Payer les lanceurs d’alerte, une bonne idée?

Par Rémi Maillard | 13 mai 2015 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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L’Association des banquiers canadiens (ABC) juge dangereux le projet de programme de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) destiné à récompenser financièrement les lanceurs d’alerte, rapporte Le Devoir.

En effet, l’association estime qu’il risque de perturber le système de dénonciation existant en cas d’inconduite, car il « pourrait se solder, du côté des employés, par le contournement des obligations professionnelles », puisque ceux-ci ont d’abord l’obligation de rendre compte à leurs supérieurs.

« Notre principale inquiétude provient du fait que l’implantation du programme pourrait avoir un effet négatif sur l’efficacité des opérations bancaires en matière de comptabilité à l’interne, de signalisation progressive et de conformité, avec un effet négatif sur les clients », écrit l’ABC dans un mémoire envoyé à la CVMO au début du mois de mai.

Information de qualité

Le programme élaboré par la Commission propose d’accorder un incitatif financier pouvant aller jusqu’à 1,5 million de dollars à un lanceur d’alerte ayant fourni des informations concernant des « inconduites graves » relativement au droit ontarien des valeurs mobilières.

Ainsi, « un employé ou une personne ayant des préoccupations crédibles serait admissible à recevoir une récompense en argent pouvant aller jusqu’à 15 % des sanctions pécuniaires totales, dans la mesure où l’information est fournie volontairement, qu’elle est de bonne qualité et originale », détaille la CVMO.

Le paiement serait effectué au moment du règlement final d’une affaire, et seulement dans les cas où les sanctions pécuniaires ou les règlements à l’amiable dépassent un million de dollars.

L’AMF « en réflexion »

Au Québec, l’Autorité des marchés financiers se dit « en réflexion ». « Nous continuons d’examiner quel genre de mécanisme de dénonciation pourrait être mis en place ici. Nous estimons que toute la question touchant la récompense financière pour un dénonciateur mérite d’être bien analysée », assure son porte-parole, Sylvain Théberge.

« Notre objectif est d’en arriver éventuellement à la mise en place d’un mécanisme qui nous permettrait d’obtenir un plus grand nombre de dénonciateurs, avec des renseignements de meilleure qualité », précise-t-il.

Compenser les risques

D’après ses promoteurs, l’instauration d’incitatifs financiers permettrait de compenser, au moins en partie, les risques importants encourus par les lanceurs d’alerte, qui ont souvent beaucoup de mal à retrouver un emploi dans leur secteur d’activité et sont parfois même poursuivis en justice par leurs anciens employeurs.

Ce programme « serait le premier du genre pour les organismes de réglementation du Canada et vise à résoudre les questions d’application de la loi rapidement et efficacement, indique la CVMO. Il permettrait d’obtenir des renseignements en temps opportuns, qui seraient, autrement, difficiles, voire impossibles, à obtenir ».

En outre, soutient-elle, ce système devrait « encourager les émetteurs et les personnes ou compagnies inscrites à déclarer volontairement les cas d’inconduite à la Commission ».

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Rémi Maillard

Journaliste multimédia. Santé, environnement, société, finances personnelles. Également intéressé par les affaires publiques, les relations internationales, la culture… Passionné de cyclisme.