Comment donner une deuxième chance à une cliente qui ne collabore pas

Par Sylvie Lemieux | 20 mars 2023 | Dernière mise à jour le 24 novembre 2023
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une conseillère et ses clients.
Photo : seb_ra / istockphoto

Un jour ou l’autre, tout conseiller est susceptible de recevoir une demande qui sort de l’ordinaire de la part de ses clients. Dans cette série d’articles, des professionnels partagent leurs expériences et les leçons qu’ils en ont tirées.

Pendant plusieurs mois, Ann-Rebecca Savard a tenté de joindre une de ses clientes pour faire la mise à jour de son dossier à la suite d’un transfert de représentant – une obligation déontologique. Malgré des rappels réguliers, la conseillère en sécurité financière chez MICA restait sans nouvelles de sa cliente.

« Cette dernière a finalement réagi quand elle a reçu l’infolettre que nous envoyons chaque début d’année aux clients qui m’ont été transférés pour leur mentionner l’importance de mettre à jour leur dossier et valider que les stratégies de placement répondent toujours à leurs besoins. Sa réaction nous a tous pris par surprise, mon équipe et moi », raconte Ann-Rebecca Savard.

« Elle a envoyé un courriel soutenant qu’elle n’avait jamais donné son accord pour recevoir nos infolettres, et elle a vu cet envoi comme un bris de confidentialité, poursuit la conseillère. Elle a demandé de ne plus communiquer avec elle et de continuer à faire le suivi du REEE [régime enregistré d’épargne études] avec son mari, avec qui on communiquait régulièrement. »

Ann-Rebecca lui a alors envoyé un nouveau courriel pour lui expliquer que l’infolettre ne visait rien d’autre que de l’informer des étapes à suivre. Elle lui a aussi fait part à nouveau de son obligation de mettre à jour son dossier personnel puisque le REEE était au nom du couple et l’invitait à prendre rendez-vous avec elle pour en discuter.

S’en est suivi un échange de courriels qui a laissé la conseillère pantoise.

« Elle a répondu en citant des articles de lois reliés aux obligations déontologiques des conseillers. La cliente – qui travaille dans le domaine du droit – voulait s’assurer que je me référais bien à ces règlements. J’ai vraiment été étonnée de sa forte réaction à ma demande. Elle a pris le temps de faire toutes ces recherches pour, après tout, éviter une conversation de cinq à dix minutes avec moi », s’exclame Ann-Rebecca Savard.

En raison de la tournure des événements, cette dernière a senti le besoin de faire appel aux responsables en déontologie de sa firme avant de formuler ses réponses aux courriels de la cliente. « C’était important de donner la bonne information et de documenter le dossier. On a également pris soin d’informer le courtier de la situation », dit-elle.

Finalement, face à la fermeture de la cliente qui ne voulait toujours pas prendre un rendez-vous, Ann-Rebecca Savard a décidé, après discussion avec son équipe, de mettre fin à la relation d’affaires. Ce n’est qu’après la réception de sa lettre lui faisant part de cette décision que la cliente a changé d’attitude.

« Elle m’a supplié de la garder et s’est dit désolée de la situation. Elle acceptait enfin la rencontre téléphonique. C’est lors de cet appel qu’elle m’a expliqué avoir eu une mauvaise expérience avec un conseiller qui s’était montré insistant à la vente de produits et de services, la raison de sa réticence à me parler. Je crois que son mari lui a aussi fait comprendre que je l’avais aidé à trouver des solutions dans leur dossier et qu’il voulait poursuivre le travail avec moi. »

Après en avoir discuté avec son adjointe, Ann-Rebecca Savard a décidé de laisser la chance au coureur. « Ça a été une décision d’équipe, dit-elle. Le bien-être de tout le monde est important dans les relations avec la clientèle. »

Si l’histoire a mal commencé, elle se finit bien. « J’ai conservé ma cliente et, aujourd’hui, nos communications se font dans un respect mutuel. Elle sait que je vais la contacter à quelques reprises dans l’année et elle collabore très bien. »

En quelques années de pratique, c’était la première fois qu’Ann-Rebecca Savard se heurtait à une situation du genre. « Il faut encore aller à l’encontre de la mauvaise réputation des conseillers qui, pour certains, ne sont là que pour soutirer de l’argent à leurs clients. Heureusement, ce n’est pas la majorité des clients qui pense ça. »

Parfois, la solution à une impasse passe par la fin de la relation avec le client. Cette histoire démontre bien que cette solution extrême ne devrait être considérée que lorsque toutes les autres options ont été épuisées.

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Sylvie Lemieux

Sylvie Lemieux est journaliste pour Finance et Investissement et Conseiller.ca. Auparavant, elle a notamment écrit pour Les Affaires.