Comment annoncer une chute des placements

Par Sylvie Lemieux | 31 octobre 2022 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
3 minutes de lecture

Dans un marché baissier, la performance des portefeuilles en prend un coup. Inévitablement, le conseiller devra l’annoncer à ses clients. Comment bien se préparer à cette rencontre qui est rarement un moment agréable ?

Depuis le début de sa carrière comme planificateur financier et conseiller en placement, Fabien Major a traversé quelques cycles baissiers. Il a donc eu le temps de peaufiner son discours. Il prend quand même le soin de préparer ces rencontres en tenant compte de la personnalité de son client et de sa situation personnelle.

Est-il d’un naturel anxieux ? Ou a-t-il un esprit analytique ? A-t-il vécu un changement important comme un divorce ? Est-il à la veille de prendre sa retraite ou est-il déjà un heureux retraité ?

« Il faut être fin psychologue et ajuster son approche selon la personne, explique Fabien Major, fondateur du cabinet Major Gestion privée, lié à Assante. Il s’agit en fait de personnaliser une nouvelle déjà connue puisque les clients sont informés par les médias et consultent leur relevé. On ne leur apprend donc rien, mais on leur explique l’impact des marchés sur leur portefeuille. »

« Surtout, il ne faut pas se taire. Il vaut toujours mieux prendre l’initiative de la communication », conseille Fabien Major qui, souvent, invite ses clients à manger dans leur restaurant préféré, un cadre plus relax pour mener ce genre de discussion.

MONTRER DE L’EMPATHIE

Face à la déception du client constatant le repli de ses placements, il est important de se montrer empathique. « Il faut revenir à la base et expliquer que la perte financière n’est pas permanente, souligne le conseiller. Je vais aussi détailler la performance de tous ses actifs, que ce soit les actions, les fonds négociés en Bourse, les CPG et autres. »

Chaque fois, il pose une question qui fait son effet. « Je demande au client comment il a vécu les récessions précédentes, celle de 2015, par exemple. Bien souvent, il ne se souvient pas vraiment d’avoir vécu des jours douloureux. »

Cette question l’aide à leur faire réaliser que la performance des marchés est souvent différente de la situation économique.

« Actuellement, on vit un choc post-pandémique marqué par l’inflation et une possible récession, explique-t-il. La pénurie de main-d’œuvre que l’on connaît est un tampon à la récession. Même s’il y a plus d’un million de chômeurs au Canada, il y a aussi quelque cinq millions de postes disponibles. Une personne qui a un emploi stable n’a pas trop à s’en faire avec le repli des marchés. Il y aura un retour à une embellie. »

SAVOIR ÉCOUTER

Quand un client voit ses actifs fondre, il peut être tenté de jeter le blâme sur quelqu’un — son conseiller, par exemple — et revoir la répartition de son portefeuille. Avec tact, Fabien Major explique alors qu’il n’est pas responsable de la performance des marchés.

« Même si on aimerait toujours pouvoir en faire plus pour nos clients, il ne faut surtout pas en faire une affaire personnelle, recommande-t-il. Comme conseiller, on contrôle la qualité des investissements, pas les marchés. C’est important de montrer le travail qui a été fait pour le portefeuille. Si l’investisseur est toujours à l’aise avec son profil de risque, on voit avec lui s’il est pertinent de modifier ses positions. »

Une bonne écoute active est essentielle. « Si le client nous parle à trois reprises des CPG, peut-être manifeste-t-il une réaction émotive face à ses pertes qui indique que sa patience a été étirée au maximum. Il faut décoder les messages qu’il envoie et analyser aussi son non verbal. »

Bref, lorsque les marchés sont baissiers, il est important d’aider son client à mettre les choses en perspective… et lui conseiller d’éviter de suivre l’évolution de ses placements au jour le jour. « La distanciation, ça marche aussi avec son portefeuille », conclut Fabien Major.