Trop de BBB sur le marché?

27 novembre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Homme d'affaires debout sur un tas de pierres.
Photo : Sean Prior / 123RF

Les obligations de qualité moyenne inférieure (BBB) se sont multipliées sur le marché américain, mais il n’y a pas de quoi s’en inquiéter, selon Andrew Kronschnabel, gestionnaire de portefeuille, titres à revenu fixe pour Logan Circle Partners à Philadelphie (Pennsylvanie).

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« Du point de vue fondamental, le marché américain est très solide. Le chômage est tombé à 3,7 %, les profits des entreprises sont solides, la confiance des consommateurs est plus forte que jamais, et l’activité des entreprises atteint des sommets. Tout cela favorise les entreprises américaines », observe Andrew Kronschnabel.

Cependant, l’expert note quelques nuages à l’horizon, comme le recul du marché immobilier et des ventes automobiles, la faible croissance des salaires en regard de celle de l’emploi, la force du dollar face aux devises des partenaires commerciaux, et les inquiétudes concernant les conflits commerciaux.

« Au niveau des entreprises, les profits ont probablement culminé lors des derniers trimestres. On ne peut pas maintenir indéfiniment une croissance de 25 % du BAIIA quand celle des revenus est de 10 %. On s’attend à voir ces chiffres baisser légèrement, et on a commencé à le voir dans les rapports trimestriels publiés dans les dernières semaines », dit Andrew Kronschnabel.

C’est dans ce contexte que les participants du marché obligataire commencent à s’inquiéter de la proportion de titres portant la notation BBB.

« Le marché obligataire américain a presque doublé de volume en huit ans, et pendant ce temps, la part des BBB est passée de 40 % à 50 % », note Andrew Kronschnabel.

Le volume des BBB a donc plus que doublé, pour deux raisons selon lui. D’abord, de nouveaux émetteurs sont arrivées en provenance des les secteurs pharmaceutique et technologique, où les entreprises recouraient peu à l’endettement par le passé. Ensuite, de nombreuses fusions et acquisitions d’envergure sont survenues ces dernières années, financées en partie par les obligations.

« Dans le cas des entreprises pharmaceutiques et technologiques, il y a peu d’inquiétude à avoir car elles ont de solides états financiers. Elles ont simplement gagné en maturité, et se sont endettées en comparaison à leur absence de dettes auparavant », dit Andrew Kronschnabel.

« Les fusions et acquisitions ont aussi contribué à l’offre d’obligations BBB, incluant des cas très médiatisés comme Amazon et Whole Foods, Disney et Fox, AT&T et Time Warner, etc. Nous ne sommes pas inquiets non plus de ce côté car il s’agit de très grandes entreprises fortement diversifiées, qui ont beaucoup de leviers à leur disposition pour réduire leur endettement à mesure qu’elles réalisent l’intégration issue de ces fusions et acquisitions », poursuit l’expert.

Bref, selon lui, les BBB qui ont envahi le marché « n’ont rien à voir avec les BBB d’il y a dix ans. » Il en veut pour preuve leur performance, supérieure à celle des titres A dans les trois premiers trimestres de 2018.

Alors que le cycle d’expansion d’économique tire à sa fin, on devrait voir ces deux types d’émetteurs de BBB réduire « très rapidement » leur activité sur le marché obligataire, croit-il.

« Les fusions et acquisitions vont émettre moins d’obligations à mesure que les taux d’intérêt augmentent. Quant aux entreprises pharmaceutiques et technologiques, la réforme fiscale leur a permis de rembourser beaucoup de dettes. Ces deux importantes sources de titres BBB commencent à se tarir. On a vu moins d’émissions en 2018 et cette tendance devrait se poursuivre », dit Andrew Kronschnabel.

Pendant ce temps, la demande est forte, non seulement en provenance des acheteurs étrangers mais aussi domestiques, note l’expert. À mesure que les investisseurs américains vieillissent, ils délaissent le marché des actions pour se tourner vers les obligations. Et les rendements sont au rendez-vous, rappelle Andrew Kronschnabel.

« Les titres de société affichent 4,2 % dans la catégorie investissement et près de 7 % dans le haut rendement. Il n’y a pas si longtemps, de tels rendements étaient impossibles sans prendre des risques extrêmes. La hausse des taus d’intérêt a rendu les obligations « investissables » de nouveau. Elles n’offraient pas vraiment d’alternative aux actions voilà quelques années, mais désormais elles génèrent de vrais revenus. Même un bon du Trésor américain à deux ans offre maintenant 2,85 %. La valeur des obligations s’est donc grandement améliorée en 2018. »

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.