.ly/2y55xzF

Philippe Pratte