La fiscalité de l’assurance vie : transparence à deux vitesses

Par Denis Preston | 5 mars 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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La fiscalité de l’assurance vie est complexe… et pas toujours transparente pour les consommateurs. En effet, certaines taxes sont expliquées au client alors que pour d’autres, c’est le silence complet.

TAXE SUR LES PRIMES: NON TRANSPARENTE

L’une des mesures fiscales dont omettent de parler plusieurs représentants demeure la taxe sur les primes. Pourtant, toutes les provinces taxent les primes d’assurance de personnes (vie, invalidité, maladies graves, etc.). Ces taxes sont perçues par les assureurs et envoyées aux gouvernements provinciaux sans que les clients en soient informés.

Selon la province, les taxes sur les primes varient de 2 à 5%. Elles s’appliquent sur la totalité de la prime, incluant la partie épargne des assurances avec valeur de rachat (vie entière ou vie universelle) et les options de remboursement de primes. Ce sont les seuls produits où l’épargne est amputée d’une taxe, qui s’ajoute aux autres frais d’acquisition.

Au Québec, le taux est de 3,48%1. Pour 10000$ de primes perçues, l’assureur envoie un chèque de 348$ au gouvernement du Québec.

TAXE DE VENTE: TRANSPARENTE

Trois provinces taxent les primes des assurances collectives. Cette taxe de vente s’ajoute à la taxe sur les primes. Au Québec, elle est de 9%. Le taux total de taxation de l’assurance collective dans la province est donc de 12,79%, soit 1,0348 (taxe sur les primes) x 1,09 (taxe de vente) – 1. La taxe de 9% ne s’applique pas à l’assurance individuelle.

Le gouvernement de la Saskatchewan a annoncé fin février qu’il mettra fin à sa taxe de vente de 6% appliquée aux primes d’assurance de personnes individuelles et collectives. La mesure sera rétroactive au 1er août 2017, date à laquelle la taxe a commencé à être prélevée. Selon Advocis, d’autres provinces surveillent la situation de près.

IMPÔT SUR LE REVENU DE PLACEMENT: NON TRANSPARENT

Les polices d’assurance vie exonérées portent mal leur nom. À preuve, cet extrait des ­Notes explicatives – critère d’exonération des polices d’­assurance vie du ministère des­Finances du Canada:

«­Le revenu gagné dans une police non exonérée est imposé à titre de revenu d’intérêts selon la comptabilité d’exercice au niveau du titulaire de police, contrairement au revenu gagné dans une police exonérée, qui est plutôt assujetti à un impôt minimum de 15% – l’impôt sur le revenu de placement – auquel l’assureur est assujetti[2].»

Cet impôt fédéral de 15%[3] ne s’applique qu’aux polices d’assurance vie avec épargne. Il a plusieurs conséquences.

«L’impôt sur le revenu de placements a pour effet de réduire le taux de croissance intrinsèque du contrat et nécessite un rajustement approprié des primes des contrats à prime et capital fixe. En général, il fait partie des frais administratifs d’un contrat d’assurance vie universelle ou est inclus dans la prime d’un contrat à prime fixe», écrit notamment SunLife[4].

DISPOSITION D’UN CONTRAT: TRANSPARENTE

On a beaucoup traité des répercussions d’une disposition (par exemple, le rachat ou le transfert de propriété) d’un contrat d’assurance vie. Ses conséquences fiscales sont donc généralement bien expliquées aux clients.

À cet égard, le texte d’information ­Disposition des contrats d’assurance vie[5] de Manuvie est éclairant pour vous aider à aborder la question avec vos clients.

CONSÉQUENCE SUR LE CHOIX DES PRODUITS

La fiscalité influence le choix du produit d’assurance à recommander à un client. Elle explique en bonne partie pourquoi l’Arbre de décision pour une évaluation du besoin familial d’assurance sur la vie de la Solution IQPF inclut, lorsque le client a un besoin supplémentaire d’assurance vie permanente, la question suivante:

«­Est-ce que le client a cotisé au maximum au REER, au CELI et remboursé ses dettes de consommation ?[6]»

Si ce n’est pas le cas, l’assurance sans valeur de rachat est à conseiller. Ce n’est qu’une fois que le client a utilisé tous les outils d’épargne fiscalement plus avantageux (incluant, selon sa situation, le ­REEE et le ­REEI) qu’il pourrait envisager la souscription d’une assurance avec valeur de rachat.

Denis ­Preston, ­CPA, ­CGA, ­FRM, ­Pl. Fin., est formateur et consultant.

[1] Une taxe de 3 % est inscrite à la Loi sur les impôts, par. 1167, et la prolongation de 0,48 % figure au budget provincial 2017, p. A.64. [2] goo.gl/JBkMLu [3] Loi de l’impôt sur le revenu, par. 211.1 (1) [4] goo.gl/N7BN15 [5] goo.gl/BXHDpy [6] Module 3 – Assurance et gestion des risques, chapitre 2, section 2.2.2.7, www.solutioniqpf.org


• Ce texte est paru dans l’édition de mars 2018 de Conseiller.

Denis Preston