Couvert ou non couvert ?

Par Rudy Luuko | 12 novembre 2022 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Pour les conseillers canadiens, l’exposition au dollar américain par le biais de fonds de placement est une source de risque de change pour les clients. Mais cette exposition peut aussi être une source intéressante de diversification et d’opportunités, comme les investisseurs ont pu le constater cette année.

Le dollar américain s’est envolé devant les autres grandes devises cette année. Bien que le dollar canadien ait mieux résisté que la plupart des autres devises, il s’est aussi affaibli. Depuis le début de l’année à 78,9 cents américains, le huard avait perdu plus de cinq cents au 31 octobre, soit environ 7 %.

Par conséquent, les fonds communs de placement et les fonds négociés en Bourse (FNB) qui ont recours à la couverture de change sont restés loin derrière leurs homologues non couverts. Parmi les FNB les plus importants, le FNB iShares Core S&P 500 Index (CAD-Hedged) avait perdu 19,2 % au cours de l’année terminée le 31 octobre, ce qui est bien pire que la perte de 12,1 % du FNB iShares Core S&P 500 Index non couvert.

La même tendance prévaut dans d’autres catégories d’actions étrangères et de revenus étrangers. Fidelity Investments Canada, par exemple, offre des versions couvertes et non couvertes de plusieurs mandats. Parmi ses choix neutres sur le plan monétaire, on trouve sa stratégie à taux variable, qui investit principalement dans des titres de créance de qualité inférieure d’émetteurs basés aux États-Unis ou dont la dette est libellée en dollars américains.

La récente différence de rendement entre les deux fonds reflète l’effondrement du dollar canadien. Au 31 octobre, la série F du Fonds Fidelity Revenu élevé à taux variable – Devises neutres avait perdu 2,3 % depuis le début de l’année. Son homologue non couvert, le Fonds Fidelity Revenu élevé à taux variable, était en hausse de 5,5 % sur la même période.

Les fortes baisses des marchés ont tendance à être haussières pour le dollar américain, qui est considéré comme une source de sécurité et de liquidité. Cela a été le cas cette année, tout comme lors de la crise de la COVID-19 en 2020 et de la crise financière de 2008.

« Il y a toujours une recherche de dollars américains chaque fois que vous avez un selloff », constate Alfred Lee, directeur, gestionnaire de portefeuille et stratège en investissement, FNB BMO, chez BMO Gestion d’actifs,  à Toronto – l’une des nombreuses entreprises à offrir des fonds couverts et non couverts. « Dans une perspective de construction de portefeuille à long terme, il est toujours bon d’avoir ce dollar américain pour couvrir une partie du risque lié au marché des actions. »

Comme le marché boursier canadien est fortement axé sur les services financiers et les ressources naturelles, les investisseurs doivent se tourner vers les États-Unis et d’autres marchés étrangers pour obtenir une diversification sectorielle adéquate.

La question qui se pose aux conseillers et à leurs clients est de savoir quel risque de change ils doivent assumer lorsqu’ils investissent à l’extérieur du Canada. Les sociétés de fonds considèrent généralement que leur rôle consiste à offrir un choix.

« Très souvent, vous pourriez avoir des rendements dans une classe d’actifs qui sont érodés par les rendements de la devise, rapporte Alfred Lee. Nous voulons donc donner l’option à l’investisseur d’avoir la version non couverte et aussi la version couverte contre le risque de change. »

Les dernières prévisions trimestrielles des Services économiques TD suggèrent que le pire de la dépréciation de la devise pourrait être passé. « Le dollar canadien pourrait connaître une certaine appréciation par rapport au dollar américain au cours des prochains mois si le mouvement d’éloignement du risque sur les marchés financiers s’atténue et si l’économie canadienne peut maintenir sa surperformance sur le front du PIB. »

En comparaison, la TD a déclaré que l’euro et la livre sterling semblent avoir encore des perspectives de baisse en raison de la menace que représente la guerre entre l’Ukraine et la Russie pour l’approvisionnement en gaz naturel, et de la faiblesse économique en Europe.

Le dollar canadien étant actuellement déprimé à environ 73,3 cents américains, les arguments en faveur de la couverture de change sont devenus plus convaincants. Bien que le huard ait atteint son plus bas niveau historique à 61,79 cents, le dollar américain est encore à son plus haut niveau historique. « Avec la hausse du dollar américain, souligne Alfred Lee, si vous voulez être tactique, je pense qu’avoir une version couverte est une bonne opportunité à ce stade. »