Sale temps pour les analystes

Par La rédaction | 10 juillet 2017 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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L’Union européenne complique la vie des analystes en obligeant les banques et les courtiers à vendre les analyses à part, plutôt que de les inclure dans un bouquet de services offerts aux clients, rapporte Bloomberg.

Dès janvier 2018, les banques et courtiers européens devront cesser d’offrir leurs analyses d’investissement gratuitement à leurs clients. L’Union européenne (UE) interrompt cette pratique qui favorise, selon elle, les conflits d’intérêts et dessert les investisseurs en augmentant les coûts des transactions tout en les rendant plus opaques. L’UE croit que certains gestionnaires choisissent de négocier (et de payer des commissions) aux firmes offrant les meilleurs conseils et le meilleur accès à leurs analyses, plutôt que les meilleurs prix pour exécuter les transactions des clients.

IMPACT MONDIAL

Dorénavant, tous les services rattachés à l’investissement devront être vendus et achetés individuellement. Ce changement ne touchera pas que l’Europe, puisque les gestionnaires européens peuvent utiliser les recherches d’analystes d’autres pays, notamment des États-Unis.

Or, la réglementation américaine est exactement à l’opposée de la nouvelle réglementation européenne. Aux États-Unis, le régulateur interdit aux courtiers de recevoir un paiement pour leurs recherches, ce que l’UE entend au contraire imposer. En l’absence d’entente entre les deux, les banques de Wall Street ne pourraient plus vendre leurs analyses à des gestionnaires d’actifs européens. Les régulateurs seraient à pied d’œuvre pour tenter de trouver une solution au problème.

COMBIEN VALENT LES RECHERCHES?

Reste maintenant à établir le modèle d’affaires entourant la vente des travaux des analystes. Nomura Holdings demande 120 000 euros (175 000 $ CA) par année pour un accès à ses analystes, dans une offre qualifiée de « premium ». Un prix similaire à celui du Crédit Agricole. Des gestionnaires d’actifs se sont vu demander 50 000 $ US (64 500 $ CA) par JPMorgan Chase & Co., alors que Deutsche Bank AG et Commerzbank AG privilégient une approche « à la carte » pour certains investisseurs.

Reste à voir combien les gestionnaires d’actifs seront prêts à débourser pour ces documents. Déjà, ils évaluent la qualité des recherches qu’ils reçoivent sur les obligations et les actions. De leurs côtés, les analystes s’efforcent de leur démontrer leur valeur. Tout cela pourrait réduire l’abondance d’analyses sur le marché et en augmenter la qualité. Mais cela risque aussi de rendre plus rare la couverture des petites et moyennes entreprises.

DÉJÀ MOINS D’ANALYSTES

Certains analystes pourraient faire les frais de ces changements. Un rapport de McKinsey & Co. estimait que les banques pourraient réduire leurs dépenses en analyses d’environ 1,2 G$ US (1,55 G$ CA), une baisse de 30 %. Les gestionnaires d’actifs américains et européens pourraient aussi jouer du couteau et retrancher plus de 300 M$ US (387 M$ CA) à leurs achats d’analyses externes. Le nombre d’analystes dans les 12 plus grandes banques d’investissement a déjà diminué de 10 % depuis la fin de 2012, selon la Coalition Development Ltd.

La rédaction