RVER : une occasion de développement des affaires?

Par François Bernier | 28 août 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
5 minutes de lecture
123RF

L’arrivée du régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) peut-elle constituer une occasion de développement en matière de régimes collectifs?

Le projet de loi 80 portant sur la Loi sur les régimes volontaires d’épargne-retraite, a été déposé à Québec le 12 juin 2012.

Ce projet de loi, qui donne suite à des mesures annoncées dans les discours sur le budget de 2011 et de 2012, vient créer un type de régime de retraite peu coûteux, appelé « régime volontaire d’épargne-retraite » (RVER), accessible pour les travailleurs autonomes et pour les travailleurs de PME dont l’employeur ne souscrit pas déjà à un régime collectif.

En mettant sur pied ce programme, le gouvernement du Québec espère augmenter le taux d’épargne parmi les travailleurs québécois. Il est utile de rappeler qu’en ce moment, 30% des travailleurs québécois n’ont aucune épargne personnelle en dehors de celle détenue dans un régime collectif offert par un employeur, et que 50% des travailleurs québécois ne bénéficient pas de régime d’épargne-collective dans le cadre de leur emploi.

Ce nouveau régime n’entrera en vigueur que le 1er janvier 2013, mais son application ne sera obligatoire qu’à compter du 1er janvier 2015. À partir de cette date, tout employeur qui, au 31 décembre d’une année, aura cinq employés comptant au moins une année de service continu, devra, dans l’année qui suit, souscrire à un régime volontaire d’épargne-retraite et y inscrire automatiquement tout ses employés justifiant un an de service continu. L’employeur qui comptera cinq employés ou plus à son service au 31 décembre 2012 disposera de deux ans à compter de cette date pour se conformer à la loi.

À noter que si le nombre d’employés au service d’un employeur devient inférieur à cinq, le régime devra rester en place, à moins que tous les employés visés n’ait préalablement renoncé à participer au régime ou aient cessé d’y participer. Le participant pourra également, en tout temps, cesser sa participation au régime.

De plus, l’employeur offrant déjà un régime collectif à tous ses employés ne sera pas touché par l’obligation de mettre sur pied un RVER.

L’employeur ayant l’intention de mettre en place un RVER devra aviser chacun de ses employés par écrit de son intention; chaque employé aura 60 jours pour s’exclure du régime. Tout particulier pourra participer à un RVER dans la mesure où il aura l’ « espace REER » requis.

Seuls les assureurs, les sociétés de fiducie et les gestionnaires de fonds d’investissement pourrons agir à titres « d’administrateurs » et offrir le RVER. Les administrateurs offrant ce régime devront proposer une option de placement par défaut qui satisfera aux critères prévus par un règlement à être publié prochainement. L’administrateur pourra, en outre, offrir aux participants d’autres options de placement à divers niveaux de risque et de rendement et parmi lesquelles le participant pourra effectuer son choix.

Le taux de cotisation par défaut sera fixé à 2 % pour les années 2013 à 2015, de 3 % pour l’année 2016 et de 4 % pour l’année 2017. Il sera toutefois possible à l’employé de réduire ou d’arrêter le niveau de ses cotisations en tout temps. L’employeur, pour sa part, ne sera pas tenu de cotiser au régime pour le compte de ses employés. Toutefois, s’il le fait, sa part sera portée dans un compte immobilisé.

Certaines obligations administratives seront requises de la part de l’employeur :

  • Aviser l’employé de son intention de souscrire à un RVER;
  • Conserver une preuve de l’avis de renonciation et en aviser l’administrateur du régime dans les 30 jours;
  • Effectuer et transmettre les retenues à la source à l’administrateur du RVER;
  • Tenir dans ses livres, pour chaque participant, le cas échéant, un compte immobilisé et un compte non immobilisé.

Il est à noter que l’employeur qui fera défaut de verser les cotisations à l’administrateur du régime dans le délai prévu devra verser des intérêts sur les cotisations dues et sera passible d’une amende.

Au décès du participant, son conjoint (ou ses héritiers) auront droit à une prestation dont le montant sera égal au solde des comptes du participant. Contrairement au REER, il sera possible de désigner des bénéficiaires au régime, tout comme on le fait actuellement pour un fonds distinct ou une police d’assurance-vie.

En cas de séparation ou de divorce, les droits accumulés par le participant au titre d’un régime volontaire d’épargne-retraite seront partageables en vertu des règles sur le patrimoine familial.

Finalement, les sommes détenues dans les RVER seront incessibles et insaisissables, tant en cas de faillite qu’en cas d’insolvabilité.

La loi prévoit que les régimes offerts devront être peu coûteux. La réglementation, qui reste à venir, viendra préciser cette volonté du gouvernement. La lecture des documents du dernier budget du Québec nous laissent à penser que les autorités gouvernementales considèrent que 1 % est le seuil maximal pour des frais de gestion « acceptables ». Cela laisse-t-il une place au conseiller et à sa rémunération? Il nous est permis d’en douter. De nombreux fournisseurs potentiels ont déjà mentionné leur intention d’offrir le RVER directement aux employeurs, sans utiliser le canal de distribution que constituent les conseillers financiers.

Que peut donc faire un conseiller entre-temps? Doit-il courir le risque qu’un administrateur offrant le RVER vienne directement recruter sa clientèle d’affaire dès 2013? Comme le RVER ne sera pas en place avant le 1er janvier 2013 et pas obligatoire avant le 1er janvier 2015, il s’agit probablement d’une belle opportunité de développement pour les conseillers œuvrant dans le domaine de l’épargne collective ou ayant une clientèle d’affaires. Il pourrait être en effet intéressant, de faire, dès cet automne, de la relance auprès de ces derniers et d’examiner avec eux la possibilité de mettre en place un régime collectif.

P.S. Selon les résultats des élections, il est possible que ce projet de loi ne reçoive pas la sanction royale et, conséquemment, qu’il n’entre pas en vigueur.

François Bernier est notaire et planificateur financier. Il occupe le poste de directeur, planification fiscale et successorale, chez Placements Mackenzie. Il peut être rejoint à fbernier@mackenziefinancial.com

François Bernier

François Bernier est notaire. Il occupe le poste de directeur, techniques de planification avancées à la Financière Sun Life.