Qu’attendre du nouveau ministre des Finances?

Par La rédaction | 19 octobre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : bacho12345 / 123RF

L’ancien vice-président et trésorier de la Banque nationale, Éric Girard, a été nommé ministre des Finances du premier gouvernement caquiste de l’histoire du Québec. Il devra notamment voir à l’implantation du projet de loi 141, adopté en juin dernier.

Rappelons que le torchon avait brûlé pendant plusieurs mois entre bien des professionnels du conseil financier et l’ex-ministre des Finances Carlos Leitão, qui insistait notamment pour abolir la Chambre de la sécurité financière et fusionner ses activités au sein de l’Autorité des marchés financiers. Un projet dont l’abandon a contribué à l’adoption du projet de loi cet été. 

Chose certaine, Flavio Vani, président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers, n’a pas apprécié ni oublié l’attitude du gouvernement précédent. « Il ne nous écoutait pas assez », déplore-t-il, en se référant notamment aux consultations sur le PL 141.

Du nouveau ministre, il espère justement cela, de l’écoute. « J’espère qu’il comprendra que le conseil financier, c’est important et que ce doit être réservé à des gens qui ont les permis pour le faire, avance M. Vani. Les produits d’investissement et les assurances de personnes sont complexes. La vente par Internet de polices d’assurance de personnes, si c’est mal encadré, va causer beaucoup d’ennuis aux gens. »

M. Vani demande au nouveau ministre de protéger le public et de protéger la profession de conseiller.

UN TRIO ROUGE BANQUE NATIONALE

En plus d’Éric Girard, le trio économique de la Coalition Avenir Québec (CAQ) se compose de Christian Dubé nommé président du Conseil du Trésor et de Pierre Fitzgibbon, qui occupera le poste de ministre de l’Économie et de l’Innovation.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la Banque Nationale est bien représentée au sein de ce trio. Christian Dubé, ancien premier vice-président – Québec de la Caisse de dépôt et placement (CDPQ), a siégé au conseil d’administration de la Financière Banque Nationale, alors que M. Fitzgibbon a agi cinq ans à la Banque Nationale, notamment comme vice-président du conseil, financement des sociétés. Il a aussi siégé à de très nombreux conseils d’administration dont… celui de la CDPQ. Le monde financier n’est pas si vaste, au Québec.

Aux élections fédérales de 2015, Éric Girard avait essuyé la défaite dans la circonscription de Lac-Saint-Louis, alors qu’il se présentait pour le parti conservateur. S’il avait perdu par plus de 29 000 voix contre Francis Scarpaleggia cette année-là, il s’est bien repris cette fois. Il a remporté l’élection dans Groulx avec plus de 40 % des voix, devant la libérale Sabrina Chartrand.

UN SPÉCIALISTE DES FINANCES

Natif de Sept-Îles, Éric Girard a passé une bonne partie de son enfance à Québec, avant de se rendre étudier à Montréal. Il possède un baccalauréat en économie et finances de l’Université McGill et une maîtrise en économie de l’Université du Québec à Montréal. Il a travaillé pendant un quart de siècle dans le domaine de l’investissement et des marchés financiers. Il est considéré comme un spécialiste des agences de notation et des placements internationaux. François Legault l’a décrit comme un « financier avec une conscience sociale ». 

Le nouveau ministre des Finances du Québec a fait l’objet d’un article de Bloomberg, bien qu’il ait, comme son parti, refusé la demande d’entrevue du média économique faite la veille de sa nomination. Bloomberg revient sur des propos tenus par M. Girard lors d’un entretien offert en septembre, ainsi que sur quelques promesses électorales de la CAQ. 

M. Girard soutenait en septembre que le Québec devait bouger pour atteindre son potentiel économique. Il jugeait que cela passerait par « les investissements dans les entreprises, l’éducation, les taux d’obtention de diplômes, une meilleure formation des travailleurs expérimentés – toutes des choses qui aideront la productivité ». Des changements dont l’effet se ferait sentir dans la troisième ou quatrième année du mandat.

REMBOURSER LA DETTE PUBLIQUE

Sur le plan financier, M. Girard compte épargner environ 1,2 milliard de dollars d’ici 2022-2023 sur un budget total d’environ 124 milliards de dollars. Cela passera notamment par l’élimination, par attrition, de 5 000 postes de fonctionnaires (sur environ 466 000), ainsi que par une révision des dépenses en technologies de l’information et en approvisionnement.

Le gouvernement de François Legault compte aussi piger dans le Fonds des générations pour faire un paiement de dix milliards de dollars sur la dette du Québec avant la fin de mars 2019. Cela réduirait les frais d’intérêts annuels d’environ 300 millions de dollars, selon M. Girard.

« La baisse des paiements d’intérêt libérera de l’argent pour améliorer les services en santé et en éducation et en laissera une partie que nous pourrons redonner aux familles », soutenait M. Girard à Bloomberg. 

Quant au double mandat de la CDPQ, soit de faire du rendement et de contribuer à l’économie québécoise, pas de changement à l’horizon, malgré la grogne qui a suivi la vente de Rona à Loews. Pour M. Girard, le premier objectif, obtenir du rendement, continuera d’avoir préséance sur le second. 

Qu’attendez-vous du nouveau ministre des Finances?

La rédaction