Quand les bonnes œuvres servent d’échappatoire fiscale…

Par Rémi Maillard | 20 mars 2014 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les personnes qui font un don de bienfaisance doivent se montrer prudentes pour ne pas devenir la proie de fraudeurs, a mis en garde hier l’ombudsman des contribuables du Canada, Me Jean-Paul Dubé.

Intitulé « Donateurs, méfiez-vous », son dernier rapport constate que plusieurs programmes prétendant être des organismes de bienfaisance, ou qui y sont associés, continuent d’être commercialisés au pays.

Le principe de ces « stratagèmes relatifs à des dons utilisés comme abris fiscaux » est simple : un donateur verse un certain montant à un promoteur et reçoit en échange un reçu officiel pour don émis par un organisme de bienfaisance enregistré… mais pour un montant beaucoup plus élevé que celui versé (habituellement quatre ou cinq fois supérieur).

Le donateur réclame ensuite un crédit d’impôt basé sur le montant gonflé du don figurant sur le reçu, « entraînant souvent un remboursement important qui finit par être beaucoup plus élevé que le montant réellement versé en don ».

Me Jean-Paul Dubé, ombudsman des contribuables.

Un stratagème illégal

Cette façon de procéder est évidemment illégale. D’autant « qu’à ce jour, aucun abri fiscal relatif aux dons n’a été considéré comme conforme à la loi », insiste le rapport.

Le document souligne par ailleurs que « les contribuables ne devraient pas s’attendre à profiter d’un don de bienfaisance » et qu’ils ne devraient pas non plus escompter « recevoir des reçus et des remboursements d’impôt plus élevés que leur don réel ».

« Mon bureau a reçu de nombreuses plaintes de la part de contribuables qui n’étaient pas conscients des conséquences fiscales [pour eux] alors qu’ils participaient à des stratagèmes de dons aux fins de l’impôt », a précisé Me Dubé .

L’ARC doit être plus efficace

Or, « malgré les efforts de l’Agence du revenu du Canada [ARC] pour combattre les systèmes de dons fiscaux abusifs et des modifications législatives pour l’aider à le faire, ces régimes continuent d’entacher le secteur de la bienfaisance », a-t-il déploré.

Dans son rapport, il recommande donc que l’Agence « surveille les tendances quant à la structure et à l’investissement dans les stratagèmes fiscaux douteux et qu’elle rende ces renseignements accessibles au public dans les meilleurs délais ».

L’objectif est de mieux prévenir les donateurs des risques qu’ils encourent en participant, « volontairement ou à leur insu », à ce type d’arnaques. Notamment en leur fournissant des exemples clairs de stratagèmes fiscaux qui ne respectent pas la Loi de l’impôt sur le revenu.

« L’ARC doit améliorer les communications globales à ce sujet. Au bout du compte, ces efforts permettront à des personnes innocentes d’éviter d’être victimes de promoteurs de stratagèmes de dons utilisés comme abris fiscaux », a conclu Me Dubé.

6,4 milliards de dollars en dons déclarés

L’ARC estime qu’à la fin de 2012, il y avait eu environ 204 000 participants à des stratagèmes relatifs à des dons utilisés comme abris fiscaux, avec 6,4 milliards en dons déclarés. Elle a refusé d’en reconnaître 5,9 milliards, soit plus de 90 %.

Depuis 2006, l’Agence a toutefois constaté une baisse de 82 % du nombre de personnes impliquées dans ce type d’arnaques, passant de 50 000 à 8400 participants par année, ainsi qu’une baisse de 77 % du montant de dons refusés.

Aujourd’hui, le Canada compte environ 86 000 organismes de bienfaisance enregistrés au fédéral.

À lire : Dons de bienfaisance : 4 conseils judicieux

Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.